Entre distribution alimentaire pour les plus démunis, émergence de nouvelles formations attractives et soirées, le quotidien des 30 000 étudiants tourangeaux est loin d’être de tout repos. Récit d’une journée haletante avec ceux qui font de Tours la sixième ville préférée des étudiants français selon le classement du site “L’Étudiant”.
Le réveil sonne, à table ! Enfin pas pour tout le monde. Certains jeunes tourangeaux, comme dans chaque ville française étudiante, sautent des repas, et pour ne rien cacher le petit-déjeuner est souvent le premier sacrifié. En situation précaire, un étudiant en mathématiques raconte son quotidien “Je mange seulement un ou deux petits-déjeuners dans la semaine. Je les loupe par faute de moyens et de temps quand je me lève trop tard.”
Constatant ce désastre et déterminés à venir en aide aux étudiants les plus démunis, des associations organisent des distributions de denrées alimentaires à proximité des universités. “Tous les mardis soir, à la maison de l’étudiant du campus Grandmont, on distribue des produits secs, des fruits et légumes, des boissons pour les étudiants en situation de précarité, surtout pour ceux qui étudient à l’université de Tours. Ces produits sont financés par des subventions et la banque alimentaire”, témoigne le bénévole Hamza Erebal, ancien étudiant fraîchement diplômé en droit et ex-président des Halles de Rabelais pendant 3 ans.
Une association labellisée par l’université de Tours qui, chaque mardi, reçoit jusqu’à 180 étudiants rencontrant des difficultés financières. “Mes parents ne me donnent pas beaucoup d’argent et je n’ai pas de petit boulot donc je suis obligé de solliciter des associations comme les Halles de Rabelais. Avec leur aide, je vais louper moins de repas dans la semaine et je les remercie. Mais malheureusement, parfois, ce n’est pas assez et j’en rate quand même”, révèle un étudiant en informatique. Rappelons qu’en France plus de 20% des étudiants ne mangent pas à leur faim. Une aubaine…
Aujourd’hui un étudiant tourangeau qui ne vit pas chez ses parents, pour ne louper aucun repas, dépense en moyenne 200 euros de nourriture par mois. À ceci s’ajoutent d’autres dépenses à l’image de l’accès aux transports en commun. À Tours, l’abonnement Filbleu réservé aux étudiants coûte 230 euros par an. Pour un réseau de transport de qualité, le prix est moins élevé que les villes étudiantes voisines et concurrentes, Nantes et Angers. Bien que parfois, les services laissent à désirer avec une dizaine d’incidents de trafic par jour signalée, incluant des annulations, des accidents ou des pannes sur le réseau Filbleu.
“À cause des perturbations, on arrive parfois en retard aux premiers cours de la journée”, indique un étudiant en physique. Malgré ces légers dysfonctionnements, les services de transports tourangeaux restent fiables et amènent facilement les étudiants vers leur campus situés aux quatre coins de la ville, spécificité de Tours qui ne possède pas qu’un seul pôle universitaire comme dans d’autres villes étudiantes de la région.
Le Tours des formations
Après une petite demi-heure de bus, la journée démarre sur les chapeaux de roue : 2 heures de géographie écologique, cours du cycle pluridisciplinaire d’études supérieures sur les sciences de la transition écologique et sociétale fraîchement débarqué en 2022 dans la métropole tourangelle. “C’est une licence en trois ans unique en France. Les cours de cet enseignement pluridisciplinaire se passent au lycée Descartes et à l’université. Nos étudiants, qui viennent de toute la France, mais aussi de pays étrangers, ont des enseignements classiques (math, biologie, géo, philosophie, littérature, SVT…) liés à la transition écologique,” commente Jacques Galhardo, professeur de géographie dans cette licence.
Au cours de la dernière décennie, de nombreuses formations ont aussi ouvert leurs portes à Tours. Un phénomène d’autant plus marquant du côté des établissements privés, en plein développement depuis de nombreuses années. D’ailleurs, la tendance n’est pas prête de s’arrêter. Dans le public, à l’aube de la rentrée 2024, l’Université de Tours s’apprête encore à déployer de nouvelles offres de formation, élargissant ainsi l’éventail des possibilités académiques pour ceux qui souhaitent venir étudier à Tours.
