[HistLoire] Port-Bretagne : histoire d’un quai de la Loire à Tours

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HistLoire, c’est une chronique régulière sur 37° où nous vous proposerons un petit focus sur un pan d’histoire tourangelle. Ce mois-ci, restons dans le quartier du Champ de Mars avec l’histoire du quai de la Loire Port-Bretagne.

Le nom Port-Bretagne fait originellement référence au quai du même nom. La situation de ce dernier correspond aux quais de la Loire, à l’ouest du pont Napoléon. Par extension, cela peut faire référence aux ilots d’habitations autour du quai et de la rue du Port-Bretagne qui prolongeait le boulevard Preuilly jusqu’au quai.

Pourquoi Port-Bretagne ?

Un acte de l’archevêque de Tours Gaufridus, daté d’avril 1247, mentionne le « portallum britanniae » comme extrémité de Châteauneuf. Pour l’historienne Hélène Noizet (1), cette porte de Bretagne correspond au port de Bretagne qui se situait en haut de l’actuelle rue de la Victoire, au niveau du pont Napoléon. Hélène Noizet, explique que si ce Port-Bretagne se situait à proprement parlé en dehors du « castrum », c’est à dire de l’enceinte fortifiée de Châteauneuf, il constituait cependant la limite nord-ouest de l’ère d’influence des Chanoines de Saint-Martin et faisait donc parti intégrante du « suburbium » de Châteauneuf (L’enceinte et les faubourgs dépendants).

 

Sur le plan ci-dessous, on retrouve le Port-Bretagne au nord-ouest de l’enceinte du XIVe siècle :
2013-04-09 10.26.46

 

Ceci permet de se rendre compte de l’éloignement de ce port par rapport à l’enceinte de Châteauneuf, ce qui montre l’importance et la vitalité de ce dernier.

Pour autant, Port-Bretagne, n’a jamais été un des principaux ports de Tours selon C. Bouquet, dans son article « La communauté urbaine de Tours à la fin du Moyen Âge » (2). Selon lui, sur la vingtaine de ports recensés pour la ville de Tours vers le XVe siècle, « seuls trois, « La Coherie », « Foire-le-Roy » et « L’Ospitau », semblent avoir fait l’objet d’un aménagement volontaire et organisé en fonction des contraintes de la Loire ». Les autres n’étant pour l’auteur que des « simples ports d’échouage sans structures particulières », mais qui contribuaient tout de même à l’approvisionnement de la ville.

Pour revenir au nom de Port-Bretagne, l’explication la plus crédible est celle donnée par Hélène Vialles (3). Cela correspondrait simplement au fait que depuis le Moyen-Age, voir l’Antiquité, ce soit le port qui était le plus à l’ouest de Tours et ainsi celui le plus proche de Nantes et de la Bretagne.
Enfin, pour être complet, il convient de mentionner que sous la Révolution, le quai Port-Bretagne prit le nom de quai du Serment-Civique (arrêté municipal du 6 vendémiaire an VI, soit le 27 septembre 1797), tout comme le Champ de Mars voisin prit le nom de place du Serment Civique. Ce n’est que le 16 juillet 1816 qu’un autre arrêté municipal lui rendit son ancien nom.

 

La réhabilitation de la fin du XXe siècle :

Dans la seconde moitié du XXe siècle, dans le cadre de la réhabilitation des quartiers anciens, le quartier Courteline, auquel appartient Port-Bretagne, va subir de profondes transformations. Dès les années 1960, une centaine de logements HLM est construite sur l’ancien Champ de Mars. La réhabilitation de la vieille ville, touche petit à petit les alentours de Port-Bretagne : réhabilitation et élargissement de la rue des Tanneurs, de la rue de la Victoire, destruction du placis la Riche au profit de la construction de la tour Ballan…

Les maisons de Port-Bretagne sont alors habitées par une population majoritairement pauvre, vivant dans de vieilles habitations, plus ou moins insalubres et plus aux normes d’hygiène et de sécurité.
Dans ce cadre de modernisation de la ville, Jean Royer explique le 12 décembre 1979, dans une lettre aux services municipaux : « La réhabilitation de l’ilot Alleron/Port Bretagne, envisagée pendant un temps semble maintenant abandonnée en faveur des dispositions du plan de masse en vigueur qui prévoit un parking de surface et l’immeuble D1. Leur réalisation implique la démolition complète des existants ».  

Au début des années 80, les vieilles habitations de Port-Bretagne sont donc détruites. La partie nord de l’ilot devient un parking. L’extrémité sud de l’ilot est cependant, en partie sauvée, grâce à la présence de l’Etoile Bleue dont la destruction programmée, avait levé une série de boucliers de la part des habitants du quartier.

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Plan de l’ilot avant et après réhabilitation (4)

L’évolution du quartier en photos :

Voyons maintenant l’évolution de la trame urbaine grâce aux photographies aériennes de l’IGN :

  •  Sur cette première photo datée de 1961 (orientée est-ouest), nous voyons que l’ancien Champ de Mars  commence à être urbanisé avec la construction d’une barre HLM sur le front de Loire. Pour le reste, le bas de la photo montre un tissu urbain resserré, avec les différents ilots d’habitations qui regroupent de vieilles maisons dans lesquelles vivent une population aux revenus modestes.port bretagne 1961
  • Cette deuxième photo, datée de 1966 est prise dans le sens inverse de la précédente (sens ouest-est). Nous voyons en bas, le bout du Champ de Mars qui est fini d’être urbanisé avec un nouveau bâtiment HLM. Pour le reste, peu de choses ont changé depuis 1961, la trame urbaine paraissant toujours aussi dense.
port bretagne 1966
  •  La troisième photo date de 1971. En haut, nous voyons que les abords de la rue de la Victoire sont en cours de réhabilitation. Les vieilles maisons ont été rasées et des immeubles sont en cours de construction pour les remplacer.
port bretagne 1971
  •  Cette quatrième photo est datée de 1978. Elle est orientée est-ouest. Malgré une qualité moindre que les précédentes, on se rend compte de l’évolution importante du quartier. Des vieux ilots ont été de nouveau détruits pour faire place à des bâtiments neufs. L’espace urbain a été aéré autour de la rue de la Victoire. La tour Ballan et sa forme en étoile, si caractéristique, a été construite. Le dernier ilot ancien encore présent correspond à celui qui nous intéresse, celui Alleron/Port-Bretagne décrit plus haut.
port bretagne 1978
  • La dernière photo correspond à la situation aujourd’hui. Orientée vers le nord, elle permet de voir le parking qui a remplacé la partie nord de l’ilot Port-Bretagne. Parking traversé par une allée, nommée rue du Port-Bretagne (tracé noir), qui correspond exactement à l’ancienne rue. En bleu, l’actuel quai du Port-Bretagne.
port bretagne 2013

 Un degré en plus :

Sources :

(1) Hélène Noizet, La Fabrique de la ville. Espaces et sociétés à Tours (ixe-xiiie siècles), Paris, Publications de la Sorbonne, 2007, 504 p.

(2) C. Bouquet (La communauté urbaine de Tours à la fin du Moyen Âge. In : CARCAUD N. et GARCIN M. (coord.), Géoarchéologie de la Loire moyenne et de ses marges)

(3) Hélène Vialles, Tours pas à pas: ses rues, ses monuments, ses hommes célèbres, Editions Horvath, 1985

(4) C. Taisne L’Etoile bleue, l’histoire de la dernière maison close de Tours, JCI

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