Créée en 1999, l’association tourangelle Active récupère les vêtements que vous ne voulez plus. Elle revend à tous petits prix ceux qui sont en très bon état et organise le recyclage des autres. Une activité écoresponsable qui ne cesse de gagner en notoriété et qui méritait des locaux à la hauteur des ambitions de la structure. 1 million d’€ est donc investi pour rénover un bâtiment à la frontière entre Tours et La Riche. Reportage sur le chantier.
C’est peu dire qu’il y a du mouvement dans le secteur Tonnellé, à la limite ouest de la ville de Tours. Le quartier Plessis-Botanique de La Riche sort de terre à grande vitesse mais ce n’est pas le seul chantier d’importance en cours en cette fin d’année 2023. Collé à un futur immeuble d’habitation, un vieux hangar agricole est en cours de transformation. Siège de l’association Active depuis ses débuts, il est en pleine reconversion pour y ajouter un étage et de grandes ouvertures vitrées : de quoi offrir des locaux confortables aux salariés de la structure et à ses visiteurs avec une boutique de 400m² flambant neuve sur deux niveaux équipée d’un ascenseur, 400m² d’entrepôts, un espace dédié à l’atelier couture et 200m² de bureaux.
Pensé par l’atelier d’architectes tourangeaux d’Alice et Nicolas Stadler, le bâtiment nécessite 1 million d’€ d’investissements (dont un quart du budget grâce à différentes subventions publiques mais aussi près de 6 000€ de dons après une collecte participative). « C’est le fruit de deux ans de réflexion » explique le président Benoit Koenig, fils du fondateur d’Active. Et au passage un joli coup car les promoteurs immobiliers auraient bien voulu s’emparer de la zone. « On a cherché ailleurs mais trouver un local de 1 000m² c’est compliqué, et avec notre budget impossible. La seule option c’était de réhabiliter le bâtiment et créer un étage. » Cela permet aussi de rester à proximité du quartier populaire Maryse Bastié et à une adresse très facilement accessible en transports en commun.
Vu la destination de l’opération, toutes les entreprises impliquées ont baissé le coût de main d’œuvre via du mécénat de compétence. Les matériaux sont, eux, en partie récupérés de l’ancienne école de commerce des Fontaines (des portes, des tableaux électriques, des faux plafonds, des lavabos, des luminaires…). « C’est conforme à notre philosophie de ne rien jeter et de tout réutiliser » commentent Benoit Koenig et l’ancienne présidente Mondane Blin.
La fin des travaux est prévue pour janvier 2024 et l’inauguration officielle au mois de mars. En attendant, Active bricole dans des locaux en location juste à côté de son siège historique, l’association conservant par ailleurs son deuxième local avec boutique Rue Edouard Vaillant dans le quartier Beaujardin (le temps des travaux elle bénéficie aussi d’une boutique temporaire à La Riche Soleil). Avec cette évolution, elle espère pouvoir répondre de la meilleure des manières à ses besoins et à ceux des personnes qui la fréquentent. En 12 mois, ce sont environ 50 000 entrées comptabilisées dans les boutiques (4 300 en juin 2023) mais aussi 200 tonnes de vêtements, jouets ou livres récupérés via des dons (exclusivement remis en direct aux équipes les mercredis et samedis matins sur les sites de Tonnellé et de Beaujardin, les bornes d’apport volontaires ayant été retirées).
« A chaque jour de collecte on nous apporte une tonne de vêtements » commente Mondane Blin. C’est autant qu’à l’époque où il y avait les conteneurs dans les rues, mais avec une meilleure qualité de produits. « On prend tout mais ce qui nous manque ce sont surtout des vêtements d’hommes » poursuit la responsable.
30% des dons sont conservés pour être revendus en boutique, souvent à moins de 5€. Le reste est utilisé par l’atelier couture et ce qui ne peut pas resservir part vers une entreprise de recyclage en Normandie, « avec une centaine de débouchés ». Active espère un jour monter une structure similaire dans la région pour réduire son empreinte carbone mais c’est long et compliqué à créer. « Les machines coûtent cher et l’investissement est difficile à amortir » explique Benoit Koenig qui a tout de même un espoir de débouché en 2024, par exemple pour transformer les tissus en isolant pour le bâtiment.
Association caritative phare de l’agglomération tourangelle, Active se partage le marché des vêtements à tout petit prix avec la Croix Rouge (qui dispose de plusieurs vestiboutiques), L’Armoire sans Fin (orientée vers le troc) ou encore Le Relais. En cette période de forte inflation, elle sent les besoins augmenter. S’il est difficile de mesure la part de clientèle qui vient dans ses boutiques par nécessité, et celle qui s’y rend pour le plaisir de chiner ou pour éviter d’acheter neuf par conscience écologique, elle dispose d’un marqueur phare : les bons de gratuité, des coupons remis aux personnes en grande difficulté par des assistantes sociales ou d’autres partenaires. Ils permettent de choisir trois articles gratuits, soit l’équivalent d’une tenue. L’équivalent de 9 000€ ont ainsi été offerts entre janvier et août 2022… 15 000€ sur la même période en 2023. Les opérations événementielles à l’Université une fois par mois ou à l’Heure Tranquille (mercredi 27 septembre) bénéficient également d’un intérêt croissant.
« Il y a tous les milieux sociaux mais on voit qu’en ce moment les gens reviennent par besoin » détaillent Benoit Koenig et Mondane Blin. Contrairement à d’autres associations comme les Restos du Cœur qui ont récemment lancé un appel d’urgence, Active ne souffre pas financièrement de cet afflux. « On a la chance d’avoir eu une succession d’équipes qui ont fait les bons choix » insiste le président. C’est la même chose pour les bénévoles : l’équipe en compte 35, sans gros besoins de renforts. Mais ce qui fait la particularité d’Active, c’est son modèle d’insertion avec le recrutement de salariés pour un an maximum dans le but de les voir partir ensuite vers un autre emploi stable. « On en a entre 20 et 30 avec un taux de réussite de 70%, largement au-dessus de nos espérances et des objectifs nationaux qui sont de 40% » précise Mondane Blin.
Ces employés sont notamment affiliés au tri des vêtements mais aussi à l’atelier couture « qui fonctionne de mieux en mieux ». Accessible à tout le monde pour des retouches de vêtements à prix modique, il confectionne également des sacs à partir de vieilles bâches publicitaires. « De plus en plus d’entreprises nous confient la création de leurs goodies » s’amuse Mondane Blin. Une antenne qui sera encore plus visible dans les futurs locaux. Et il ne reste que quelques mois à attendre pour découvrir le tout.
