Un plafond lumineux à l’entrée du bloc opératoire, un jeu pour la formation du personnel médical, un appareil de radiothérapie ou encore un robot dédié aux enfants isolés dans leurs chambres… Tous ces projets ont un point commun : celui d’avoir été financés via le fonds de dotation du CHU de Tours. Depuis 3 ans, cette division de l’hôpital a pour mission de récolter de l’argent pour améliorer la vie des patients ou des salariés. Pour comprendre comment ça marche on a longuement discuté avec Elodie Gaspard, devenue responsable mécénat au sein de l’institution après avoir occupé un poste similaire dans le milieu culturel.
Pourquoi fallait-il créer un fonds de dotation au CHU de Tours ?
Auparavant les initiatives solidaires en faveur de l’hôpital étaient essentiellement dirigées vers la pédiatrie ou la cancérologie. Nous recevions beaucoup de jouets ou du matériel mais très peu de dons financiers, parfois quelques legs. L’objectif initial était donc de structurer le mécénat pour l’ouvrir à d’autres services moins « sexy », moins grand public sur le papier, comme la psychiatrie. Ce type de structure n’est pas nouveau : la plupart des CHU se dotent ou se sont dotés de fonds de dotations afin d’avoir une traçabilité des dons, et une résonnance de communication supplémentaire. Cela permet aussi un développement plus rapide de certains projets dans cette grosse maison où les choses mettent souvent du temps à se mettre en place.
Comment ça marche ?
Parmi les agents, n’importe qui peut présenter son idée qu’elle en soit au stade de l’ébauche ou déjà consolidée. Deux fois par an, les porteurs de projets se présentent devant un comité d’orientation qui rassemble 12 personnes avec des membres du personnel de l’hôpital et des représentants des patients, du milieu des entreprises ou des associations. Nous avons un cahier des charges précis : uniquement des projets d’équipe (portés par plusieurs personnes d’un même service, voire plusieurs services associés) ; un aspect innovant (au sens général, pas forcément technologique) et que cela bénéficie directement aux patients ou aux agents.
Dans tous les cas, il s’agit d’initiatives qui n’ont pas de crédit hospitalier dédié. S’ils n’étaient financés par le fonds de dotation, ils ne verraient jamais le jour.
Au bout de trois ans, quel est le bilan ?
Avant la création du fonds de dotation, les gens qui voulaient faire des dons au CHU appelaient le standard sans trop savoir à qui s’adresser, ni vraiment ce qu’ils pouvaient faire. Désormais, ils sont redirigés vers nous et on essaie de dispatcher au mieux que ce soit pour les dons financiers mais aussi ceux de jouets dont on peut faire bénéficier plus de services. Par ailleurs, cela a créé une dynamique en interne : des services qui n’avaient pas forcément la culture du développement de projets ou du mécénat se sont engagés sur une première idée puis d’autres. C’est le cas notamment à l’EHPAD de l’Ermitage. Cela motive les équipes. En moyenne nous étudions 12 à 15 projets par session. Nous en avons déjà 3 qui seront présentés lors de la prochaine réunion prévue en mars.
Comment peut-on donner ?
Soit en ligne, soit par voie postale en utilisant – ou non – le formulaire téléchargeable sur le site. La plupart des dons se font par courrier : le fonds de dotation c’est un peu un Ulule version pigeon voyageur ! D’ailleurs nous avons essayé une fois de financer un projet via un financement participatif sur Internet mais ça ne nous a pas paru être une solution idéale car la quasi-totalité des dons proviennent du local, c’est-à-dire d’Indre-et-Loire. Je précise que l’ensemble de la procédure est contrôlé par un commissaire aux comptes et que lorsqu’on nous envoie de l’argent pour un projet en particulier nous sommes obligés de respecter ce choix.
Une fois qu’un projet est accepté, comment ça se passe ?
Il n’y a pas de limite de temps pour le financement : tout dépend de l’implication des porteurs et de leur capacité à communiquer autour de leur projet. Et puis une fois que l’on a trouvé l’argent, on passe à la phase de mise en œuvre en interne qui peut prendre du temps. Par exemple pour le plafond lumineux du bloc opératoire il a fallu faire les travaux le soir, en dehors des heures d’opération, et s’assurer que le matériel était compatible avec les exigences du milieu hospitalier. C’est plus facile s’il s’agit simplement d’acquérir un robot.
Parmi les 14 projets déjà financés et inaugurés :
- Un espace usagers dans le hall d’accueil de l’hôpital Bretonneau
- Des casques pour la pratique de l’hypnose au sein de l’unité cardiologie de Trousseau
- Un appareil de radiographie plus rapide (moins de 20 secondes) et émettant moins d’ondes pour mieux protéger les enfants
- Intervention d’un conteur-marionnettiste à Clocheville
- Développement d’un jeu de société pour former le personnel des urgences pédiatriques à la gestion d’une crise (grâce à des Playmobil ®)
Parmi les 6 projets à inaugurer d’ici 2020 :
- Une aire de jeu en pédopsychiatrie
- Des activités physiques pour les patients souffrant de douleurs chroniques
Parmi les 12 projets encore à financer :
- Développer l’écoute de musique pour les patients à Trousseau afin de les détendre
- Une meilleure formation en sécurité du personnel
- La mise en place d’une technique innovante pour soigner les cancers digestifs
Et qu’advient-il des projets refusés par la commission ?
Il peut y avoir plusieurs raisons. Soit ils ne rentrent pas dans le périmètre du fonds de dotation, soit le CHU se dit que c’est à lui de le prendre en charge directement ou alors s’il n’est pas assez abouti on demande à ce qu’i soit retravaillé en proposant notre aide pour trouver les éléments manquants.
Vous développez des projets pour un hôpital qui est amené à se transformer dans quelques années avec la construction du nouveau site de Trousseau (à Chambray) à l’horizon 2026. Comment préparez-vous cette échéance ? N’y a-t-il pas un risque que certaines initiatives soient obsolètes très peu de temps après leur inauguration ?
Le déménagement, on y pense pour tous les projets proposés. Ce qu’on ne sait pas c’est si des ce qui a été rendu possible uniquement par le fonds de dotation du CHU rentrera ou non dans les futurs standards hospitaliers. Prenons l’exemple des plafonds lumineux à l’entrée des blocs opératoires. C’est un plus reconnu pour le patient mais pour l’instant ces lignes n’existent pas dans les budgets hospitaliers. En revanche ce sera peut-être différent dans 6 ans. La question peut se poser.
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