Parmi les nouveautés, une double Licence en physique-chimie fera son entrée aux côtés de programmes inédits mêlant droit et sciences politiques ainsi qu’italien et anglais. En parallèle, un Master en ingénierie, avec une spécialisation axée sur les technologies quantiques, devrait voir le jour. L’émergence de ces nouvelles formations attractives a provoqué un afflux important d’étudiants dans la métropole tourangelle. En 2010, la population universitaire était de 22 000 alors que 14 ans après plus de 30 000 jeunes étudient à Tours. Face à cette augmentation d’étudiants, des logements à loyer abordable, en plus des 12 résidences universitaires CROUS et des sept résidences privées de la ville, vont être construits.
À proximité du campus Deux-Lions, le CROUS, pour tenter d’éviter une crise du logement avant les futures rentrées scolaires, prévoit de créer 100 nouveaux appartements. Un étudiant, habitant dans une de ces résidences universitaires à Rabelais, recommande les services de ces logements proposés par le CROUS de l’académie Orléans-Tours. “Les studios de 18m2 de la résidence sont confortables et à bas prix. Si ces résidences du CROUS n’existaient pas, j’aurais dû faire mes études ailleurs qu’à Tours.”
Des appartements, comme le repas à 1 euro du CROUS, évidemment attribués selon des critères sociaux. De leur côté, d’autres étudiants doivent passer par un marché immobilier toujours plus cher. Ces dernières années, on constate une hausse de 6 à 8 % pour les logements vacants. Pourtant, par rapport aux autres villes étudiantes voisines (à Orléans les loyers sont encore plus élevés et c’est encore pire à Nantes), les prix aux m2 à Tours restent abordables, notamment pour les studios et appartements T1.
“Quand tu loues un T1 et que t’as les parents derrière, c’est plus facile. Parfois, je me demande comment tu peux payer ton loyer dans le cas inverse”, s’interroge une étudiante en sociologie. “La solution serait de travailler à côté comme je fais. En plus à Tours, il y a pas mal d’offres de petit job pour les étudiants. Après bosser ce n’est pas forcément possible pour certains étudiants déjà très sollicités par les heures de cours / révisions à la FAC. Moi j’ai pas le choix et ça me permet d’avoir un meilleur logement”, lui répond son ami. Des studios notamment situés dans le Vieux Tours, quartier à proximité des lieux festifs de la ville.
Les derniers Tours de force
Vivre non loin des festivités motive forcément les étudiants tourangeaux à sortir après une longue et dure journée de révisions, histoire de lâcher ses dernières forces dans la bataille. “Avec mes amis, on a nos habitudes au Nautilus. L’ambiance est très agréable surtout quand il s’agit de s’amuser (rire)”, évoque une étudiante de L2 en sociologie. Ouvert jusqu’à deux heures du matin, ce bar, situé rue de la longue échelle, est devenu l’un des repères incontournables pour les étudiants en quête de festivités.
Lorsque le corps a la capacité de supporter une énième pinte, les plus courageux se dirigent Avenue de Grammont afin de prolonger la soirée au Pym’s, boîte de nuit réputée de la ville. “Je ne vais dans aucune autre boîte de nuit à Tours parce que c’est vraiment la meilleure, surtout lors des soirées à thème avec des animations. Les musiques, la taille de la boîte et le nombre de personnes rendent l’ambiance toujours agréable”, affirme une étudiante en école d’infirmière.
Aux alentours de minuit, avant que la soirée ne démarre, les jeunes noctambules se dirigent vers les bars et boîtes de nuit, rendant les rues principales du centre-ville noires de monde. La population étudiante participe déjà grandement au dynamisme de la ville. Lors des vacances scolaires, périodes de l’année où les sièges des amphithéâtres n’ont pas de propriétaires, les bars, boîtes et restaurants du centre de Tours accueillent moins de clientèle et perdent du chiffre d’affaires. Ces établissements, au contraire des étudiants tourangeaux, aimeraient que ces vacances soient courtes…
Mathis Blineau Choëmet