Alors que les élus du conseil municipal doivent élire ce mercredi 18 septembre, le nouveau maire de Saint-Pierre-des-Corps, suite à la démission surprise d’Emmanuel François. Une lettre ouverte envoyée mardi 17 septembre par l’ancienne directrice de cabinet, Stéfanie Piot, accuse directement plusieurs élus de la majorité, dont le futur maire pressenti Olivier Conte, de faits de harcèlement moral.
C’est une lettre ouverte qui ne mâche pas ses mots. Au long de quatre pages, l’ancienne directrice de cabinet d’Emmanuel François, en poste pendant deux ans entre 2022 et 2024, dénonce ainsi plusieurs agissements à son encontre relevant de faits d’harcèlement moral.
Une affaire de harcèlement moral au cœur de la mairie de St-Pierre-des-Corps
Stéfanie Piot cite même directement plusieurs personnes dont Olivier Conte et Héloïse Drapeau, tous deux adjoints d’Emmanuel François jusqu’à cet été, et pressentis pour devenir ce mercredi 18 septembre, respectivement maire et 1ere adjointe de Saint-Pierre-des-Corps.
« Il est de mon devoir, et il en va de mon honneur, de vous révéler l’indignité et l’amoralité des deux premiers adjoints du maire de Saint-Pierre-des-Corps, Monsieur CONTE et Madame DRAPEAU, également conseillère départementale d’Indre-et-Loire, qui ironie du sort, sont en passe de devenir maire et première adjointe au prochain conseil municipal du 18 septembre.
Je vais vous délivrer le récit d’une machination oppressante et destructrice de la part de ces élus, en connivence pernicieuse avec le Directeur Général des Services, Monsieur GERARD, et le troisième adjoint du maire, Monsieur CHAPEAU » peut-on lire notamment.
Le timing n’est évidemment pas anodin, Madame Piot indiquant : « Cette machination doit être dénoncée d’autant plus que les adjoints, qui ont mis à mal ma santé et ma dignité, sont en passe de devenir maire et premier adjoint lors du conseil municipal de ce mercredi 18 septembre. »
L’ancien maire Emmanuel François également ciblé
Parmi les accusations formulées, l’ancienne collaboratrice évoque avoir été mise au ban par des adjoints, l’empêchant ainsi de pouvoir exercer ainsi son travail, mais aussi une protection fonctionnelle qui lui a été refusée. A ce titre, le désormais ancien maire Emmanuel François n’est pas exclu des reproches faits par son ancienne directrice : « Le harcèlement moral est un acte grave qui doit faire l’objet d’une prise de conscience généralisée sur ses répercussions dramatiques, tout comme le silence permissif de Monsieur FRANCOIS, une faute inexcusable en tant que maire, et qui doit prendre sa pleine place dans l’ordonnancement juridique. »
Placée en arrêt maladie avant l’été, l’accusatrice explique avoir dû faire preuve « de ténacité et d’agilité pour tenir » le plus longtemps possible. Elle cite par exemple des propos d’Eloïse Drapeau qui aurait refusé l’idée d’une sortie à la fête foraine en sa présence « sauf si c’est pour la mettre dans les cases du tir à la carabine ».
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Le cas de l’ancienne directrice de cabinet avait été brièvement évoqué en juillet dernier, lors de l’annonce surprise de la démission d’Emmanuel François. Ce dernier avait notamment justifié sa décision de la sorte : « Depuis le mois de février, la directrice de cabinet est partie. J’ai travaillé en étroite collaboration avec elle. Depuis son départ, j’ai une moindre motivation. Saint-Pierre-des-Corps mérite un maire pleinement motivé, je vous annonce qu’à partir du mois de septembre je ne serai plus maire de Saint-Pierre-des-Corps. Le travail accompli depuis 2020, on n’a pas à en rougir. »
Lors de ce même conseil municipal, une délibération initialement prévue à l’ordre du jour fut finalement annulée. Dans celle-ci il était question d’un arrangement pour une rupture conventionnelle avec compensation financière de 85 000 euros. Les élus d’opposition avançaient alors un départ forcé, sous forme de licenciement, avec in fine une ambiance tendue avec plusieurs adjoints avec des plaintes possibles envers ces derniers.
