Peuple de Loire : Romain Gadais, la passion des poissons

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La Loire, fleuve royal, fleuve qui fascine et qui attire. Paysage radieux qui a inspiré nombre d’écrivains, poëtes ou peintres, paysage faisant la fierté de ceux qui ont la chance de la côtoyer au quotidien et de vivre à ses côtés. Certains ligériens font d’ailleurs un peu plus et vivent en symbiose avec le fleuve. Cette semaine nous vous proposons de retrouver quelques portraits de ce peuple de Loire. Premier article de la série consacré au pêcheur professionnel : Romain Gadais. 

montage peuple de loire

Nous sommes dans le petit village de Bréhémont, dans l’Ouest du département, situé sur la rive gauche de la Loire. C’est ici que Romain Gadais s’est lancé dans son activité de pêcheur professionnel en Loire il y a 4 ans. Un pari osé mais réussi pour ce jeune de 29 ans puisqu’il a réouvert, il y a quelques jours et pour la deuxième saison, son restaurant « La Cabane à Matelot ». 

La passion pour l’eau

« Quand j’étais gamin avec mes parents on habitait à la confluence de deux rivières. Avec mes frangins on allait souvent à la pêche… »

Passionné de pêche et titulaire d’une solide formation dans le domaine de l’environnement (Bac Sciences et technologie de l’aménagement et de l’environnement, BTS de gestion et maîtrise de l’eau, DUT en génie de l’environnement, Master en ingénierie des milieux aquatiques et des corridors fluviaux) Romain Gadais a quelque peu hésité avant de se lancer. Ce dernier a commencé à travailler dans la recherche (à l’INRA et au Muséum d’histoire naturelle) toujours sur les poissons. « Nous mettions des puces sur les saumons, les aloses et les lamproies afin de suivre leurs déplacements dans la Loire ». Il grimpait alors sur les bateaux des pêcheurs professionnels sur l’estuaire qui capturaient les poissons afin de poser les puces sur les espèces avant de les relâcher. Des missions qui lui ont permis d’en apprendre un peu plus sur le métier. A ce moment, il ne savait pas encore s’il passerait un jour le cap de devenir pêcheur professionnel puisque lorsqu’il en rencontrait un il lui était souvent présenté comme l’un des derniers. Le métier et les horaires étant très durs et les revenus faibles, l’activité était décrite comme très peu rentable. « Ce n’était pas très engageant, il a fallu que je trouve une alternative pour être sûr de pouvoir vivre de mon activité ».

Romain Gadais en partance pour la pêche sur sa plate de Loire

La pêche professionnelle

Depuis juillet 2014, ce fils de vigneron a sa propre entreprise : Les Pêcheries Ligériennes. Depuis, il navigue sur la Loire sur un lot de 34 km, de Rigny-Ussé à Fondettes. Cinq matins sur sept, il rejoint les bords du fleuve pour y relever les filets posés de la veille. Des filets qui ont la particularité d’être installés dans des zones calmes, toute une nuit, et  permettent ainsi la capture d’espèces qui se reposent tel que le Chevesne, l’aspe ou le hotu. Il existe aussi des filets dérivants qu’il étend dans le courant pendant quelques minutes afin de capturer les poissons migrateurs tel que l’alose, la lamproie et le silure.

Dans une zone calme, l’équipe récupère les filets posés de la veille
Le bac se remplit de poissons blancs

« La pêche en Loire est très variable. Je ne sais jamais avec quelle quantité je vais rentrer. Il a fallu que je trouve un moyen de lisser mes revenus. »

Une fois la pêche terminée, il revient sur la terre ferme et change de tablier pour celui de cuisinier. Après les avoir lavés, pesés et glacés, Romain transforme ses poissons pour pouvoir les conserver. Dans son atelier, lui et son équipe découpe, effile et fume les poissons. Il les vend ensuite dans sa boutique sous forme de rillettes, soupes et feuilletés. La chaine ne s’arrête pas ainsi puisqu’il a également ouvert l’année dernière son restaurant « La cabane à Matelot ».« Le gros de la pêche est en juin, juillet et août. Je ne me pose pas de question, tout ce que je prends part directement au restaurant, il n’y a aucune perte ». L’entrée et le plat du jour sont élaborés en fonction de la pêche des jours précédents et tous les produits sont locaux.

Une activité rythmée par la Loire

La pêche dépend inévitablement du climat et du débit de la Loire. Pour prévoir ses sorties, Romain se fie au site VigiCrue qui lui permet de savoir la côte de la Loire.

Ces dernières semaines, les pluies ont engendré une forte montée des eaux. Dans cette situation, poser des filets ne servirait qu’à repêcher les feuillages et branches qui sont dans le courant. Il doit attendre un jour ou deux que le débit diminue. Par ailleurs, la saison s’annonce plutôt bien puisque l’eau est là, ce qui n’est pas toujours le cas. « L’année dernière, le niveau était deux mètres plus bas, et l’eau beaucoup plus claire. Visuellement, c’était très beau, mais au niveau de la pêche nous n’avions que très peu de poissons ». Et pour cause, lorsqu’elle est basse, l’eau devient claire car elle est d’autant plus filtrée par la Corbicule. Ce coquillage, une palourde asiatique, se développe dans les eaux chaudes aux abords de la centrale nucléaire de Chinon, il filtre et clarifie les eaux. Un inconvénient pour les pêcheurs puisque lorsqu’il y a trop de transparence, les poissons voient les filets et les évitent. 

Le village de Bréhémont vu de la Loire relativement haute

« Avec la pêche en Loire, il ne faut rien promettre, il faut une souplesse énorme car c’est la Loire qui décide ».

Une pêche respectueuse de l’environnement 

Le pêcheur ne cible pas la vente en gros. Son créneau, c’est le respect de la nature et de ce qu’elle peut procurer. « Si je vide la Loire, je bousille mon outil de travail ». Pour autant, cela ne lui évite pas quelques discordes avec des amateurs de pêche. Certaines espèces sur la Loire sont prisés des pêcheurs quel qu’ils soient, tels que les silures et les sandres. L’arrivée d’un professionnel n’est pas acceptée par tous puisque tout comme d’autres de ces collègues installés en amont et aval de ses lots, il est victime d’actes de vandalisme. 

« Tous les filets que j’avais lorsque j’ai commencé m’ont été volés ». 

Néanmoins, l’activité de pêcheur professionnel est très encadrée. Les périodes de fermeture à la pêche et les réserves rythment le quotidien de Romain. Il doit également se conformer à un catalogue de techniques bien précis établi par la Direction Départementale des Territoires. 

Au total, il pêche entre 3 et 6 kilos de poissons par hectare et par an, un chiffre qui est difficilement qualifiable d’intensif selon lui, au vu du rendement de la Loire.

La déclaration de capture du jour au retour de la pêche

Romain Gadais a réussi ce projet ambitieux de vivre de sa passion. Ils sont une trentaine sur la Loire à vivre de cette activité. Il contribue chaque jour à faire (re)découvrir les poissons de Loire à chacun de ses clients. Touristes, locaux, restaurateurs, nombreux sont ceux qui n’hésitent pas à pousser la porte de son restaurant et qui en ressortent conquis.  

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