Ce n’est pas une surprise mais c’était une décision très attendue. Ce vendredi 13 mai, le préfet d’Indre-et-Loire Thomas Campeaux a déclaré d’utilité publique le projet de 2e ligne de tram de l’agglomération tourangelle ainsi que l’extension du centre de maintenances des rames à Tours-Nord, et la création d’une ligne de bus à haut niveau de service entre la Place de la Liberté et le centre commercial des Atlantes.
Le coût total du chantier devrait avoisiner les 500 millions d’€, soit environ ce qui a été dépensé pour créer la première ligne inaugurée en 2013. La mise en service est annoncée à l’horizon 2028-2029 soit 11 ans après le lancement de la réflexion sur l’opportunité de relier La Riche à Chambray par un tram, en passant à proximité des deux grands hôpitaux de l’agglomération (Clocheville et Bretonneau).
Cette décision de la préfecture rend possible le lancement des travaux qui devraient débuter dès la mi-juillet avec le dévoiement des réseaux souterrains. Suivront les premières opérations de création des plateformes en 2026 et ce n’est qu’en 2028 que le nouveau visage de la ville sera dévoilé. Ce calendrier sera détaillé devant la population lors de réunions publiques dont la première dès ce jeudi 19 juin à 19h à l’Espace Jacques Villeret dans le quartier des Fontaines (puis le 24 juin18h30 salle Yves Renault à Chambray, le 2 juillet 18h30 salle Ronsard à La Riche et le lendemain à l’Espace Clos Neuf de Joué).
Malgré les critiques virulentes sur le coût, le tracé ou l’intérêt même d’un deuxième tram depuis des années, tout porte à croire que la ligne B est définitivement lancée. Une victoire très nette pour l’alliance politique entre le président (de droite) de Tours Métropole Frédéric Augis et le maire (écologiste) de Tours Emmanuel Denis, qui ont su s’entendre et avancer ensemble malgré leurs divergences. « C’est une étape décisive pour faire avancer la révolution des mobilités sur notre territoire » déclare le président de Tours Métropole Frédéric Augis rappelant que 70 000 personnes seront directement desservies, ainsi que 30 000 étudiants et 70 000 emplois.
L’élu est rejoint par Emmanuel Denis, également président du Syndicat des Mobilités de Touraine qui est le commanditaire :
« La deuxième ligne de tramway va être profondément transformatrice pour les 10 prochaines années : moins de pollution, moins de dépendance à la voiture, plus de solutions pour se déplacer autrement. Dans un contexte où le carburant pèse sur le pouvoir d’achat, où les inégalités de mobilité s’aggravent, il est du devoir des pouvoirs publics de proposer des alternatives crédibles à la voiture individuelle. »
« La déclaration d’utilité publique du tramway de Tours est aussi un revers pour les partisans du statu quo, de la dépendance au tout-voiture, et de l’inaction climatique » écrit la section tourangelle du parti Les Ecologistes dont Emmanuel Denis est issu.
Le socialiste Jean-Patrick Gille, ancien député, ne dit pas autre chose. Elu au conseil municipal de Tours, il déplore « les manœuvres de dernière minute » pour faire échouer le projet (dont un rendez-vous du député Henri Alfandari avec le ministre des transports afin de lui faire entendre ses arguments anti-tram et une lettre de l’opposant Christophe Bouchet au 1er ministre pour alerter sur les grandes sommes nécessaires à l’opération). Selon lui, le tram B sera « essentiel » permettant à l’agglomération d’avancer sur la question des transports ce qui a « trop tardé ».
« Nous avons perdu 5 ans » estime également le candidat aux municipales de Tours Alain Dayan qui se réjouit de l’aboutissement de la démarche administrative mais déplore les tergiversations des dernières années.
Ancien maire de La Riche, et président de Tours Métropole au moment du lancement du projet (avant sa condamnation à une peine d’inéligibilité dans une affaire de violences), Wilfried Schwartz se dit « heureux » de l’aboutissement du tram B regrettant néanmoins son tracé (il préférait un passage par le Boulevard Béranger mais l’option a été oubliée pour privilégier les vieux arbres) et « l’absence de projet urbain ambitieux autour du tram à La Riche » estimant que « aucun aménagement significatif n’a été annoncé ».
Du côté des opposants, le collectif d’habitants du Boulevard Jean Royer qualifie la décision du préfet de « honte » et de « scandale ». Depuis de longues années, il déplore le choix du tracé estimant que le boulevard n’est pas assez large pour supporter un tram plus la circulation automobile, dénonçant le tronçonnage d’arbres et des risques d’inondations. Les riverains craignent aussi de supporter le bruit des rames et une perte de valeur de leurs biens.
Concernant les principaux adversaires politiques au conseil municipal de Tours, le centriste Benoist Pierre rappelle son soutien au projet sur le fond mais regrette ses « incohérences » : « Nous réaffirmons la faiblesse du tracé, imposé à nos concitoyens sans réelle consultation. Ce projet est un non-sens économique, financier et même écologique. » « Nous répondrons présents pour améliorer ce projet » ajoute l’élu d’opposition qui sous-entend qu’une prochaine majorité non-écologiste à la mairie de Tours et à la Métropole pourrait faire bouger des lignes.
Le centriste Christophe Bouchet, maire de Tours au moment des premières esquisses, poursuit également la bataille, estimant que la situation actuelle est « incompréhensible » : « Le tracé de cette ligne est stupide et déficitaire de 200 millions d’euros nécessitant un nouvel impôt metropolitain et l’abattage d’arbres qui ne seront jamais remplacés. » « La justice aura sans doute à trancher ce point » conclut-il, laissant supposer qu’il y aura des recours pour tenter de faire annuler cette décision. Cependant, ils ne devraient pas empêcher les premiers coups de pelle. Ni entamer le déterminisme des soutiens du chantier.