Depuis septembre 2016, l’hôtel de l’alternance à Tours accueille pour de courts ou longs séjours des jeunes stagiaires ou apprentis de la formation professionnelle. A l’heure où l’accès au logement est rendu compliqué pour une partie d’entre eux, l’association Jeunesse et Habitat a su trouver des solutions afin que les études ne soient plus associées à la galère financière.
« J’ai grandi avec Jeunesse et habitat, c’était mon premier emploi réel. » Pour Jennifer Couchou-Meillot, responsable de l’hôtel de l’alternance, c’est une fierté que d’avoir pris la gestion du nouveau site de l’association, « mais aussi un challenge » pour celle qui a « gravi les échelons année après année ». A hauteur de quatre millions d’euros (dont une importante prise en charge de l’Etat) et après six ans d’appel d’offre, cet « hôtel » d’un genre particulier a vu le jour rue du Plat d’Etain afin d’accueillir les jeunes désireux de poursuivre leur formation dans les meilleures conditions. Près d’un an après l’ouverture, le bilan est positif et le bâtiment répond parfaitement à la demande.
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Avec près d’un jeune sur dix au chômage et un tiers vivant sous le seuil de pauvreté, selon le dernier rapport de l’Observatoire des inégalités de Tours, la précarité des jeunes est une réalité. Si les grandes villes françaises demeurent attractives, c’est bien pour les offres de formations bien plus importantes qu’ailleurs. C’est aussi le règne des loyers inaccessibles et Tours ne fait pas exception avec près de 12 euros le mètre carré en location. Il est alors aisé de comprendre les difficultés d’insertion dans l’emploi quand une partie de la population qui se forment à son avenir doit d’abord penser à la manière dont elle va bien pouvoir régler la facture à la fin du mois.
Après un an d’existence, l’hôtel de l’alternance compte un taux d’occupation de 84% et son offre correspond à un réel besoin : les loyers abordables se pratiquent au mois… et à la semaine (respectivement 453 et 75 euros pour un logement individuel et quelques T3 à partager en colocation) et sont dans la très grande majorité des cas couverts par les APL, grâce à une convention avec la CAF. Ainsi les entrées et sorties sont récurrentes et les appartements, modernes et meublés, profitent à tous. Les apprentis ne sont donc pas prisonniers des contraintes d’un logement loué auprès d’un particulier.
Espace solidaire
Conscients de la forte mobilité des apprentis qui représentent 90% du public, Jennifer et son équipe ont à cœur de répondre présents. « Cette appellation “hôtel” est au final assez juste même pour un foyer de jeunes travailleurs. Les occupants n’ont pas pour vocation de rester indéfiniment mais on leur propose un véritable espace de vie commune, avec une salle où l’on peut se rassembler, une salle de sport, une petit cafète et une terrasse », confie Jennifer. Sur la terrasse qui donne sur les anciennes casernes, plusieurs planches s’amoncellent. Les résidents s’y assoient le soir pour se réunir et donne à ce lieu un charme tout particulier. Dans la cafétéria, un tableau à craie fait office de brainstorming et affiche les souhaits de ses occupants. En accord avec l’animatrice présente quatre soirs par semaine, les propositions sont étudiées et soumises à l’accord de Jennifer. Le nouveau barbecue témoigne de cette structure en constante évolution.
Un peu plus loin dans la même salle, une carte du monde est affichée au mur, avec cette question en surplomb : « d’où viennent nos résidents ? » D’un peu partout à vrai dire et de chaque continent. Ewan vient du Canada. Avoir trouvé une chambre dans l’immeuble a été une aubaine. C’est la directrice de son lycée qui a fait les démarches auprès de Jeunesse et Habitat pour qu’il puisse intervenir dans l’établissement en tant qu’assistant en langue. L’hôtel revêt alors des airs d’auberge espagnole et permet une réelle ouverture à l’autre pour tous les résidents.
« Je fais ce métier pour aider les jeunes mais surtout pour les accompagner dans leur insertion professionnelle. Car Jeunesse et Habitat, c’est une offre de logement mais on veut surtout créer du lien social, » continue Jennifer. Les apprentis ne sont pas livrés à eux-mêmes et savent qu’ils peuvent trouver auprès de leurs interlocuteurs « une oreille en cas de remise en question ou d’échec, » dans les mots d’Anna (le nom a été changé) qui ne saurait se sentir plus à l’aise dans la poursuite de son alternance. Après la fin de la formation, l’association n’arrête pas pour autant son action. Trouver un logement est toujours aussi compliqué mais les jeunes sont suivis et profitent du réseau dense de la structure afin de trouver un toit à proximité du lieu de travail.
Pour Jennifer Couchou-Meillot, l’hôtel de l’alternance est à l’image de la politique sociale de l’association. Ouverture, aide à la socialisation, accessibilité pour accompagner les jeunes vers l’indépendance. Un petit regret ? « Notre parole et notre expérience manque un peu de représentation au sein des politiques. Nous travaillons en étroite collaboration avec les collectivités mais notre savoir-faire, notre connaissance du terrain, gagneraient à être plus entendus. »
Crédit photo : Henry Girard pour 37°