Planning familial d’Indre-et-Loire : 56 ans après, le combat continue

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Santé sexuelle et lutte contre toutes les formes de violences. Depuis 1967, le Planning familial d’Indre-et-Loire informe, écoute et accompagne différents publics autour de ces deux grandes thématiques. Mais, même après 56 ans de combat, il reste de nombreuses choses à faire…

« Le Planning familial, Sidaction et SOS homophobie sifflent la fin de la récré ! » Réunies sous la bannière « Cas d’école, l’État ne fait pas ses devoirs », les trois associations ont décidé de lancer une action en justice contre l’État et ont saisi, jeudi 2 mars 2023, le tribunal administratif de Paris pour « demander l’application pleine et entière de la loi 2001 ». Cette dernière prévoit trois séances annuelles d’éducation à la sexualité, tout au long de la scolarité. Seulement, selon une étude IFOP pour « Cas d’école », 67 % des 15-24 ans interrogés déclarent de pas avoir bénéficié des trois cours annuels obligatoires et 17 % assurent n’en avoir jamais reçu.

Écoles, collèges, lycées, CFA, maisons familiales et rurales (MFR)… Ce sont des établissements que le Planning familial d’Indre-et-Loire connaît bien puisqu’il y intervient régulièrement. Et certains d’entre eux connaissent « de gros besoins et un grand déficit en termes de prévention », constate Marielle Thomine, coordinatrice de l’antenne tourangelle. Celle qui est aussi psychologue reste pourtant persuadée que ces trois séances annuelles d’éducation à la vie affective et sexuelle ne sont pas si compliquées à mettre en place. Déjà parce que les thématiques qui peuvent être abordées sont vastes. Parmi elles, il y a la lutte contre l’homophobie, la lutte contre les discriminations et le sexisme ou la lutte contre les violences. « Ça va être, par exemple, parler dès l’école primaire des compétences psycho-sociales, de l’égalité filles-garçons, des émotions, du consentement, du rapport au corps… Et tout ça sans forcément passer par le volet sexualité. Il y a plein de choses à faire en amont, qui sont justement primordiales avant l’adolescence », explique-t-elle.

Ces cours peuvent en plus être réalisés par de nombreux acteurs, comme des professeurs ou des associations. « Ça peut être un prof d’histoire qui parle de l’égalité hommes-femmes à travers l’histoire, un prof de maths qui évoque des statistiques, un prof de français qui aborde une thématique à travers la littérature… », détaille Marielle Thomine. Et de poursuivre : « Au final, il y a tellement de choses à faire que, si tout le monde s’en saisissait, ce serait beaucoup plus simple à mettre en place et on aurait moins à intervenir quand il y a le feu. » Le Planning familial d’Indre-et-Loire forme par ailleurs des professionnels, comme les animateurs périscolaires, afin qu’ils puissent intervenir dans les établissements scolaires pour parler de ces sujets-là.

Des élèves « mieux informés »

La coordinatrice de l’antenne tourangelle affirme voir une différence entre les établissements scolaires où ces séances d’éducation sexuelle obligatoires sont proposées et les autres. « Il y a des collèges où ils montent un programme pour les 6e, un pour les 5e, les 4e et les 3e. Nous, nous allons par exemple intervenir en 6e, d’autres partenaires vont venir pour les 5e et les 3e vont monter une pièce de théâtre…  Nous voyons vraiment le résultat dans ces établissements où le travail est fait progressivement, au fil des ans. Les élèves sont bien mieux informés et ont une vision de la vie affective et sexuelle qui n’est pas liée uniquement à la reproduction », indique-t-elle.

Présent en Indre-et-Loire depuis 1967, le Planning familial 37 intervient auprès des personnes en situation de handicap, des jeunes 16-30 ans en insertion, des détenus mineurs et majeurs de la maison d’arrêt de Tours, des étudiants ou des personnes migrantes. L’association travaille également avec les acteurs de l’aide sociale à l’enfance et la protection judiciaire de la jeunesse. Des groupes de parole sont par ailleurs proposés tous les quinze jours pour les femmes victimes de violences conjugales et/ou sexuelles, au centre de vie du Sanitas, à Tours. L’antenne tourangelle est indépendante financièrement et choisit les publics auprès desquels elle s’investit. Mouvement féministe d’éducation populaire, « l’association informe, fait de la prévention et oriente autour de deux grandes thématiques : la vie affective, relationnelle et sexuelle et la lutte contre toutes les formes de violences », précise Audrey Girard, chargée de projets et psychologue au Planning familial 37.

Pour mener à bien leurs missions, les cinq salariés permanents sont accompagnés de stagiaires et de quelque 200 bénévoles. Ensemble, ils interviennent lors de séances collectives ou dans le cadre d’un accompagnement individuel adapté, organisent des permanences gratuites et anonymes dans tout le département une à deux fois par mois, tiennent des stands d’informations dans les lieux festifs ou les universités et forment les professionnels de différents secteurs (éducation, social, santé, animation, insertion…). Ils élaborent par ailleurs des outils de prévention et d’animation, tels que des jeux de société.