Stéfanie Piot indique ainsi aujourd’hui déposer des recours aussi bien au tribunal administratif que devant la justice pénale : « Ma défense sera assurée par Maitre Bendjador avocat au barreau de Tours, spécialisé en droit pénal et Maitre Pielberg, avocat au barreau de Poitiers, en droit public ».
Du côté de l’opposition, les élus qui ont reçu également la lettre ouverte, se montrent à chaud stupéfaits. Pour Cyrille Jeanneau (groupe J’aime Saint-Pierre) : « On avait eu vent de plusieurs rumeurs sur ce harcèlement moral, aujourd’hui on comprend mieux la démission du maire, mais on ne comprend pas pourquoi ils (ndlr : la majorité municipale) s’entêtent dans ce mandat, cela ne peut pas aller dans le bon sens pour la population, il faut que cela cesse. »
Et quant à l’élection ce mercredi du nouveau maire, Cyrille Jeanneau de dire : « Comment peut-on voter pour des personnes sous le coup de procès pour harcèlement moral alors qu’ils avaient mis en avant le bien être du personnel lors de précédentes séances ? » Des propos que Michel Soulas (A Gauche Toute) porte également en nous indiquant : « Je ne vois pas comment on va pouvoir tenir un conseil municipal digne de ce nom, même si il faut être vigilant à la question de présomption d’innocence. »
Du côté du groupe (Vivre Ensemble Solidaires en Métropole Tourangelle), Nabil Benzaït et Fatiha Kendri expriment leur “soutien a la démarche juridique et courageuse entreprise par Mme Piot exprimeront un refus de vote d’un exécutif où l’un des membres est poursuivi”.
Du côté de la majorité municipale, difficile d’avoir des réactions à chaud. Mickael Chapeau, cité dans le document, nous indiquait néanmoins ce mardi après-midi : « il ne s’agissait que de relations de travail. »
EDIT DU 18 SEPTEMBRE : dans la soirée la mairie a communiqué évoquant des accusations “infondées”, se disant “choquée” et indiquant ne pas avoir été mis au courant d’une quelconque plainte. Elle se dit néanmoins prête à y répondre le cas échéant, précisant par ailleurs que les négociations des conditions de départ de Stéfanie Piot ont repris depuis le 13 septembre par l’intermédiaire de son avocat. Il est aussi précisé qu’aucune contestation du licenciement n’a été faite à ce jour devant le tribunal administratif.
Un degré en plus : 4 années de mandat tumultueuses
Cet épisode est un de plus dans la vie tumultueuse du conseil municipal de Saint-Pierre-des-Corps depuis 2020. Depuis l’élection à la tête de la ville de la liste conduite par Emmanuel François, la vie politique corpopétrussienne n’en finit plus de faire parler d’elle avec non seulement une opposition virulente mais aussi des dissensions en interne au sein de sa majorité. On retiendra notamment le départ de deux premiers adjoints en 2021 et 2022, de deux élus de la majorité passés dans l’opposition ou encore un turn-over important dans les services (3 directeurs généraux des services depuis 2020 autant de directeurs de cabinet…). Au sein de la majorité, les dissensions se feront même plusieurs fois publiques. Face à sa candidature aux Législatives de juin dernier, Emmanuel François avait du même faire face à la candidature de son adjoint à l’Education, Amin Brimou.
Sur un plan moins politicien, on se rappelle également que plusieurs élus avaient porté plainte pour des tentatives d’incendie de leur domicile. L’ancien maire, médecin dans le civil, avait subi lui-même l’incendie de son cabinet médical mais aussi de sa voiture lors des émeutes de l’été 2023.
Plus tôt dans le mandat, un collectif des habitants en soutien au patronage laïc s’étaient introduits dans la mairie pour rencontrer le maire. Autant d’exemples d’une vie politique loin d’être apaisée au sein de la commune corpopétrussienne…