Ces dernières semaines, l’annonce de la fermeture du restaurant Charles Barrier avenue de la Tranchée à Tours a ému nombre de tourangelles et tourangeaux. Pour la fermeture de l’établissement bien sûr, tant celui-ci faisait partie depuis de nombreuses décennies du patrimoine culinaire ligérien, mais aussi, pour celui qui lui a donné son nom : le restaurateur Charles Barrier.
Bien que ce dernier puis sa famille n’avait plus de liens avec le restaurant portant son nom depuis 1996, année de sa vente, l’image de Charles Barrier ne pouvait être dissociée de l’établissement qu’il a dirigé pendant près de 40 ans, y obtenant la récompense suprême des 3 étoiles au guide Michelin, le seul encore à l’heure actuelle à l’avoir obtenue en Touraine et en région Centre-Val de Loire.
Des souvenirs, Catherine Barrier en a des tonnes. Fille de l’ancien restaurateur, celle qui dirige aujourd’hui une agence de conseil et de communication dans l’univers de la gastronomie, a battu le rappel suite à l’annonce de la fermeture du restaurant tourangeau. Désireuse de bien séparer le destin final de l’établissement à l’histoire de son père, Catherine Barrier a accepté de nous parler mais pour revenir sur la personnalité de celui qu’elle continue à appeler affectueusement « papa » dans n’importe quelle circonstance, y compris tout au long de l’interview.
Du restaurant en lui-même, Catherine Barrier n’en parlera que très peu pendant l’entretien, évoquant tout de même ses « pensées pour le personnel ». Du reste, elle tient surtout à remémorer pourquoi c’est la personnalité de son père qui a fait sa réputation. « C’était un vrai ambassadeur du Val de Loire, il fait partie de la trempe des chefs qui ne se sont jamais détournés de la terre, cela a toujours fait partie de sa vie. »
Né à Cinq Mars la Pile en 1916, issu d’une famille pauvre et paysanne, élevé par sa mère veuve, Charles Barrier aurait ainsi toujours gardé cette culture de la terre tout au long de sa vie. « Pour lui la cuisine venait forcément de la terre nourricière, cette dernière était la colonne vertébrale de sa cuisine et de la gastronomie. »
Catherine Barrier évoque ainsi une personne besogneuse, ayant repris l’ancienne auberge de la tête noire, renommée le Nègre, puis le restaurant Charles Barrier, en 1944. « A la fin de la guerre, il travaillait dans des baraquements et il était fier du retour des clients, c’était sa plus grande satisfaction, plus que les titres. » Meilleur Ouvrier de France en 1958, chef trois étoiles dix ans plus tard, les titres ont fait sa réputation pourtant, lui qui est connu pour avoir contribué au renouveau de la cuisine française aux côtés de Paul Bocuse entre autres. « Il était concentré sur son travail, à l’époque c’était un chef qui savait tout faire, qui faisait lui-même son pain, fumait son saumon, créait son chocolat… » raconte encore sa fille qui se fait témoin de l’histoire du restaurateur décédé en 2009, y compris dans son travail au sein de son agence : « J’aime travailler avec des chefs qui lui ressemblent. Je choisis mes collaborations en fonction des personnalités des chefs, j’aime ceux qui comme mon père, restent attachés à la terre et au terroir. »