Audrey Girard rappelle cependant que l’association départementale n’est pas un centre de planification et d’éducation familiale (CPEF). « Nous n’avons pas d’équipe médicale. Aucun acte médical n’est donc pratiqué au Planning familial d’Indre-et-Loire. Quand il y a des besoins médicaux, nous réorientons les personnes. » Elle mentionne notamment le CPEF situé rue Jehan-Fouquet, à Tours. « Il en existe également dans les différents centres hospitaliers du département, à Loches, Amboise, Chinon, ou Château-Renault. Et il y a le gros centre d’orthogénie, à Bretonneau. C’est là qu’il faut se rendre pour les IVG par exemple. »

Plus de 10 000 personnes rencontrées chaque année

Chaque année, l’antenne tourangelle du Planning familial rencontre entre 12 000 et 14 000 personnes, dans tout le département. « Nous avons de plus en plus de demandes mais nos financements ne vont pas à la hausse et nous ne pouvons pas nous multiplier », déclare Marielle Thomine. Au fil des années, les motifs de ces demandes évoluent et les publics également. L’association travaille par exemple de plus en plus avec les séniors, qu’ils soient en institution ou non. « Il y a de gros besoins et un vrai manque. Mais c’est assez novateur, il y a peu de Plannings familiaux en France qui ont développé des actions auprès des séniors », certifie la coordinatrice. L’objectif est alors de mettre en place des actions concernant la vie affective et sexuelle à tous les âges mais aussi de lever des tabous, en évoquant, entre autres, la ménopause et l’andropause.

Les interventions des salariés et bénévoles du Planning familial 37 émergent toujours d’un besoin repéré sur le terrain ou d’une demande d’un partenaire, d’un financeur. Et il y a toujours de nouvelles actions à mener. En janvier 2022, l’association a par exemple lancé un projet de lutte contre la précarité menstruelle. Elle distribue désormais gratuitement des protections hygiéniques, jetables ou lavables, aux personnes précaires. « Nous avons aussi mis en place des ateliers d’échanges sur le corps, les protections, les règles… Nous abordons également la prévention et le dépistage des cancers, l’endométriose, tout le volet santé autour des règles et du corps », raconte Marielle Thomine.

Les demandes sont par ailleurs de plus en plus spécifiques et touchent des thématiques nouvelles ou tabous il y a encore quelques temps. La coordinatrice donne l’exemple des réseaux sociaux. « Avant, on ne nous demandait pas d’intervenir sur ce sujet. Aujourd’hui, c’est inévitable lorsque l’on veut parler de sexualité et de violence », déclare-t-elle. Ces demandes sont aussi liées à l’actualité et aux sujets traités dans les médias. « L’orientation sexuelle et l’identité de genre sont des thèmes dont nous avons toujours parlé mais on nous demande maintenant des interventions, des formations spécifiques, parce qu’il y a une levée des tabous dans la société sur ces sujets. Les professionnels ou les parents se sentent démunis et nous demandent d’intervenir sur ces thématiques précises. Nous, nous continuons finalement de traiter les choses de façon transversale mais en prenant un angle spécifique en fonction de l’évolution de la société ».

Lou Faligot, chargée de prévention, Audrey Girard, chargée de projet et psychologue, et Marielle Thomine, coordinatrice du Planning familial d’Indre-et-Loire, peuvent compter sur le soutien des bénévoles, dont Évelyne (à droite).

« Rien n’est gagné »

Ces nouvelles demandes bien ciblées font cependant parfois passer au second plan des thématiques historiques, sur lesquelles l’association tourangelle a toujours travaillé, comme l’accès à la contraception ou la lutte contre les infections sexuellement transmissibles (IST). « Il ne faut pas oublier que c’est un travail de longue haleine, que rien n’est gagné et que, même s’il y a des évolutions qui vont dans le bon sens, il y a encore beaucoup de choses à faire. Nous pouvons très vite être remis en cause et remettre en cause la loi et les droits individuels et collectifs », lâche Marielle Thomine, qui évoque les trois actes de vandalisme dont a été victime le Planning familial de Gironde au mois de février.

Elle souhaite rappeler que « le Planning familial n’est pas là pour influencer qui que ce soit mais pour permettre aux individus de faire leurs propres choix avec toutes les clés en main. Expliquer n’est pas influencer ». Et de continuer : « Chacun peut penser comme il veut tout en respectant les droits et la loi mais, par contre, laissons les autres prendre leurs décisions. Ce sont toujours ces choix et cette liberté qui sont attaqués au fond, que ce soit dans l’accès à l’IVG, dans les droits des personnes LGBT… »  Elle estime donc qu’il est nécessaire d’être vigilant, pour « s’assurer que les droits ne reculent pas ».

Un degré en plus

Le Planning familial 37 organise des ateliers sur le thème de l’égalité à l’occasion de la journée internationale des droits des femmes, mercredi 8 mars, de 9 h à 14 h, au centre de vie du Sanitas (10, place Neuve, à Tours). Certaines animations sont sur inscription.

Informations et rendez-vous au tél. 02.47.20.97.43. Site web : www.planning-familial.org/fr/le-planning-familial-dindre-et-loire-37

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