En pleine crise du Covid, les vins de Chinon ont un nouveau président

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Cette année la vigne n’a pas gelé mais les viticulteurs n’ont pas été épargnés : les voici à devoir affronter la crise du coronavirus qui a privé les exploitations d’une bonne partie de leurs débouchés pendant de longues semaines. Comment s’en relever ? On en a discuté avec le nouveau président de l’AOC Chinon qui réunit 180 vignerons du département.

Fabrice Gasnier est installé à Cravant-les-Côteaux depuis 1993, dans un domaine de 30ha où il produit en majorité des vins rouges (et quelques blancs). C’est une affaire familiale depuis 4 générations et ce n’est pas près de s’arrêter : l’homme de 50 ans travaille non seulement avec sa femme Sandrine mais aussi avec son fils et sa belle-fille qui viennent de le rejoindre après une parenthèse voyage en Nouvelle Zélande. Au total, l’exploitation emploie 8 personnes en équivalent temps plein et jusqu’à 50 pour les vendanges. « Notre production est irrégulière, en moyenne 150 à 160 000 bouteilles par an » explique le professionnel qui exporte un tiers de son vin à l’étranger et en vend un autre tiers directement sur place. Le reste va chez les cavistes ou les restaurateurs.

Plusieurs domaines en difficulté

Ça, c’est pour les bonnes années. Mais 2020 s’annonce particulièrement atypique, en raison de l’irruption du coronavirus. Mi-mars, le confinement a quasiment paralysé le secteur viticole qui commence à peine à sortir de sa stupeur en ce début d’été. « Là, ça va mieux » répond Fabrice Gasnier quand on lui demande des nouvelles de sa trésorerie. Il faut dire qu’il revient de Tours où il a livré plusieurs restaurants qui ont rouvert leurs portes après deux mois et demi de fermeture forcée. La vente directe repart également timidement. Clairement, le Covid-19 a tout bousculé. Peut-être plus encore que les caprices de la météo.

« Je ne me suis jamais posé autant de questions que pendant le mois d’avril. C’est la première fois que j’ai eu autant de pression et de sueurs froides. D’habitude, on boit un coup et ça passe. Mais là, ça n’a pas suffi » raconte le vigneron encore sonné. Son domaine est solide, il devrait s’en relever en tapant dans ses réserves et en bénéficiant d’un prêt garanti par l’Etat. Mais pour d’autres ça risque d’être plus compliqué… Que faire ? « S’ils sont dans une panade financière importante, pas grand-chose. Mais on pourra les soutenir moralement, les aider à rencontrer les bons professionnels » répond l’homme tout juste porté à la présidence de l’AOC Chinon et qui en devient, de fait, la première voix pendant un mandat de trois ans.

Une vigne belle comme jamais

Ce poste, Fabrice Gasnier assure qu’il ne l’a pas réclamé. Ça semble tout de même une suite pas illogique au parcours d’un professionnel du vin déjà impliqué dans l’institution depuis 12 ans. Sa philosophie : « Je suis un terrien, j’aime le sol, le sous-sol, les vinerons. Les gens qui travaillent avec moi ce sont mes partenaires. » D’où cette phrase sur l’entraide pour affronter la crise d’aujourd’hui après plusieurs années de gel de printemps répété depuis 2016. « C’est vrai que ça ne pas être plus dramatique que maintenant » observe Mr le Président de l’AOC avant de nuancer son propos : « Quand on regarde les statistiques générales on a bien perdu deux mois de vente mais sur le global ce ne sera peut-être pas si catastrophique. » Autrement dit l’espoir d’un rebond après l’encéphalogramme plat.

D’autant que jusqu’à preuve du contraire (les spécialistes du vin vous diront qu’il ne faut jamais faire trop de plans sur la comète), 2020 pourrait être une année mémorable : « La vigne est magique, magnifique. Les grappes sont longues, aériennes. Les feuilles d’un très beau vert. Grâce au confinement on ne s’est jamais aussi bien occupés de nos parcelles. Voir ce résultat, psychologiquement, ça fait du bien » sourit Fabrice Gasnier. La quantité ne sera pas forcément exceptionnelle mais les fruits pourraient être d’une qualité plus que supérieure notamment grâce au printemps ensoleillé. Et si la météo suit sur sa lancée, on vendangera les blancs du Chinonais dès la 1ère semaine de septembre et les rouges à peine plus tard.

Transférer le surplus de vin en vinaigre ?

Certains vignerons se retrouvent dans la panade à cause du confinement : ils ne parviennent pas à stocker tout leur vin. Une alternative leur a été proposée : le distiller pour en faire du vinaigre. « C’est un choix qui appartient au vigneron » nous dit Fabrice Gasnier qui refuse de juger mais estime, à titre personnel, que c’est « dommage » : « Quand on fait des vins de caractère avec un vrai terroir, quand on sait l’énergie que ça demande pour faire 1kg de raisin, c’est inconcevable d’en arriver là. » Le président de l’AOC Chinon espère que le gouvernement et l’Europe iront plus loin pour soutenir la filière.

« On est des guerriers, on ne baisse pas les bras »

« Bien épaule » sur son domaine, Fabrice Gasnier va pouvoir s’en détacher un peu pour consacrer du temps à la présidence de l’appellation. Outre le coronavirus, il doit accompagner la mise en place des dernières recommandations du cahier des charges de l’INAO et accompagner la stratégie globale des vins de Chinon.

« Je ne vais rien inventer mais peut-être appuyer sur certains points » explique celui qui veut encore encourager la montée en gamme de l’appellation, par exemple en encourageant les professionnels d’un même secteur à afficher le nom de leurs lieux-dits sur les étiquettes pour faire « des marques communes ». Fabrice Gasnier prépare également une nouvelle édition des Vignerons dans la Ville à Chinon, un événement post-Covid qui sera l’un des premiers salons des vins de l’année. Rendez-vous fixé début août avant Vignes Vins Randos en septembre puis Les Nourritures Elémentaires à l’automne. « On est des guerriers et on ne baisse pas les bras » tonne le vigneron.

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