Éoliennes en Touraine : démarches interminables et toujours aucun projet prêt à sortir

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Entre recours de riverains ou d’associations, pressions d’entreprises voire de personnalités, la question des éoliennes en Indre-et-Loire nous garantit un feuilleton politique parmi les plus passionnés du département. Ce début 2024 ne déroge pas à la règle. Ambiance.

Vendredi 12 janvier un micro de TF1 est placé devant le visage du préfet d’Indre-et-Loire, sur la terrasse du château d’Amboise. Là, le représentant de l’Etat dans le département commente une expérience inédite à cette échelle : il est venu assister à une simulation d’installation d’éoliennes, pour voir si cela pouvait gâcher le panorama depuis le monument historique. Si le dossier intéresse nos confrères d’un média national c’est parce que l’enjeu est grand. Même l’animateur télé Stéphane Bern s’en est mêlé, interpellant Emmanuel Macron pour tenter de bénéficier de l’appui présidentiel pour faire annuler le projet.

Rappel des faits : comme 21 autres départements français, la Touraine ne dispose d’aucune éolienne. Un cas par ailleurs unique en Centre-Val de Loire. Pourtant, selon les promoteurs, le territoire dispose de plusieurs terrains favorables à l’installation de mâts pouvant produire de l’électricité grâce au vent. Le problème c’est qu’aucun dossier ne fait l’unanimité, et que soit la justice déboute les sociétés porteuses, soit elles finissent par se décourager face à l’extrême lenteur des procédures.

Il faut dire que les anti-éoliennes tourangeaux sont particulièrement bien organisés. Affublés de leurs arguments contre la dévalorisation des maisons ou, mieux, pour la protection d’espèces protégées comme les cigognes noires du Sud-Touraine, ils parviennent à convaincre nombre d’élus, de voisins et de magistrats. Ainsi, malgré des appuis de l’Etat, tous les projets proposés actuellement dans le sud du département sont au point mort, en phase de recours ou déboulonnés par la justice. Pour certains, des allers-retours judiciaires sont encore possibles mais une certitude demeure : il faudra encore attendre de très longs mois voire des années avant de voir pousser des éoliennes dans ce secteur. Si elles y apparaissent un jour.

Face au verrouillage du Sud-Touraine, les promoteurs de l’éolien tentent donc d’autres stratégies. A ce titre, le projet Oratorio d’Auzouer-en-Touraine est novateur. 4 mats d’environ 140m de haut sont prévus par la société Energex sur les hauteurs de l’Amboisie, afin de produire de l’électricité. Moins hauts que les éoliennes traditionnelles dépassant souvent les 200m, ils ont quelques arguments pour s’éviter de trop grosses polémiques. C’était donc sans compter sur Stéphane Bern, ardent défenseur du patrimoine historique dans ses émissions télé et très investi sur plusieurs dossiers en Centre-Val de Loire, où il réside en partie.

Avec le soutien de la Fondation dirigeant le Château d’Amboise, il a bénéficié de son appui médiatique pour pilonner le potentiel chantier Oratorio, estimant qu’on verrait les éoliennes depuis le château d’Amboise, la pagode de Chanteloup voire le château de Chaumont-sur-Loire… et que cela pourrait même entraîner le déclassement du Val de Loire du patrimoine mondial de l’UNESCO. Face à ces grands mots, et cette menace 23 ans après l’obtention du prestigieux label, la préfecture a été obligée de réagir. L’institution a donc suspendu l’accord qu’elle venait de donner à l’entreprise porteuse, le soumettant à une expertise visuelle.

C’est cette expérience qui a eu lieu ce vendredi 12 janvier. Un temps annoncé, Stéphane Bern n’était pas là mais la Fondation St Louis administrant Amboise, si, tout comme le préfet, les médias ou le comité indépendant chargé de rendre un rapport sur le dossier. Au total on comptait une cinquantaine de personnes. Par un temps gris et froid, toutes sont venues dans le seul but de scruter l’horizon. Là, 15km plus au nord, à la limité du secteur sauvegardé par l’UNESCO, deux ballons se sont élevés dans les airs à la hauteur prévue des éoliennes. L’enjeu : essayer de les voir depuis le belvédère.

Clairement, à l’œil nu, plusieurs observateurs estiment que c’était impossible malgré leurs bons yeux. Il fallait des jumelles pour distinguer les dirigeables, et encore en cherchant un peu. Le préfet a donc commenté qu’il n’y avait pas d’impact visuel, laissant la porte ouverte à une autorisation puisqu’on ne peut pas vraiment dire que les touristes seront ostensiblement gênés par les éoliennes, même par beau temps (on ne les verra pas vraiment sur les stories Instagram). Mais les opposants ne désarment pas car selon eux, le fait de les voir avec des jumelles est un argument suffisant.

On attend donc désormais la décision définitive du préfet tourangeau Patrice Latron qui pourrait intervenir courant février. Dans les deux cas, on sait qu’elle sera suivie d’une démarche en justice auprès du tribunal administratif. Puis, une fois la décision rendue, d’un autre recours en cour de cassation. On n’a pas fini d’entendre parler d’Oratorio. A ce titre, le rendez-vous censé pouvoir mettre tout le monde d’accord était, sans surprise, un échec annoncé.

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