Ces derniers jours, l’ambiance était quelque peu tendue au sein de nos radios associatives d’Indre-et-Loire. Après avoir annoncé une réduction de 30% du Fonds de Soutien à l’Expression Radiophonique (FSER), dans le cadre du projet de loi de finances 2025, le gouvernement est finalement revenu sur sa décision ce mardi 29 octobre. Si cette annonce semble être une bonne nouvelle, les structures comme Radio Béton ou Radio Campus Tours restent tout de même sceptiques quant à l’avenir de ces médias de proximité.
En à peine un mois, les plus de sept cents radios associatives françaises ont vécu un véritable ascenseur émotionnel. Depuis quelques semaines, ces dernières sont entrées en période de lutte pour plaider leur cause face à la menace que représentait le nouveau projet de loi de finances 2025 porté par Michel Barnier.
Le jeudi 10 octobre dernier, le ministère de la culture annonçait le projet de réduire de 30% le budget accordé au Fonds de Soutien à l’Expression Radiophonique (FSER), représentant une économie de de 10 millions d’euros pour l’Etat.
Cette annonce s’est révélée comme un coup de massue pour les radios associatives. Et pour cause : le FSER, sorte de subvention fournie par le ministère de Rachida Dati, représente pour chacune entre 40 et 50% de leur budget annuel. Une réduction jugée drastique mettant considérablement en péril la vie de beaucoup de radios qui se servent notamment de ces sommes pour payer leurs salariés.
Révoltées, de nombreuses radios associatives ont sollicité des élus locaux pour tenter de faire bouger les choses. “On a écrit des lettres aux députés de toute l’Indre-et-Loire et aussi aux sénateurs, explique Thomas Cherrier, président de Radio Béton, et on a eu globalement de bons retours.”
Toutes ces revendications semblent avoir porté leurs fruits. Le ministre du Budget, Laurent Saint-Martin, a finalement annoncé mardi 29 octobre l’adoption dans le projet de loi de finances 2025 d’un amendement rétablissant l’enveloppe initiale consacrée au FSER.
Le résultat d’un lobbying efficace des radios. Dès le 16 octobre, le sénateur Les républicains d’Indre-et-Loire Jean-Gérard Paumier s’était ému de leur situation. Et ce mercredi, son collègue socialiste Pierre-Alain Roiron a annoncé leur apporter “son soutien et son engagement” via une question écrite à l’attention du ministère de la culture. Dans ce texte, le sénateur interroge les perspectives si le projet de loi initial avait abouti, notamment en demandant “une alternative qui préserverait le financement du FSER.”
Vers un retour au calme ?
Malgré ces signaux positifs, le temps du soulagement est loin d’être arrivé pour les radios associatives. Si cette annulation a bel et bien été annoncée, cela ne veut pas dire qu’elle est désormais actée. En effet, en cas de prolongement des débats au-delà du délai imparti, le projet de loi de finances partirait au Sénat dans sa version initiale, sans l’amendement promis par le gouvernement. Une possibilité que garde bien en tête Thomas Cherrier : “Je ne crois que ce que je vois. Tant que rien n’aura été voté, on reste vigilant.”
D’ailleurs, aujourd’hui, la crainte va au-delà de la question de la baisse du FSER. Après cet épisode orageux qu’ont traversé les radios associatives, ces dernières constatent qu’une épée de damoclès se maintient au-dessus de leur tête. C’est notamment ce que pense Mélissa Wyckhuyse, journaliste salariée pour Radio Campus Tours : “Ne croyons pas que c’est gagné, que ça s’arrête là. Nos postes salariés sont financés en partie par la région et le FONJEP (Fonds de coopération de la Jeunesse et de l’Education Populaire). Si les économies ne se font pas sur le FSER, elles pourraient se faire ailleurs.”
Une problématique beaucoup plus large
Pour une grande partie des radios associatives, il est indéniable qu’il existe une méconnaissance à leur sujet, que ce soit pour le grand public ou pour le gouvernement. Beaucoup pointent du doigt une minimisation des bienfaits que peuvent apporter leurs médias à l’échelle locale.
Une idée qui révolte Frédéric Quintero, président de Radio Campus Tours : “Tous les bénévoles qui viennent chez nous gagnent en compétences, tous quels qu’ils soient. En compétences orales, en confiance en soi, en compétences techniques… Et mine de rien, on sert en quelque sorte de vitrine de la ville quand on partage nos contenus à d’autres radios de notre réseau Radio Campus France.”
Cette méconnaissance envers les radios associatives va de pair avec l’idée que la radio en général (et surtout la bande FM) est menacée et amenée à disparaître. Alors comment vont-elles faire pour faire face à ces menaces ? Quelles sont les solutions pour trouver les financements initialement fournis par le FSER ?
De prime abord, la réponse la plus facile à cette question reposerait sur la création d’une sorte de “régie commerciale” pour générer de la publicité pour les radios. Une possibilité légalement réalisable étant donné que les radios associatives ont droit à un maximum de 20% de leur chiffre d’affaires provenant de publicités. Si cette idée paraît alléchante, il est totalement hors de question d’emprunter cette voie pour Radio Béton et Radio Campus. Pour tous, l’identité des radios associatives est de rester indépendante.
Alors quelles sont les autres sources de revenus possibles ? Les radios associatives devront-elles chercher à augmenter le nombre de prestations à faire à l’extérieur de leur studio (plateau radio, création d’évènements, …) ? Ont-elles déjà réfléchi à peut-être changer de moyen de diffusion si la bande FM venait à disparaître ?
C’est en tout cas un élément à prendre en compte pour Thomas Cherrier. Pour lui la première mission de Radio Béton est de défendre une vision claire de la vie locale et culturelle sur le secteur de Tours, indépendamment du choix de moyen de diffusion.
Ainsi, pour Radio Béton, les derniers événements de ce mois d’octobre renforcent davantage ses prévisions concernant son avenir : “Je pense que s’il y a toujours Béton sur Tours dans trente ans, ça ne sera certainement pas grâce à la radio.”
Crédit Photo : Jean Luc Raharimanana