Le temps d’un 16 mesures #8 : Don Choa et DJ Djel : ambiance scandale, danse de vandales !

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Durant la 27ème édition du festival les Rockomotives organisé par l’association figures libres à Vendôme, 37 degrés en a profité pour échanger avec le rappeur toulousain Don Choa et le marseillais DJ Djel, tous deux membres du mythique groupe Fonky Family. Instigateurs d’ « ambiances de scandales, danse de vandales » depuis le milieu des années 90, c’est à l’occasion de la sortie de l’EP éponyme « Don choa » et d’une tournée qui l’accompagne que nous avons sollicité le binôme qui n’est plus à présenter pour les amateurs de hiphop.

Authenticité, lucidité, engagement, rencontre sans concessions avec « le petit gars sans gêne » et « le tailleur de diamants ».

donchoa

On est actuellement au sein de la chapelle saint Jacques. C’est la première fois que vous jouez dans un bâtiment religieux désacralisé ou pas ?

Don Choa : Effectivement, c’est une première pour moi.

DJ Djel : Pour moi, c’est une seconde en fait. J’ai joué avec 3ème œil à Metz au Trinitaire.

Au cours de l’année 2017 et plus particulièrement depuis la sortie de ton EP en avril 2017, les concerts s’enchainent pour toi et ça se passe plutôt bien ? C’était une appréhension ?

Don Choa : Honnêtement non. Même avant la sortie du EP, on a toujours fait des showscases avec Djel. Donc on avait un peu l’habitude. Ce qui fait plaisir c’est d’avoir un peu de nouveau matériel à présenter. Parfois, nous jouons devant des publics qui sont totalement acquis et d’autres fois pas du tout, ils ne nous connaissent pas et c’est très bien aussi.

DJ Djel : Comme Choa le dit, tu apprends du public. Quand ils ne connaissent pas, ça te donne envie de donner encore plus, de les sensibiliser, de les amener à comprendre ta musique. C’est comme un challenge quelque part.

Ce qui est le cas dans la riche programmation de ce soir au sein du festival Rockomotives.

Dj Djel : Justement, c’est cela qui est cool aussi. On aime être dans cette forme de programmation, au milieu de musiciens comme nous pouvons l’être.

« Tu as encore cette politique de relégation à travers les SMAC qui vont programmer qu’un certain type de rap ». Don Choa

Il y a un retour en force du hiphop à travers le fait que c’est la musique la plus « streamée » et que l’on voit de plus en plus d’artistes hiphop en tête d’affiche de festivals. Comment expliquez-vous cela ?

Don Choa : Je n’ai pas d’explications. Je pense que les jeunes aujourd’hui écoutent plein de musiques dont du rap. C’est très répandu maintenant et c’est bien aussi que cela soit plus accepté, qu’il n’y ait plus l’étiquette voyou.

DJ Djel : C’est exactement ça. C’est la musique la plus streamée mais c’était déjà aussi la musique la plus vendue il y a quelques années.

Don Choa : Tu as encore cette politique de relégation à travers les SMAC (Scènes de Musiques Actuelles subventionnés en partie par l’Etat et les collectivités) qui vont programmer qu’un certain type de rap. Et tu l’auras toujours, chacun à sa politique. Après, je ne me plaindrais pas. Qu’on soit en ouverture de festival, en fermeture… On vient !

DJ Djel : Je pense qu’on n’a plus à se poser cette question là aujourd’hui. Il y a tellement de sortes de hiphop que l’on se sert où l’on veut.

Don Choa
Don Choa

Aujourd’hui, tu es de retour sur le « devant de la scène » en sortant en avril dernier ton EP éponyme. On en déduit que tu n’as jamais vraiment arrêté d’écrire ?

Don Choa : Je ne comprends pas trop ce que tu veux dire par « devant de la scène ». Aujourd’hui, il n’y a plus besoin de passer au journal de 20h pour diffuser sa musique. J’ai gardé cette habitude d’écrire et j’ai sorti cet Ep…

DJ Djel : Après il y a des choses qu’il ne faut pas oublier. La vie d’un artiste elle ne se résume pas à suivre un mouvement de masse, pour ne pas dire un mouvement commercial. Il y a vingt ou trente ans, on sortait un album tout les cinq ou dix ans. Il y a dix ans, c’était tout les trois ans. Et depuis dix ans, c’est quasiment toutes les années. C’est un truc qui vient du rap : la surproduction. Ce qui peut être bien car cela a ramené des idées, de la nouveauté. Mais certains artistes ne fonctionnent pas comme cela. Dans la musique populaire, on peut penser à Francis Cabrel qui sort un album tous les 10 ans et cela reste Francis Cabrel. Je vois mal aujourd’hui un artiste comme Don Choa, AKH (Akhenaton de IAM), Kery James ou Médine sortir un album tous les ans.

Je suis d’accord, ce n’est pas leurs codes.

DJ Djel : Exactement. C’est mon avis, mais je préfère attendre qu’un album soit fait, fini, qu’il me propose quelque chose de mieux possible pour ne pas que je l’oublie. Les périodes où l’artiste ne propose rien, ce sont des périodes où il se pose des questions en tant qu’artiste.

