POLAU : l’Art et l’Urbanisme fêtent leurs 10 ans de mariage.

Facebook
Twitter
Email

Les Grands Formats de la Rédaction

C’est une structure unique en son genre (et en France), installée au cœur de la Métropole tourangelle, à Saint-Pierre-des-Corps. De grands projets nationaux tels le Plan Guide Arts et Territoires à des micro-projets comme l’approche culturelle d’un document réglementaire sur le patrimoine dans une commune de 400 habitants, le Pôle Arts & Urbanisme (POLAU pour les copains) s’est arrogé pour mission, il y a une décennie donc, de créer des liens très différents, éphémères ou durables, entre problématiques urbaines et créations artistiques. Sur le papier, le mariage de la carpe et du lapin, mais dans la tête de Maud Le Floc’h et de son équipe de 5 personnes : une évidence.

Un sacré défi à relever qui, au bout de dix ans, commence à entrer dans les mœurs des décideurs, comme des citoyens : après avoir longtemps peaufiné sa démarche, le POLAU est peu à peu devenu un organisme que l’on vient chercher pour des besoins précis, du Ministère de la Culture au Plan Rhône, en passant par des agences d’urbanisme et des collectivités locales plus ou moins grandes.

Agrégateurs de données et d’informations locales, facilitateurs de rencontres, les acteurs du pOlau cherchent dans tous les cas à faire passer le regard sur la ville, le quartier ou le village par le prisme de la création artistique. En marge du POLAU, Maud Le Floc’h vient de remettre sur leur demande aux ministères de la Culture et de la Cohésion des Territoires un rapport  d’opportunité visant à étendre le 1% artistique à tout nouveau projet d’aménagement. Ce Rapport est le fruit d’une reconnaissance de sa démarche initiale qui l’a amenée à créer le POLAU en 2007. Une reconnaissance qui semble être pour Maud Le Floc’h un beau cadeau d’anniversaire.

Ce vendredi 15 décembre, sur réservation, les citoyens de l’agglo tourangelle sont invités à venir fêter ce 10e anniversaire au Point Haut, siège du POLAU, en présence d’artistes et de professionnels de l’urbanisme et de l’aménagement du territoire. (Attention réservation indispensable !)

Mission Repérage(s)

10 ans, 10 projets

Nous avons demandé à Maud Le Floc’h – urbaniste et journaliste, ancienne co-directrice de la Compagnie Off et actuelle directrice-fondatrice du POLAU – de réaliser le douloureux exercice de ne retenir que 10 projets réalisés, co-réalisés et/ou initiés par sa structure, projets qui ont soit marqué des tournants dans la reconnaissance du POLAU, soit marqué ses acteurs de par leur portée, leur originalité et/ou leur importance dans l’évolution de leurs démarches.


PROJET #1 > Mission repérage(s) : un élu, un artiste (2003-2006)

Un concept inédit : un maire et un artiste passent une journée seul à seul (pas de presse, pas d’assistants, pas de médiateur, même pas de Maud Le Floc’h !) et parcourent la ville pour l’appréhender chacun à sa manière et en faire part à l’autre. Le matin, un itinéraire et des ponctuations préparés par l’artiste, l’après-midi préparés par l’élu. Dès le lendemain, un debriefing à chaud et à charge de chacun de livrer 10 impressions et 10 envies sur la ville, nées de cette journée particulière.

Expérimentation menée dans 13 villes dans toute la France (Aubagne, Gap, Romans-sur-Isère, Rennes, Besançon, Le Puy-en-Velay…).

Maud Le Floch : «Cinéma, arts de la rue, arts plastiques… Les disciplines étaient différentes, mais le principe était de faire uniquement intervenir des artistes qui ont le besoin de faire du repérage urbain pour leurs créations. C’est l’acte fondateur du Polau, qui allait naître l’année suivante.»

