Ce dimanche 8 décembre, le Diocèse de Tours organisait des visites exceptionnelles de l’orgue, des combles et des tours de la cathédrale Saint-Gatien. Proposées le jour de la réouverture de Notre-Dame de Paris, ces immersions dans les coulisses de l’édifice religieux ont immédiatement affiché complet car elles sont très rares. Nous avons pu en suivre une aux côtés de l’Architecte des Bâtiments de France.
Parmi les quelques chanceuses et chanceux qui nous accompagnent, une femme se souvient avoir déjà pu monter dans les escaliers en colimaçon du monument. Mais c’était il y a de longues années. A part pour elle, et pour l’ABF qui se rend régulièrement sur place depuis sa prise de fonction en 2019, cette heure passée dans les hauteurs de la cathédrale tourangelle est un privilège. On défie le vertige, on se courbe pour passer les portes, on se contorsionne dans les couloirs étroits, mais surtout on profite.
Le parcours débute côté sud, en pénétrant dans la tour par une petite porte discrète située près de l’entrée du bâtiment. On apprendra un peu plus tard qu’une boîte à clefs permet aux pompiers de l’ouvrir pour éviter de la défoncer en cas d’intervention. S’ensuivent des dizaines de marches qui tourbillonnent vers un premier niveau où sont stockés des dizaines de moulages de plâtre réalisés lors des restaurations des œuvres en pierre de la cathédrale. Surtout, c’est de là qu’on accède au triforium, une toute petite plateforme qui donne sur la travée centrale de la cathédrale et nous permet d’observer voire de toucher les vitraux situés sous la rosace. Des œuvres du début des années 1500 offertes par des mécènes.
C’est là que commence l’exposé sur la structure du lieu, où l’on apprend par exemple que ces vitraux sont protégés des intempéries et de la pollution par des parois en verre translucide et en plomb situées à l’extérieur. On appelle ça le verre thermoformé.
Construite par petites touches sur plus de 4 siècles, la cathédrale de Tours est à la fois romane et gothique. Le haut des tours a ainsi été rajouté au XVIe siècle, apportant la flamboyance que l’on connait aujourd’hui. Mais par exemple les énormes poutres de la charpente proviennent d’arbres sectionnés d’une plantation de Cheillé au XIIIe siècle, à partir de 1255. Des chênes fins et très hauts que l’on ne faisait pas sécher. Et qui sont toujours bien en place, fixés à la pierre et recouverts par un toit d’ardoise qu’on nous dit être en relatif bon état.
Depuis les premières fondations au XIIe siècle, la cathédrale de Tours a naturellement subi de multiples aménagements et restaurations au fil du temps. On évoque par exemple la disparition d’une flèche. Ou des débats autour des sculptures. Dans tous les cas, chaque opération était une gageure car on n’avait pas du tout les technologies d’aujourd’hui. Ainsi, on montait les poutres avec d’énormes roues. Et il y a plus de 40 ans d’écart entre l’achèvement de la tour nord (terminée en 1504) et la tour sud (finie en 1547).
En 2024, l’enjeu est de préserver ce site, et de capitaliser sur l’expérience acquise après l’incendie de Notre-Dame, ou les incendies – mineurs – dans les cathédrales de Nantes et de Rouen. Par exemple, on a ajouté des détecteurs de fumée dans la charpente, où il n’y en avait qu’un seul. Ils descendent ainsi plus bas, et sont efficaces : l’ABF nous raconte qu’un dimanche matin ils ont sonné à 6h. Une fausse alerte. L’appareil s’était déclenché un matin où les viticulteurs montlouisiens avaient allumé des feux dans les vignes pour les protéger du gel. Les fumées ont été poussées par le vent jusqu’à Tours et aux combles de la cathédrale.
Il s’agit aussi de veiller sur les ardoises, les gargouilles en pierre, les risques d’infiltrations… Ou les cloches. On en aperçoit une en grimpant vers le sommet, à plus de 70m de haut. Mais au total il y en a 4 qui sonnent tous les quarts d’heure. La plus vieille a été fondue au XIVe siècle, une autre a été chipée contre son gré à l’abbatiale de Cormery. C’était au XVIIIe. Et les deux autres datent du XIXe siècle.
Enfin, le clou du spectacle c’est la vue imprenable sur Tours, voire jusqu’à Amboise les jours de beau temps. La cathédrale est le point culminant du centre-ville. Des coursives on voit les courbes de l’amphithéâtre romain, l’Hôtel de Ville, l’Opéra, la gare, l’Hôtel de Ville, la Basilique Saint-Martin, la Tour Charlemagne, la bibliothèque centrale, les maisons du coteau, les hôtels de Porte de Loire ou les immeubles des Rives du Cher. Tout simplement impressionnant.