« Chambray est très bien placé pour devenir une place forte du handball féminin. »

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Elle a tout gagné ou presque. Médaillée d’or aux JO de Tokyo cet été, championne du Monde 2017 et d’Europe 2018 avec les Bleues, de France en 2012 avec Brest sans oublier ses multiples distinctions personnelles, Alexandra Lacrabère est devenue une véritable figure de proue du handball. À 34 ans, elle a rejoint à l’intersaison l’aventure des Conquérantes du CTHB afin d’y apporter son expérience sur et en dehors des terrains. Alors que le CTHB dispute ce dimanche son premier match de barrage en Ligue européenne à domicile face à Molde, Alexandra Lacrabère est revenue pour nous sur ses ambitions pour le club, mais également sur les transformations générales du handball féminin et sur son projet d’après carrière.

Après un temps de rodage, avec trois défaites plutôt « encourageantes », le CTHB vient d’enchainer avec une série de quatre victoires et deux matchs nuls. Peut-on dire que la saison est enfin lancée ?

Oui, nous sommes sur la bonne voie. Ces victoires permettent de lancer la saison au niveau comptable, mais également de capitaliser de la confiance. Il faut également ne pas oublier que le club a connu beaucoup de mouvements au niveau de l’effectif et qu’il faut donc un temps d’acclimatation qui peut être plus ou moins long avant une montée en puissance. En tout cas, et j’en suis persuadée, le CTHB d’aujourd’hui ne sera pas le même qu’en fin de saison. 

Quelles sont les caractéristiques de l’équipe ?

C’est une équipe jeune et talentueuse. Elle est travailleuse, ambitieuse et très joueuse. Des qualités individuelles et de fortes personnalités sont également à mettre au profit du collectif. Un collectif qui vit bien au sein d’une excellente ambiance. Les derniers résultats positifs apportent encore un peu plus de ciment à la cohésion de l’équipe.

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Qu’est-ce qui vous a poussé à rejoindre le CTHB ?

Après trois saisons au CJF Fleury Handball, j’étais à la recherche d’un nouveau challenge avec un club dynamique et ambitieux. Je voulais reprendre du plaisir sur le terrain. J’ai eu pas mal de propositions sur la table, mais c’est surtout le projet de Chambray que j’ai retenu sans hésiter. Jouer une coupe d’Europe et rejoindre une équipe talentueuse qui ne cesse de passer des paliers depuis plusieurs saisons ont rapidement été deux des trois arguments que j’ai retenus. Sans oublier mon souhait d’avoir un entraîneur (Jérôme Delarue, NDLR) issu du handball masculin pour bénéficier d’une nouvelle exigence, d’un style de management différent.

Avez-vous hésité à tenter une nouvelle aventure à l’étranger ?

J’aurais pu, mais j’ai fait ce que j’avais à faire à l’étranger. J’y ai gagné des titres, accumulé beaucoup d’expérience, découvert de nouvelles cultures, vécu une autre approche du handball, mais voilà j’ai fait le tour du sujet et je voulais terminer ma carrière en France.

Comment se fond-on dans un nouveau collectif ? L’expérience, la notoriété sont des atouts ? intimident-elles ?

S’immiscer dans un collectif doit se faire le plus naturellement possible. Il faut discuter avec tout le monde, prendre le temps de découvrir un nouveau groupe. Nous sommes toutes des joueuses de hand avec des caractéristiques et des personnalités bien distinctes. Nous avons toutes quelque chose à apporter au club et ça, il ne faut pas l’oublier. Forcément mon statut et mon expérience produisent une certaine attente de la part de mes coéquipières et je suis là également pour faire profiter de ces acquis. Après, j’espère aussi que mon statut les intimide un peu (sourire). À partir du moment où quelqu’un « impressionne », on donne davantage le meilleur, on devient plus exigeant avec soi-même… Je suis passée également par là et c’est une excellente étape pour la construction de la joueuse, mais également pour sa vie au quotidien. C’est un apport intéressant pour l’équipe, surtout que Chambray dispose d’un effectif relativement jeune.

« Quand je parle d’apporter de l’expérience, ça ne se résume pas uniquement au jeu, cela concerne le club dans sa globalité »

Quels sont vos objectifs personnels avec le CTHB ?