Balade picturale autour du risque inondation. © Jean-Gabriel Pujol

PROJET #2 > Jour Inondable (2012)

Au début était le PPRI (Plan de Prévention des Risques des Inondations, vous savez cette carte avec des zones de couleurs qu’on doit signer quand on achète un appartement ou une maison) de Tours, un document obligatoire qui recense les zones inondables de la Ville. L’équipe du POLAU réfléchissait à un travail sur la Loire quand elle est tombée sur ce document. Elle s’est en servi de base pour travailler avec des artistes de la Folie Kilomètre, une radio locale, la sécurité civile, des élus et des institutions ligériennes telles que la Mission Val de Loire ou le Plan Loire.

Maud Le Floc’h : «L’un des objets du POLAU est de prendre à bras-le-corps un enjeu urbain et d’y associer des artistes. Le PPRI s’y prête totalement. Il associe des données très techniques, des réglementations complexes et en même temps un risque potentiel pour l’ensemble de la population, donc quelque chose de très concret. C’est à partir de cette matière première que les artistes ont été invités à travailler.»

A noter : le Plan Rhône vient de faire appel au Polau pour un projet un peu similaire.

> Retrouvez notre article du 15 octobre 2016 sur cet événement.

© Encore Heureux Architectes

PROJET #3 > Reconquête Urbaine (2016-2017)

Dès 2012, la Ville de Paris demande au POLAU de travailler sur une requalification urbaine temporaire des espaces autour de trois portes du périphérique parisien (Porte Montmartre, Porte de la Villette, Passage de l’Ourcq). Deux ans plus tard, en 2014, leur projet d’urbanisme culturel est lauréat du premier Budget Participatif. Un budget d’1,5 million d’euros y est alloué.

> Les détails du projet sur le site du Polau

Maud Le Floch :

«Par exemple, porte Montmartre, derrière les puces, se trouvent les biffins, des petits commerçants d’objets récupérés un peu partout. Cela génère des flux éphémères qui peuvent être importants et des conflits d’usage avec les habitants. Un travail de terrain a été réalisé par les scénographes d’Encore Heureux qui a permis de récupérer des miroirs pour en faire une installation liée au réemploi»


Projet #4 > Urbanisme culturel à Bagneux/Grand Paris (2017-2018)

Appel à Manifestation d’Intérêt «Inventons la métropole du Grand Paris» : un concours qui vise à rassembler différentes disciplines pour intervenir dans l’espace urbain. Le projet du groupement dans lequel s’inscrit le POLAU a été retenu.

Bagneux. Stratégie culturelle pour la réorganisation d’un quartier, basée notamment sur le fait qu’entre la décision d’un projet d’aménagement et sa réalisation, il y a un laps de temps qu’il est intéressant d’occuper afin de lancer la dynamique du projet urbain en amont par des actes artistiques et culturels, des événements et des occupations temporaires, pour éviter qu’il ne se résume à un chantier long et pénible.

> Lire les détails du projet sur le site du Polau.

Maud Le Floc’h : «Nous allons travailler avec des acteurs culturels de Bagneux et de Châtillon sur le motif de la fabrique urbaine. Un processus duquel les artistes sont souvent exclus et où notre rôle est de les mettre en relation avec les acteurs traditionnels des travaux.»

© Apolline Fluck – Polau

Projet #5 > La Chasse aux Trésors de Montrésor (2017)

La commune de Montrésor se dote d’une AVAP (Aire de Valorisation de l’Architecture et du Patrimoine), enfin plutôt un SPR (Site Patrimonial Remarquable), car c’est une nouvelle fois en train de changer de nom. Il s’agit d’un document réglementaire qui régit les règles d’urbanisme relatives au patrimoine. Un cabinet d’urbanisme gère la conception de cette AVAP et il a émis l’envie d’en faire quelque chose de dynamique, de faire contribuer les acteurs locaux, de transformer un processus de conception de règlement en temps collectif de définition d’un projet de développement culturel. Il a donc contacté le POLAU pour cet accompagnement.