Suite à cet EP, un album est-il pensé, envisagé ?

Don Choa : Il y a dix ans, il y avait un nouveau modèle qui tardait à être mis en place car freiné par les majors. Maintenant, il y a un nouvel équilibre. Le format de l’album n’est plus aussi figé que ça a pu l’être. Actuellement, la musique se consomme un peu différemment, titre par titre. Je ne suis pas en train de dire que je ne ferais plus d’album. Ça paraitrait logique mais je ne vais pas te parler de quelque chose qui n’est pas présent. Ça me permet d’esquiver ta question car j’estime y avoir assez répondu [sourire].

Malgré la richesse de ce qui est proposé actuellement dans le rap, et le mode de consommation de la musique qui a évolué, ce n’est pas une appréhension pour toi de sortir de nouveaux projets ?

Don Choa : Bien sûr que non, sinon je ne le ferais pas. Tu le fais par envie sinon tu ne le fais pas. C’est comme ça que tu commences et c’est comme ça que tu continues. Et aujourd’hui, pour sortir des sons, tu n’as plus besoin de passer par différents intermédiaires. Youtube et les réseaux sociaux sont des outils qui facilitent les choses. Donc pas d’appréhension pour moi, c’est une nouvelle manière de faire qui me convient totalement.

« Le rap n’est pas assez médiatisé. C’est une musique qui demande à être encore plus popularisée ». Dj Djel

Je reste sur mon idée que le hiphop est de plus en plus écouté et médiatisé. Est-ce que selon toi DJ DJEL, sera a servi a valorisé la place du DJ ou il y a encore du travail à faire ?

DJ Djel : Alors premièrement, le rap n’est pas assez médiatisé. Il est peut être médiatisé dans ton monde et dans le notre mais pas à la télévision. C’est une musique qui demande à être encore plus popularisée plutôt que médiatisée. Ensuite pour la deuxième, l’image du DJ a énormément évolué. C’est-à-dire qu’aujourd’hui, devenir DJ c’est devenir quelqu’un. Sauf que le problème avec les DJs en général, c’est que l’on en a fait un fourre-tout. Un métier « lovestoriesque ». C’est-à-dire que c’est bien de faire ce métier pour le statut social. Je ne te parle pas des femmes, de la fête ou de tout cela. Sauf que pour avoir ce statut social, il faut travailler. Au-delà de la production, du mix, du scratch ou de l’électronique… il y a un travail de marketing, de l’image, de création… et c’est pas évident.

Les personnes qui ont réussi, ils ont travaillé pour arriver à ce résultat. Mais il y en a beaucoup peut-être qu’ils se tournent les pouces une fois qu’ils y sont arrivés car c’est ça le but : une fois que tu es en haut, est-ce que tu glisses de l’autre côté de la montagne ou est-ce que tu restes sur la pointe par le travail ? Pour le DJ Hiphop, c’est différent. Il a amené beaucoup de techniques mais le pauvre, il est resté dans la cave. C’est différent du DJ house qui a tout le temps les mains en l’air mais est beaucoup plus populaire [sourires]. Peut être parce que le DJ hiphop est toujours derrière un MC mais moi ça ne me dérange pas. J’aime ce rôle là. Mais quand tu regardes bien, tous les éléments du hiphop sont devenus indépendants que ça soit le graffeur, le MC, le danseur, le beatboxer… Le seul regret c’est que le DJ ne soit pas encore assez reconnu dans son rôle.

Dj Djel
Dj Djel

Don Choa : Je dirais même plus, le DJ est la base du hiphop. Ce sont eux qui diffusent la culture. Il faut donc bien les mettre en avant. Il faut des DJs sur les antennes, sur les radios. Les playlists ne remplaceront jamais les DJs car ils te font vivre le truc à leur façon, à leur manière.

Tu as un nouveau clip « Kill Dem All », qui sort le 31 octobre. Tu peux nous en parler un peu plus ?

Don Choa : Il y a un teaser qui est fait pour ça et qui en ligne sur mon Facebook ! [NDLR : il est depuis sorti et disponible sur sa page]

Pour terminer, quel est l’artiste qui vous a interpellé, intéressé ces derniers temps et qui vous donnent toujours foi dans le hiphop ?

DJ Djel : Je dirais Davodka.

Don Choa : Je valide aussi !

DJ Djel : La première fois que j’ai passé un de ces morceaux, c’était après les attentats de Nice. J’avais fait une mixtape pour la paix (disponible ici) et j’avais mis « le couteau dans la paix » alors que je ne le connaissais pas. Je l’ai rencontré il n’y a pas longtemps et nous avons travaillé ensemble. C’est quelqu’un de très humain et son rap lui ressemble beaucoup. Son album sort en novembre et les sons déjà sortis sur Youtube sont vraiment bien.

Merci les gars !

Don Choa : Merci à toi et merci à toutes les petites stations. Jouez du rap et faites jouer des DJs ! Laissez la musique vivre et…

DJ Djel : Et faites pas les cons surtout ! [rires]

Un degré en plus :

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