La ville de Tours devient-elle une place forte du street art ?

Facebook
Twitter
Email

La Clinique du Street Art, l’Hôtel Colors, bientôt le festival Murs de Loire… Les événements autour de l’art urbain se multiplient dans la ville de Tours. Pour le plus grand bonheur de la mairie et d’un public averti toujours plus nombreux.

Avec 50 000 entrées, la Clinique du Street Art avait marqué les esprits. Pendant un peu plus d’un an, l’ancienne clinique St Gatien de Tours a accueilli un parcours street art avec des œuvres réalisées au cœur des anciens locaux médicaux. Une exposition éphémère qu’on visitait à la lampe torche et qui a réalisé une fréquentation comparable à celle du Musée des Beaux-Arts de Tours, et bien plus élevée que d’autres sites culturels de la ville.

Depuis début 2025, la transformation d’un ancien hôtel de la Rue Victor Laloux en temple du graff et des installations colorées confirme la tendance : l’exposition a été prolongée pour l’été avec l’ajout de nouvelles créations, et se poursuivra donc jusqu’au début des travaux pour réhabiliter l’immeuble en logements. Les séances affichent régulièrement complet et les scolaires en raffolent. Un ingénieux pass illimité a été mis en place pour revenir autant de fois qu’on veut.

Ces deux exemples montrent qu’il y a un intérêt manifeste pour le street art à Tours. La discipline est ludique car les visuels parlent aux enfants : à l’Hôtel Colors, on peut même manipuler plusieurs œuvres. C’est également dans l’air du temps car très instagrammable. Et ce n’est pas prêt de s’arrêter.

A partir du 7 juillet, Tours accueillera la première édition du festival Murs de Loire. Pendant une semaine, des artistes seront invités à créer des fresques grand format de 60 à 300m² dans des lieux publics aujourd’hui tristounets, de la passerelle de la fac des Tanneurs au pont de l’A10 situé à la limite entre Tours et St-Pierre-des-Corps. Un exemple est déjà visible sur l’Île Aucard, où un bâtiment dédié au stockage et aux réunions a été redécoré par Béatrice Myself sur le thème de la Loire et du respect de l’environnement (sans oublier de dessiner un vélo grand format, qui doit ravir les élus écologistes de la majorité municipale).

« On est en train de rattraper notre retard sur le street art » explique l’adjoint au maire Christophe Dupin, chargé de la culture, pour justifier cette effusion d’événements à laquelle il faut rajouter l’exposition Obey actuellement visible au Château de Tours, formidable recueil d’affiches et visuels de cet artiste qui est notamment connu pour avoir réalisé un visuel marquant de la campagne présidentielle de Barack Obama aux Etats-Unis ou une œuvre hommage aux victimes des attentats du 13 novembre 2015 à Paris.

A côté de ça, le street art ne cesse d’augmenter sa présence dans l’espace public tourangeau. Il y a eu les fresques commandées pour redonner un peu de fraîcheur à l’Ilot Vinci près de la gare, par exemple. Ou celles créées au Sanitas dans le cadre du budget participatif, où les propositions pour amener le street art dans les quartiers ne manquent pas (à Velpeau, par exemple). Murs de Loire exaucera notamment ce souhait avec l’apparition d’une fresque au Beffroi, choisie à la suite d’une consultation (le même type de concept avait été mis en place au Sanitas).

La population tourangelle semble donc sensible à cette discipline, en témoignent la curiosité pour les vernissages bimensuels des œuvres du M.U.R Tours situé au pied de la Tour Charlemagne : « On a de plus en plus de monde, jusqu’à 150 personnes » se félicite l’association du même nom. En témoignent aussi les groupes Facebook qui traquent les créations « sauvages » dans les rues de la ville (par ailleurs assez nombreuses).

Cela dit, cette tendance n’est pas nouvelle. Et si le street art sature aujourd’hui l’actualité culturelle tourangelle (à un niveau presque troublant), la dynamique avait été engagée bien avant 2020. La municipalité précédente avait ainsi déjà collaboré avec Le M.U.R de Bob Jeudi pour pimper les barricades encadrant le chantier des hôtels du Haut de la Rue Nationale (malheureusement un échec car elles avaient été taguées en quelques jours avec des messages revendicatifs). Il y avait aussi la création d’une fresque en hommage à Balzac à Tours-Nord. Et, en initiative privée, la coloration du parking souterrain près du Monoprix de la Rue Nationale sans parler des expositions de galeristes comme la galerie Veyssière, qui a essaimé jusqu’à l’Hôtel Goüin avec le concours du Conseil Départemental.

De plus, la culture tourangelle du street art est ancrée depuis de nombreuses années avec des sites comme le mur des Casernes dans le quartier Maryse Bastié, l’Île Simon ou le pont de l’A10 dans le Parc de Ste Radegonde. Le « retard » évoqué concernerait donc plutôt la commande publique dans ce domaine. Mais dans le même temps, attention aussi à ne pas laisser dépérir les créations.

On pense ainsi au mur de la Rue Edouard Vaillant au bord des voies SNCF. Il a une trentaine d’années puisqu’il a été réalisé au moment de l’arrivée du TGV… et ça se voit, vu qu’il tombe carrément en décrépitude par endroits (en particulier près de la Rotonde). Il aurait a minima besoin d’être restauré, voire refait. Mais malgré des questions posées sur le sujet à différents interlocuteurs, ça ne semble pas prévu dans l’immédiat. L’autre enjeu sera de perpétrer cet engouement. C’est en marche avec Murs de Loire prévu tous les deux ans, mais cela passera aussi par la répétition des expositions.

Ainsi, Tours pourrait-elle bientôt recevoir d’autres mastodontes, à l’image de Toulon qui monte actuellement un événement autour de l’hyper-star Banksy ? Ce serait l’étape suprême pour installer la ville sur la carte des cités qui comptent. Même si ce n’est pas forcément indispensable quand on veut mettre l’accent sur les nouveaux talents… ou la féminisation du secteur (alors qu’on ne compte que 15% de street artistes femmes, il y aura quasiment la parité à Murs de Loire, et un quart d’artistes locaux). L’enjeu est donc maintenant de voir comment Tours va entretenir sa culture graff.

Facebook
Twitter
Email

La météo présentée par

TOURS Météo

Inscription à la newsletter