> Plus de détails sur le site du POLAU

Maud Le Floc’h : «Lorsqu’on s’intéresse à un site, il y a deux options : soit on est protectionniste et simplement administratif, soit on en fait quelque chose de dynamique, par le biais d’un projet touristique et/ou culturel. On s’est rencontré avec l’urbaniste et l’idée d’inclure le patrimoine immatériel du village a émergé. Un atelier citoyen de conception d’une chasse au trésor qui permet de faire collectivement une détection des « trésors », de mettre les habitants dans le dialogue d’une AVAP active»

Schéma du Plan Guide ARTEPLAN © Pole Art & Urbanisme

Projet #6 > Le Plan Guide Art et Aménagement du Territoire (2015)

En version papier et numérique, ce guide vise à recenser à l’échelle nationale de nombreuses initiatives mêlant urbanisme et création artistique, sous différentes formes. Le POLAU a construit la plateforme et l’alimente régulièrement avec une partie éditoriale qui devrait continuer à se développer sous forme de média, publiant un fil d’actualité, des articles et des images sur le sujet.

> Retrouvez notre article du 6 octobre 2015 sur la fabrique et les enjeux de ce guide.

Maud Le Floch : «Ce travail est un tournant pour le POLAU. D’expérimentateurs et d’inventeurs un peu isolés, nous sommes devenus observateurs, analystes et fédérateurs. Cela nous a permis de prendre du recul. Les démarches artistiques et culturelles existent, les projets urbains existent, nous ne créons rien : nous mettons en relation et accélérons certains processus. Cette commande du Ministère de la Culture a mis en lumière ce travail d’intermédiation. Il permet aux différents acteurs de l’urbanisme, de l’architecture, de l’aménagement du territoire et de la culture d’avoir une vision globale de ce qui s’est fait, se fait et peut se faire en matière « d’urbanisme culturel ».»

© Apolline Fluck – Polau

Projet #7 > Résidences croisées (à partir de 2018)

Le POLAU organise depuis plusieurs années dans ses locaux des résidences d’artistes, d’urbanistes, d’architectes. C’est l’une des missions fondamentales de son projet : mettre à disposition des lieux, des ateliers, une équipe, un regard pendant un temps donné, lors d’une quinzaine de résidences par an.

> Plus de détails sur le site du POLAU

Maud Le Floc’h : «Cette année 2018, ce sera un tournant dans nos résidences, car l’idée est de croiser quasi-systématiquement des acteurs de l’urbanisme (cela peut être un membre d’une collectivité locale) et des artistes dans différentes disciplines. Par exemple, nous venons de faire travailler ensemble un collectifs de comédiens et des paysagistes – Collectif BIM et Agence Bivouac – qui confrontent leurs points de vue et leurs approches.»

© Image de Marc

Projet #8 > Le Point Zéro Tours/SPDC (2009)

En 1968, l’avènement de l’automobile a eu raison d’un très beau canal reliant la Loire au Cher, devenu un lieu insalubre, mais néanmoins lieu de balade apprécié des Tourangeaux comme des Corpopétrussiens. Résultat : une portion d’autoroute défigure le quartier de manière assez radicale et brutale et impose une frontière quasi-infranchissable entre les deux communes.

Suite à un jeu d’enquête auprès des habitants, des usagers du quartier et à des réflexions autour de la séparation entre les deux communes voisines Tours et Saint-Pierre-des-Corps, naît l’idée du Point Zéro, devenu depuis un repère, modeste certes, mais qui matérialise un lien entre les habitants de part et d’autre et une vie sous l’autoroute, malgré tout.

Une vidéo du POLAU sur l’inauguration du Point Zéro

Maud Le Floc’h : « L’Agence Nationale de Psychanalyse Urbaine était en résidence au POLAU. Leurs travaux consistent principalement à identifier des névroses urbaines et à proposer des solutions. Nous leur avons confié nos détections urbaines locales et ils se sont saisis de ce point névralgique pour proposer d’en faire un lieu emblématique. Le Point Zéro, c’est un point de réconciliation urbaine et universelle. Cela permet de changer le regard de tous sur cette rupture urbaine, de nommer le lieu. D’ailleurs depuis, ce bout de territoire est amené à muter»

Concert de Chantier avec le Tours Soundpainting Orchestra

Projet #9 > Le Chantier Ouvert du Point Haut (2014)

Plutôt que de laisser sortir de terre un nouveau lieu culturel en coulisses, derrière des palissades, en confinant entre eux architecte (en l’occurrence Patrick Bouchain, maîtres d’œuvres, maîtres d’ouvrage, ouvriers, l’équipe du POLAU décide d’ouvrir le temps des travaux du Point Haut (lieu qui accueille ses locaux et ceux de la Compagnie Off).

