14 juillet en Touraine : entre tradition et tentative de modernité

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Comment célébrer la fête nationale en 2023 ? Entre sécheresse, sécurité, inflation et écologie cela semble devenir un vrai casse-tête pour les mairies. Analyse de la situation en Indre-et-Loire.

« On est obligé de faire 45 minutes pour voir un grand feu d’artifice » commente une habitante de Tours ce vendredi soir. Bien installée devant la Forteresse Royale de Chinon, elle s’apprête à profiter du spectacle pyrotechnique offert annuellement par la ville. Un autre gros feu est programmé au même moment à Amboise. Et plusieurs autres dans des communes de moindre importance. Mais elle a raison : aucun événement du genre dans les grosses communes de Tours Métropole. Ceux de Joué et Chambray ont eu lieu la veille. Et Tours n’en organise pas.

Selon le maire chinonais Jean-Luc Dupont, ce sont entre 8 et 10 000 personnes qui étaient attendues ce 14 juillet en ville. De fait, la rive sud de la Vienne était noire de monde, avec de gros bouchons piétons pour traverser le pont après le bouquet final et une partie de la foule arrivée dès 19-20h pour un combo pique-nique / feu d’artifice. Le splendide panorama sur la Forteresse, la qualité du feu et l’absence d’événement similaire sur la Métropole ne sont pas les seules raisons de cette influence. « Plusieurs communes des environs ont dû renoncer à leur feu d’artifice à cause de la sécheresse » souligne l’élu auprès de 37 degrés.

C’est clairement le gros souci du moment pour les communes : en 2022, plusieurs d’entre elles ont dû annuler leur feu d’artifice du 14 juillet en dernière minute car le risque d’incendie était très fort. Une seule étincelle pouvait occasionner de gros dégâts à cause de la sécheresse record qui avait envahi le département. Et en 2023 rebelote. Même si la végétation est parfois verte, le manque d’eau est prégnant avec de nombreux secteurs en crise (leur liste s’est encore élargie ce samedi 15 juillet).

De plus en plus de feux d’artifice communs

Voilà donc pourquoi la liste des feux d’artifice d’été organisés en Indre-et-Loire a tendance à se raccourcir (Montlouis en proposera un quand même, mais pendant son marché de Noël). D’autres complexités existent. Par exemple, désormais, il faut 75m de distance entre le pas de tir et le public. Consigne donnée après l’accident mortel de Cholet en 2022 (2 victimes). A Chinon, application concrète : il a fallu interdire la quasi-totalité du Pont Aliénor d’Aquitaine à la foule pendant le spectacle et empêcher l’accès à la plage. Des villages qui n’ont pas de grand site pourraient avoir des difficultés à respecter ces consignes.

De plus il y a la question de l’inflation. A Chinon 18 minutes de feu d’artifice c’est 16 000€ : dans un contexte compliqué, une municipalité peut choisir de renoncer à ce spectacle pour prioriser d’autres actions. C’est notamment pour ça que certaines communes se regroupent afin de minimiser les coûts (exemple autour de Savigné-sur-Lathan et Hommes cet été mais aussi aux Bretonnières, où le spectacle a été payé par Joué-lès-Tours et Ballan-Miré ce qui était une première, malgré la différence de bord politique des deux maires).

Pas de feu d’artifice pour protéger les oiseaux ?

Et puis il y a la question de l’éthique. Doit-on encore proposer des feux d’artifice en 2023 ? Si on regarde par le prisme de l’affluence, la réponse est oui. Enormément de monde à Chinon, donc, mais aussi à Joué, Chambray, Amboise, Langeais, Rochecorbon… Sans doute une forte affluence à Veigné ce samedi soir. En revanche certains écologistes ne voient pas du tout la chose de la même manière.

A Tours, le Covid a empêché les feux d’artifice du 14 juillet pour 2020 et 2021. Mais en 2022 et 2023 c’est clairement l’argument écologique qui est avancé pour justifier l’absence d’un tel spectacle. La mairie ne veut pas effrayer les sternes avec le bruit car cela pourrait occasionner leur départ des îles de Loire, et condamner les bébés qui ne sont pas encore autonomes. Le sujet est d’ailleurs suivi au niveau préfectoral qui n’autorise plus qu’un seul feu d’artifice dans la zone protégée du fleuve, ce qui explique aussi la fin de l’événement que proposaient un temps La Riche et St-Cyr.

Quelles alternatives ?

C’est aussi l’argument avancé par la Ligue de Protection des Oiseaux qui demande la fin du feu d’artifice d’Amboise. Elle n’a pas eu gain de cause cette année… Peut-être que ce sera le cas en 2024 (une équipe de gauche écologiste ayant repris la ville en main).

Pas de feu d’artifice en bord de Loire à Tours, admettons. Mais la ville aurait-elle pu trouver un autre site ? Pourquoi pas le Lac de la Bergeonnerie ? L’Île Balzac ? La Gloriette ? Clairement, la municipalité fait le choix de la contre programmation avec la volonté de proposer des spectacles dans tous les quartiers pour le 14 juillet, et pas seulement en centre-ville (et après tout pourquoi pas). En 2022, elle a cédé à la mode des spectacles de drones, avec un ballet lumineux au-dessus de l’Île Balzac. Un show assez peu salué pour sa qualité. L’exercice n’a pas été renouvelé. A la place, c’est un spectacle d’acrobaties sous montgolfière qui a eu lieu au même endroit jeudi 13 juillet. Le scénario se voulant comique n’était pas des plus heureux mais la qualité visuelle indéniable. Il y avait du monde.

En revanche, le spectacle programmé jeudi soir Place Anatole France (et en photo ci-dessus) n’a attiré que quelques centaines de personnes. La coupure des transports à 22h pour cause de risque d’émeutes peut expliquer en partie ce manque d’intérêt mais on ne peut pas dire non plus que l’événement était incontournable. Ce sera donc le défi de Tours pour 2024 : proposer partout de vraies alternatives à un feu d’artifice pour que la fête nationale reste un grand événement populaire où la foule peut s’émerveiller gratuitement.

Crédits photos : Olivier Collet, Mathieu Giua et Roger Pichot

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