Grève chez Air France : un pilote tourangeau se confie

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Depuis 4 jours, le ciel n’est pas au beau fixe chez Air France. Le bras de fer entre les pilotes et la direction ne trouve pas d’issue pour le moment. La cause de ces tensions ? le développement de la filiale Transavia et le statut des pilotes de la compagnie « low cost » de la compagnie nationale. Un pilote tourangeau témoigne.

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La Compagnie Française souhaite vider le court et moyen-courrier au profit de Transavia

Jean K. (le nom a été changé) est pilote de ligne depuis une quinzaine d’années. Comme plus de 70 de ses collègues, il a fait le choix de vivre en Touraine. Ce sont, au total, plus de 300 « navigants », pilotes et membres du personnel commercial, qui sont venus s’installer à Tours et dans son agglomération. Tous suivent de très près les négociations en cours avec la Direction. Il faut dire que cela fait plus d’une quinzaine d’années que l’on avait vu un mouvement aussi dur chez Air France. Pour Jean, « La direction veut casser les contrats actuels des pilotes car ils datent des années 70-80. Nous sommes d’accord pour faire des efforts mais il ne faut pas que le siège ce foute de notre g… ». Jean est remonté et il a de quoi. En juin dernier, lors des assises des pilotes d’Air France, le top management d’Air France avait rappelé que rien ne bougerait pour Transavia.
Pourtant, il semble qu’aujourd’hui, la compagnie française souhaite vider le court et moyen courrier au profit de sa filiale « low cost » annoncée déjà comme très rentable. Pour beaucoup de pilotes, « ce n’est pas fair-play » dénonce Jean.

 

« Nous avons 15% de moins sur notre salaire depuis 3 ans »

Le modèle économique de l’aérien explique en partie la volonté d’Air France de miser sur sa filiale à bas coûts. La rentabilité affichée par les compagnies concurrentes « low cost » n’est plus à démontrer. « Aujourd’hui, plus de 40 % du marché court et moyen-courrier est détenu par les compagnies concurrentes comme EasyJet ou Ryanair*. Il y a de fausses idées reçues sur ces compagnies. Un pilote d’EasyJet est payé autant que nous mais il fait plus d’heures » rappelle Jean. D’après notre témoin, les pilotes d’Air France sont prêts à travailler plus mais, apparemment, sans changer de contrat de travail. Seulement voilà, les pilotes de la compagnie nationale sont en surnombre et il faut faire voler tout le monde. C’est donc une équation complexe qu’a à résoudre la compagnie. Pourtant d’après Jean, de nombreuses économies sont à réaliser, à commencer « par les escales et leur personnel qui sont trop nombreux comme en Corse. Tout ça pour faire plaisir à certains élus et créer de l’emploi sur l’île de Beauté ». Car l’Etat est encore actionnaire d’Air France à hauteur de 16%. Jean aurait souhaité que « l’on réforme Air France à la fin des années 90 ».

Les pilotes ont déjà consenti des efforts d’après Jean. « Nous avons 15% de moins sur notre salaire depuis 3 ans…! Et notre salaire n’est pas volé aux vu des responsabilités qui sont les nôtres ». Pourtant, il existe de grandes disparités dans la rémunération des pilotes d’Air France. Le système de paie dépend de la taille et de la série d’avion et non de l’ancienneté. Un Commandant de Bord d’A380, fleuron de la flotte, touche environ 200 000 € bruts par an alors qu’un co-pilote sur A320 ne touchera que 45 000 € brut par an. Il faut aussi patienter pour monter les échelons au sein de la compagnie alors que dans la filiale Transavia, le déroulement de carrière est plus rapide avec des montants de rémunérations pour les commandants de bord allant de 100 000 à 120 000 € brut par an. Il faut noter aussi que les pilotes de Transavia peuvent presque doubler leur salaire avec les heures supplémentaires alors que les pilotes d’Air France sont limités à 5 ou 6 heures de plus par mois.

Même si le mouvement est suivi à 60%, il ne faut pas se tromper. La question complexe des rémunérations des pilotes n’intéresse que la corporation, elle-même très divisée sur le sujet. Pour le quidam, plonger dans cette question revient à essayer de comprendre la tarification d’un billet d’avion. Quand on sait que l’ensemble de nos « voisins de sièges » ont tous payé un tarif très différent pour une même destination, il nous sera donc difficile de décrypter la feuille de paie d’un pilote. Un exercice auquel nous ne nous risquerons pas.

(*) La compagnie Irlandaise Ryanair est présente à l’aéroport de Tours et offre plusieurs destinations : Marseille, Londres et Dublin

Crédit photo : BriYYZ, photo sous creative commons

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