> Retrouvez notre article du 14 avril 2015 sur le prix national Cap Com’ reçu par l’agglomération de Tours pour la communication autour du chantier ouvert du Point Haut.

> Retrouvez les détails sur le site du pOlau

Maud Le Floc’h : «L’idée était simple : mettre en scène et ouvrir au public les sujets techniques du chantier, en faisant intervenir des artistes auprès des acteurs du chantier. Parmi les nombreux sujets traités : la mise en œuvre de l’accessibilité, la dépollution des sols, la dépollution des sols, la construction en zone inondable, la sécurité de chantier…»

© Nicolas Simarik

Projet #10 > Service artistique de proximité : Sanitas en objets, Nicolas Simarik (2009-2015)

Pendant plusieurs années, l’artiste plasticien Nicolas Simarik (connu notamment pour son Catalogue de la Déroute réalisé dans un quartier de Toulouse) s’installe dans un appartement du rez-de-chaussée d’un immeuble du Sanitas et met peu à peu en place une sorte de «service artistique de proximité», un lieu ouvert où les habitants, mais aussi différents services de quartier, peuvent passer échanger sur des problématiques et des idées. Des ateliers hebdomadaires de créativité ont impulsé un rythme et donné lieu à diverses créations interactives pendant toutes ces années.

Maud Le Floc’h : « On a repris la résidence de Nicolas Simarik en cours de route. On l’a notamment mis en relation avec le service des Espaces Verts de la Ville de Tours qui devait refaire le mobilier urbain du Jardin Meffre. Nicolas Simarik a travaillé avec les habitants pour fabriquer des objets qui allaient devenir leur nouveau mobilier urbain. »

> Retrouvez les détails du projet sur le site du pOlau.

Maud Le Floc’h © photo Cyril Chigot

BONUS > Rapport sur le 1% Travaux Publics

La rédaction par Maud Le Floc’h et de deux inspecteurs des ministères de la Culture et de la Cohésion des Territoires d’un Rapport d’opportunité (rendu en avril, mis de côté pendant la période électorale, puis ressorti cet automne) en vue de l’application de l’article 6 article de La loi relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine (LCAP) visant à élargir le 1% artistique à toutes les opérations de Travaux Publics pour soutenir des projets de création dans l’espace public.

Trois idées importantes pour résumer ce rapport :

1/ Eviter que ce soit une taxe, un 1%, une simple obligation de poser une œuvre dans un coin pour répondre à une injonction légale, mais que ce soit plutôt un enrichissement du projet global, pensé en amont.

2/ Mise « en désir » des projets : la collectivité aura l’obligation, non pas de réaliser un projet coûte que coûte, mais de délibérer en conseil municipal et éventuellement de bénéficier d’un accompagnement artistique et culturel. Avec une possibilité de réponse négative, donc. Si c’est positif, c’est l’équipe municipale qui décide de l’ampleur du projet et de son budget ; ça pourra être plus ou moins de 1%.

3/ Sur le modèle des clauses insertion, la mise en place de clauses culture dans les différents appels d’offres au sein des projets d’aménagement

Maud Le Floc’h : : « Ce rapport se trouve aujourd’hui sur les bureaux des législateurs. Il reste encore du chemin avant que les nouvelles équipes se l’approprient. Pour autant ces démarches sont de plus en plus convoitées par les aménageurs. Cependant un cadre formel et un dispositif interministériel d’accompagnement permettrait d’assister les collectivités et les acteurs artistiques pour mettre en place leurs collaborations »

Facebook
Twitter
Email

La météo présentée par

TOURS Météo

Inscription à la newsletter