Sur l’aspect sportif, essayer de faire au moins aussi bien que l’année dernière (les Conquérantes avaient terminé à la 4e place du championnat se qualifiant ainsi en Ligue européenne, NDLR) et d’arriver, sur le court terme, à installer durablement Chambray dans le top 5 du championnat. Je tiens également à ce qu’on fasse bonne figure en Ligue européenne et pour ça il faudra sortir deux gros combats contre Molde en match aller-retour de barrage. Ensuite, j’aimerais également participer à la progression du club en dehors du terrain. L’aider dans le développement de son image, de sa structure. Quand je parle d’apporter de l’expérience, ça ne se résume pas uniquement au jeu, cela concerne le club dans sa globalité. J’apprécie la façon dont le projet s’est développé depuis la montée du club en première division en 2016. Le CTHB est un club qui s’est construit sans se précipiter, qui a réussi à éviter de brûler les étapes. Aujourd’hui, Chambray est très bien placé pour devenir une place forte du handball féminin.  

Quel regard portez-vous sur l’évolution de la première division depuis votre première apparition en 2006 avec Bègles ?

En 15 ans, le championnat a beaucoup évolué. Quelque part, il a suivi les bons résultats de l’Équipe de France sur la scène internationale. En plus de récupérer un vivier de jeunes joueuses françaises talentueuses, le championnat a donc attiré de nouveaux investisseurs qui ont fait augmenter les budgets de leur club. Beaucoup de clubs ont changé de dimension et le championnat s’est renforcé, son image également. C’est très positif comme évolution même s’il y a encore du retard. Certains clubs, par exemple, n’ont toujours pas de kiné alors que c’est très important dans un staff technique. Donc oui, le championnat s’est professionnalisé, mais il y a toujours certains manques. Je pense également à la couverture médiatique qui reste relativement faible. Le hand féminin se résume pour beaucoup de personnes uniquement à l’équipe de France et à ses médailles. Et encore, la ferveur ne dure généralement que deux mois. C’est incomparable avec la Norvège ou la Suède. Dans ces pays, il y a les diffusions TV des matchs de leur championnat féminin dans les aéroports…

Le jeu a-t-il également évolué ?

Oui, il est devenu très exigeant physiquement avec beaucoup plus de matchs sur une saison. Les contacts sont plus rudes, parfois plus appuyés. C’est positif, car ça a rendu notre sport encore plus athlétique. On s’est rapproché du handball masculin.

« Le handball féminin avance et doit faire avancer le sport féminin »

Le 1er juillet dernier, une convention collective, signée en mars dernier, est entrée en vigueur afin d’améliorer la vie des joueuses professionnelles de handball. Allongement des congés payés, maintien de salaire durant un an afin de couvrir une longue blessure ou une grossesse, mise en place d’un salaire minimum… Il s’agit d’une grande avancée ?

Enfin, et c’est un grand pas pour le sport professionnel féminin. Ça fait des années que nous voulions réformer tout ça et obtenir un cadre pour qu’on soit davantage considérées. Les clubs ont compris qu’il fallait avancer sur beaucoup de points et c’est très positif. Aujourd’hui, il ne faut plus qu’une sportive ait honte ou peur pour son avenir professionnel de tomber enceinte ou de se blesser. C’était une énorme source de stress pour tout le monde et qui avait forcément un fort impact sur la joueuse. D’autant plus que maintenant une carrière professionnelle a tendance à s’allonger. J’apprécie également que nous soyons davantage accompagnées pour travailler sur notre projet de reconversion professionnelle d’après carrière. Le handball féminin avance et doit faire avancer le sport féminin, en espérant que ce type de convention se déploie dans d’autres sports. 

Quand vous regardez dans le rétro, comment jugez-vous votre carrière ?

Je suis très fière du travail accompli et de mon parcours. Tout n’a pas été simple loin de là, surtout au début quand je me faisais recaler dans les jeunes catégories. Mais bon, au lieu de me démoraliser cela m’a permis de me construire et de toujours me battre pour m’imposer. Rien n’est jamais acquis d’avance dans le sport. Accumuler des titres nationaux comme internationaux et des distinctions personnelles est une très belle récompense du travail fourni. Et terminer ma carrière internationale sur un titre olympique avec les Bleues, malgré ma blessure en début de compétition et la frustration que cela amène, est quand même quelque chose d’assez incroyable. J’aurais signé tout de suite pour un tel scénario.

Comment envisagez-vous votre après carrière ? Allez-vous rester dans le milieu du hand ?

En parallèle de ma vie de joueuse professionnelle, je prépare un BTS pour devenir diététicienne. J’aimerais rester dans le monde du sport en m’occupant donc de la préparation et de la récupération. Accompagner et aider les sportifs, amateurs comme professionnels, à encore mieux prendre soin de leur corps et cela passe par l’alimentation au quotidien. La nutrition à un rôle vraiment essentiel dans la préparation d’un match, d’un événement, et il ne faut pas la négliger. 

Propos recueillis par Pierre-Alexis Beaumont. Photos : Pascal Montagne

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