Des liens forts entre la Touraine et la Syrie

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Il y a quelques semaines, une nouvelle association s’est créée en Indre-et-Loire avec l’objectif de soutenir l’accompagnement psychologique des réfugiés de la guerre en Syrie. L’occasion de vous la présenter, mais aussi de prendre des nouvelles d’un peintre syrien installé dans l’agglomération tourangelle et que l’on avait déjà rencontré l’an dernier, Georges Baylouni.

C’est un après-midi gris et humide du mois de janvier et il n’y a pas grand monde pour s’aventurer dans les allées paisibles du Parc de la Perraudière de St-Cyr-sur-Loire. En revanche, régulièrement, des visiteurs franchissent la porte du Pavillon Charles X. A l’intérieur, un feu de cheminée réconfortant. Mais ce n’est qu’un détail. Si l’on vient ici, c’est pour découvrir les œuvres de Georges Baylouni et rencontrer cet homme profond qui vit dans la commune et qui a également installé son atelier depuis un an au rez-de-chaussée de l’Hôtel Gouin, au centre de Tours. En ce moment, il présente le fruit de son travail des derniers mois.

Arrivées presque par hasard, sans vraiment savoir à quoi s’attendre, deux amies terminent leur visite bouleversées, l’une d’elles fond en larmes dans les bras du peintre et de sa femme Maha. Il faut dire que les créations de l’artiste syrien qui a fui Alep pour rejoindre la Touraine il y a 4 ans sont inspirées de son histoire, de la violence qu’il a pu observer et qu’il espère un jour voir disparaître. « Cette émotion, c’est la preuve que mon message est bien arrivé » témoigne l’homme de 51 ans, lui aussi touché par la sincérité des deux retraitées.

Des liens entre Tours et Alep

Colorés et faisant écho à la richesse historique et artistique d’Alep et du Moyen-Orient, les tableaux de Georges Baylouni sont construits comme des frises chronologiques, « je cherche toujours à représenter le temps » dit-il. On pourrait croire à des parchemins mais de nombreux symboles contemporains y figurent également. Ils représentent l’humanité dans sa globalité, l’ensemble des civilisations du monde. L’arrivée du peintre en France et le climat d’Indre-et-Loire ont également influé sur son travail, d’où le titre de l’exposition : « D’Alep à la Touraine, la continuité » (jusqu’à ce mardi 30 janvier). « La société tourangelle ressemble à la société alepienne et elle est capable de recevoir les étrangers, avec une certaine sorte d’amour » confie Georges Baylouni qui veut faire passer un message en faveur du mélange des civilisations et des croyances.

En parlant de son travail, l’artiste syrien explique ; « je ne cherche pas à apporter des réponses directement mais à poser des questions. » Georges Bayloun crée en permanence, ne supporte pas la vue d’une toile vierge : « le blanc c’est le silence et le vide, le premier point donne un éclair pour la vie » philosophe-t-il avant de poursuivre : « le plus important dans l’art c’est la sincérité. Quand elle est là, alors il touche. » Accueilli par le Conseil Départemental, sa résidence de l’Hôtel Gouin a été prolongée jusqu’à fin 2018. Il devrait par ailleurs exposer dans le monument en fin d’année.

Aider des femmes et enfants réfugiés depuis Tours

Sarah Thierrée pratique un autre genre d’art, celui qui consiste à écouter les maux des êtres humains écorchés par la guerre et à trouver les mots pour les aider à dépasser leurs traumatismes. La doctorante en neuroscience tourangelle est à la barre d’une nouvelle association : No Lost Generation in Syria, dont l’ambition est d’apporter un soutien psychologique aux victimes de la guerre. L’idée de sa création est partie d’un constat « simple » : « on apporte énormément d’aide humanitaire (médicale ou alimentaire) mais le versant psychologique est exclu du paysage humanitaire alors qu’il représente un enjeu sanitaire majeur » explique la jeune femme. Elle constate ainsi « un taux de suicide important » de la part des réfugiés, « notamment chez les enfants. »

« On avait aussi une véritable demande des femmes victimes de violences qui nous ont demandé une prise en charge spécifique » poursuit Sarah Thierrée qui est associée à un professeur universitaire de Tours et a monté un protocole « pour intervenir sur le trouble de stress post-traumatique sur une courte durée et avec des moyens assez faibles. »

Le projet d’une mission en Grèce et en Turquie cet été

Concrètement, sur le terrain, No Lost Generation est en lien avec une équipe de 4 personnes basée dans la région d’Alep : deux psychothérapeutes et deux infirmières en psychiatrie syriennes qui mènent des consultations avec les enfants, ou mettent en place des groupes de parole. « Quand elles nous le demandent, nous pouvons également faire des consultations par visioconférence depuis la France » ajoute la doctorante tourangelle, « on essaie de répondre à toutes les demandes. »

Les récits sont poignants : « les traumatismes les plus importants viennent des bombardements. Ces enfants ont tout perdu, vivent aujourd’hui dans des camps et nous parlent de ce qu’ils ont vu, des scènes ultraviolentes avec des corps déchiquetés. Nous sommes aussi confrontés à des situations de violences intrafamiliales. Enfin, une partie de la population a été très marquée par l’occupation de Daesh. Beaucoup d’enfants ont vécu pendant 4 ans sous l’influence de l’État Islamique et ont vu les pires horreurs imaginables, y compris des décapitations sur la place publique » liste Sarah Thierrée.

A la recherche de soutiens

Très sollicité le centre syrien a besoin de 1 800$ pour fonctionner chaque mois. Afin de réunir cette somme, l’association tourangelle propose à des commerçants tourangeaux de participer en faisant des dons réguliers en échange d’un macaron « entreprise solidaire » à apposer sur leurs vitrines. Des demandes de subventions sont également en cours, y compris auprès de l’université « car nous sommes engagés dans un processus de recherche. » Les particuliers peuvent aussi prendre en charge le traitement d’un enfant, moyennant 30€ mensuels.

En plus du centre de Sejjo en Syrie, No Lost Generation in Syria envisage de faire partir un bus humanitaire vers des camps de réfugiés en Europe ou au Moyen-Orient pour pouvoir rencontrer directement les enfants ou les femmes qui ont fui les combats : « l’idée est de venir en aide à un maximum de personnes en un minimum de temps. Les traumatismes anciens, les aléas du voyage, les difficultés actuelles… On s’attend à ce que tous aient beaucoup de choses à raconter. » Une session est prévue sur juillet-août en Grèce et en Turquie. « Idéalement on voudrait faire deux voyages par an, au moins un en tout cas. »

 

Un degré en plus :

A Joué-lès-Tours, l’association Syria Charity organise un gala solidaire le 24 février prochain Salle Jacques Brel. Sachez également qu’il existe un restaurant syrien Rue Colbert, Alep.

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