Le milieu de la gastronomie tourangelle regorge de jeunes talents en pleine expansion : Paul Meunier en boulangerie, Nicolas Léger en pâtisserie, Marie Collet en street food, Maximilien Bridier en grande cuisine ou encore Jean Poirier pour le côté brasserie. Encore loin de le trentaine, le chef d’entreprise a racheté deux adresses phares de la ville de Tours en quelques mois.
On aime, ou on aime pas, mais Le Chien Fou attire du public. Situé Rue de la Grosse Tour, au cœur du Vieux-Tours, le restaurant a remplacé le mythique Zafferano juste après la période Covid. On a entendu deux types d’avis à son égard : dithyrambiques ou remplis de déception. Pas de demi-mesure. C’est l’un, ou l’autre. Et à Tours rares sont les établissements aussi clivants. Quoi qu’il en soit, l’affaire fonctionne au point que son propriétaire vient de se lancer dans une deuxième aventure, tout aussi périlleuse en termes de symbole : reprendre Le Chien Jaune Rue Bernard Palissy, face au Vinci.
L’homme en question s’appelle Jean Poirier et il a à peine 25 ans. Le Chien Fou, ça vient d’un surnom qu’on lui donnait plus jeune. Le Chien Jaune c’est donc un hasard puisque l’établissement s’appelait déjà comme ça. Petit-fils d’une femme qui dirigeait plusieurs hôtels sur la place de Tours, et petit-fils d’un hôtelier-restaurateur possédant aussi une boucherie à St-Martin-le-Beau, le jeune homme a commencé sa carrière dans la restauration dès l’adolescence. Il a quitté Tours pour faire ses armes bien plus loin, jusqu’au Vietnam, et dans quelques grandes maisons.
Il revient donc avec les crocs. Et de la fougue. En reprenant Le Chien Jaune, il s’attaque à une petite institution. Tout près de la gare, c’est le bistrot par excellence. Un peu à la parisienne, on pourrait dire. Décoration léchée, petites tables, terrasse bruyante mais conviviale, on y vient autant pour l’ambiance que pour la cuisine. Mais depuis quelques années, les assiettes n’avaient plus la même énergie qu’avant. « C’était une adresse un peu boudée alors que tout le monde connait » analyse Jean Poirier. D’autant plus dans un quartier assez pauvre pour bien manger.
Après 3 semaines de travaux pour refaire murs et boiseries, Le Chien Jaune a donc rouvert au printemps 2023. L’établissement compte une quinzaine de salariés en comptant le petit hôtel Chez Jacqueline situé juste au-dessus (en hommage au prénom de la grand-mère du patron). Jean Poirier est souvent sur place pour coordonner le service. A la carte : plus esprit bistrot, tu meurs. C’est entrecôte, salade œuf et lardons, belle pièce de porc, tarte tatin… Tout n’est pas savoureux mais si l’on vient chercher la détente, l’assiette copieuse à des prix raisonnables on en aura pour son argent (formule midi entre 19 et 24€) avec tout de même quelques originalités comme une chantilly ciboulette servie avec la côtelette d’agneau.
Le propriétaire nous dit mettre un point d’honneur à s’approvisionner localement. Et avec Le Chien Fou qui s’est fait une spécialité de servir de grosses pièces de viande, les quantités sont vite importantes (en cas de gros services dans les deux restaurants on dépasse facile les 150 couverts). « Ici on fait notre propre cuvée de St-Nicolas-de-Bourgueil et les chutes de pain servent pour faire de la bière » souligne également Jean Poirier qui travaille avec la boulangerie Les Trois Grains, Rue de la Victoire, « des jeunes qui ont la même vision que nous ». Leur pain est bon.
Au final, l’homme indique vouloir mettre « un coup de jeune » dans la gastronomie tourangelle en axant sur l’esprit de copains, donc potentiellement des bonnes tablées plutôt que la petite table gastronomique qu’on va se faire à deux. Si ses plans ont été un peu contrariés par une fermeture administrative du Chien Fou en mai (pour des problèmes de papier d’un salarié, réglés assez rapidement) l’entrepreneur s’est fait connaître sur la Foire de Tours et pourrait bien ne pas s’arrêter là. Il nous l’a dit : il a encore d’autres projets dans sa niche.
