Quand les pompiers de Tours apprennent à manier des serpents

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On vous parle souvent des pompiers quand ils sortent pour éteindre un feu, secourir les blessés d’un accident de la route, sauver une personne tombée à l’eau ou intervenir pour des inondations après un orage. Parmi les milliers d’interventions réalisées chaque année par le SDIS37 il y en a aussi qui consistent à capturer des serpents sauvages ou à secourir des propriétaires attaqués par leurs reptiles. Des missions qui nécessitent une certaine préparation. Nous avons pu suivre une formation spécialisée.

« C’est normal d’avoir peur. C’est la phobie qui est un problème » annonce Arnaud Leroy devant ses stagiaires. Basé au Muséum d’Histoire Naturelle de Tours, le pompier fait face à 7 jeunes dans un bureau du 3e étage de l’établissement. Il s’apprête à leur montrer des diapos avec tous les types de serpents qu’on trouve en Touraine mais aussi des photos peu ragoûtantes de personnes atteintes par la gangrène après une attaque de reptile. Juste avant, ce spécialiste leur a présenté sa ménagerie composée d’espèces plus ou moins exotiques. Et avant de les laisser repartir, il leur apprendra la manipulation d’une couleuvre d’Amérique du Sud sans oublier une petite surprise cachée dans une poubelle au format XL : un boa, soit une espèce tout à fait capable de tuer un être humain.

Sur leurs chaises, les futurs pompiers professionnels n’en mènent pas large. Ils feignent l’amusement mais on sent leur appréhension. Pourtant cette préparation est indispensable. Au cours de leurs missions, on peut les appeler pour une personne mordue par un serpent, qu’il soit détenu légalement ou illégalement. Ce jour-là, ils devront savoir réagir si la bête s’est enfuie. Les interventions pour capture de serpent chez des particuliers sont également régulières : Arnaud Leroy participe à plusieurs dizaines de sorties de ce genre chaque année, sachant qu’il récupère les spécimens non réclamés à la fourrière au bout d’un mois si ce ne sont pas des espèces présentes dans la nature en Indre-et-Loire.

Ce cours est l’occasion d’emmagasiner tout un tas de connaissances sur les serpents. On apprend pêle-mêle qu’on en trouve 3 700 espèces dans le monde mais seulement 12 en France et 6 en Touraine. Sur la planète, 500 espèces sont venimeuses (dont une seule dans notre département, la vipère aspic). « Les plus dangereuses sont en Australie mais là-bas il y a peu de mortalité car les secours sont préparés » explique Arnaud Leroy. C’est surtout en Afrique et en Asie qu’il y a des décès. Et en France ? En moyenne 4 morts par an à cause de vipères (à comparer avec les milliers de victimes des accidents de la route, du tabac… et même suite à des attaques de frelons).

Le problème ce ne sont donc pas vraiment les serpents naturellement présents dans notre environnement mais ceux introduits sans les précautions suffisantes. « Beaucoup de gens possèdent des espèces dangereuses sans autorisation » explique le formateur. Et quand on sait qu’un cobra cracheur peut contaminer toute un groupe à plusieurs dizaines de centimètres de distance, il y a de quoi faire un mouvement de recul. « En intervention, pensez donc bien à mettre votre casque avec la visière et lavez la pince avec laquelle vous avez attrapé le serpent car il peut y avoir déposé du venin. C’est déjà arrivé d’avoir des contaminations comme ça. Si ça arrive sur votre peau ça fera juste une brûlure mais à la moindre coupure le venin vous pénètre. » Et là, c’est le drame.

Alors on se rassure quand même : « La plupart des serpents ont peur de nous et ne viendrons pas nous attaquer » précise Arnaud Leroy. Sauf le mamba noir qui peut atteindre 20km/h. Donc qui peut bouger plus vite que vous. Il faut aussi se méfier des serpents à vision thermique, « 1 000 fois plus puissante que nos caméras » et qui détectent donc en avance votre main qui approche même si ils sont enfermés dans un sac.

Le pompier formateur l’explique bien : la meilleure solution face à un serpent c’est de l’attraper et de le mettre dans une boîte. Et comme certaines espèces se défendent en faisant le mort, il vaut mieux prévoir ce genre de comportement. D’ailleurs, sauf exception très spécifique (danger imminent pour une victime), pas question de tuer les serpents. Toutes les espèces sont protégées en France, même les couleuvres inoffensives. « Depuis 2021 c’est jusqu’à 3 ans de prison et 150 000€ d’amende » rappelle Arnaud Leroy, d’autant plus que les interventions des pompiers peuvent être filmées par les témoins de la scène, donc que les images peuvent servir de preuve devant un tribunal.

Des formations comme celles-ci, le SDIS37 en organise une dizaine par an, au milieu d’un cursus qui comprend moult autres préparations. Y compris auprès d’autres animaux qui peuvent se retrouver sur le chemin des pompiers. Ce n’est pas le quotidien mais si ça arrive, autant avoir les bases pour réagir efficacement.

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