Charles Brunet, toujours sans filet

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C’est l’histoire d’un jeune homme qui n’a pas froid aux yeux mais calcule minutieusement chacune de ses folies. Depuis 15 ans, le Tourangeau Charles Brunet est un adepte du Parkour, cette discipline consistant à se déplacer en ville de manière impressionnante, en utilisant les bâtiments ou le mobilier urbain. Un sport où l’on recherche la performance mais pas la compétition.

La première règle du Parkour, c’est la discipline. Toujours s’échauffer. Ne pas se lancer dans l’inconnu sans s’être préparé. Si Charles Brunet est aujourd’hui capable de sauter entre deux immeubles ou d’escalader un pont, c’est parce qu’il a minutieusement gravi les étapes. Elles sont bien loin ses premières péripéties, ses « singeries » comme il les appelle : « j’avais 12 ans quand j’ai commencé à voir les premières vidéos sur le net. On faisait déjà des cascades en forêt avec mes amis d’enfance, on sautait d’arbre en arbre. Puis on est passé de la forêt à la zone commerciale de Chambray. On était pas loin d’un magasin de meubles et on utilisait les tapis qu’on retrouvait dans leurs bennes. On s’en est servi pour faire nos premiers saltos. »

Une fois ces bases maîtrisés, Charles et ses potes franchissent leur première étape et s’exercent sur le parking surélevé d’Auchan. « Après ça, on n’a plus jamais arrêté. » A force de parcourir les différents spots urbains de l’agglo, les ados rencontrent d’autres adeptes de Joué ou Mettray et finissent par se rassembler officiellement en 2004 au sein de l’association Gravité Zéro. C’est aussi à ce moment-là qu’ils diffusent leurs premières vidéos sur YouTube.

De Gravité Zéro à la West Coast Family

Le Parkour est une grande famille. Désireux de progresser et de faire de nouvelles rencontres et expériences, Charles Brunet s’investit à fond pour développer la discipline à Tours et dans le Grand Ouest de la France. Un projet qui se concrétise notamment suite à la rencontre du Lavalois Thomas Dudoué qui participe au premier Parkour Day tourangeau avec une vingtaine de traceurs. « Thomas avait déjà un niveau mondial à ce moment-là. Il nous a donné des conseils pour mieux bouger et cela nous a permis d’évoluer très vite. » Juste après, les rencontres et déplacements se multiplient ce qui finit par entraîner, en 2007, la création de la West Coast Family qui rassemble aujourd’hui 13 traceurs de Tours, Angers, Rennes, Laval, Nantes ou St Malô, âgés de 20 à 29 ans.

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Charles Brunet le 9 octobre 2017

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Crédit : Pascal Montagne

La team prend vite de l’ampleur. En Touraine, elle dispose d’une salle dès 2010 à Joué-lès-Tours, « une commune qui nous a toujours soutenus » et se rassemble donc chaque dimanche après-midi à la Vallée Violette, sur des agrès de gymnastique. A force de passer du temps à faire l’acrobate sur le bitume, Charles Brunet s’est lassé de sa vie professionnelle de technicien en bureau d’études et a envisagé de faire de sa passion un métier. C’est chose faite de manière très concrète depuis ce mois d’octobre 2017.

De la West Coast Family à la West Coast Academy

Aux Ateliers de la Morinerie de St-Pierre-des-Corps, on a l’habitude de rencontrer des artistes. Désormais, on y croisera aussi des sportifs de haut niveau. C’est là, dans un hangar de 400m² situé au fond des bâtiments, que Charles Brunet a installé sa deuxième maison depuis quelques semaines à raison de 50h de présence hebdomadaires. Au moment de notre visite, le Soleil de l’après-midi rentre en biais par les fenêtres et apporte un peu de chaleur bienvenue dans cet endroit mal isolé qui a un besoin urgent de travaux pour pouvoir s’entraîner au chaud une fois l’hiver arrivé. Mais ce n’était pas le chantier le plus important. La première chose que Charles a monté ici ce sont des blocs de bois de hauteurs variables pour créer un parcours d’entraînement au Parkour et dispenser ses cours tout au long de la semaine.

« Nous avons 240 adhérents de 10 à 30 ans répartis sur 11 créneaux, tous les cours ont affiché complet en deux jours » s’enthousiasme le professeur qui comptait « seulement » 60 adeptes quand il a commencé l’enseignement. « Aujourd’hui, on refuse gavé de monde. » Une ascension qui n’a pas été simple, devant la difficulté à trouver des salles et des mairies ouvertes : « l’an dernier on cherchait absolument de nouveaux créneaux et on a eu des refus de La Riche et St-Pierre-des-Corps. Les clubs de gymnastique avaient la main mise partout. On a quand même fini par avoir un petit créneau sur Tours grâce au père d’un des enfants qui suit les cours. Face à ces difficultés, j’ai commencé à réfléchir à ouvrir un Parkour Park et j’ai trouvé ce local à la Morinerie baptisé la West Coast Academy. »

« A chaque technique de franchissement correspond une technique pour rater. »

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Photo : Pascal Montagne

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Photo : Pascal Montagne

En plus d’offrir un toit pérenne à l’activité professionnelle naissante de Charles Brunet, ce Parkour Park (qui sera en partie édifié via un financement participatif) est aussi un bon moyen d’encadrer la pratique tourangelle de la discipline, selon le jeune homme. « Quand St-Pierre-des-Corps nous a refusé une salle en 2016, 6 mois après un gamin a failli se tuer. Énormément de jeunes pratiquent. Ils reproduisent ce qu’ils voient sur le net. Et c’est une occupation sportive comme une autre » plaide le traceur autodidacte. « On a l’image d’un sport un peu fou mais nous ne sommes pas comme ça. Il faut parfois dix ans de préparation avant de faire un saut comme pour le film Banlieue 13. On ne saute pas d’un immeuble à l’autre comme ça. Il ne faut pas être fou : si tu ne réfléchis pas avant de sauter, tu as des chances d’avoir des problèmes. » En 15 ans de pratique, les seuls que Charles revendiquent sont 2 entorses et une main ouverte.

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Photo : Pascal Montagne

Bien gérer le Parkour, c’est donc tout un processus : « très important d’abord, le renforcement musculaire. C’est essentiel pour sauter longtemps et ne pas se détruire le corps. Il faut se muscler pour sauter, atterrir. Ce sont les muscles qui amortissent les chocs, pas les articulations. Il faut aussi savoir accompagner sa chute. A chaque technique de franchissement correspond une technique pour rater si l’on est trop court ou trop long. On apprend par exemple les techniques de judo, à décaler les pieds. Et après la séance, les étirements sont très importants pour détendre le muscle, qu’il garde sa souplesse, son explosivité et son agilité. » En suivant ces règles, Charles Brunet affirme que l’on peut commencer à s’entraîner en extérieur à partir de deux mois d’entraînement.

Des projets plein dans la tête et dans les jambes

On l’a compris, Charles Brunet est un hyperactif qui dédie aujourd’hui toute sa vie au développement de son entreprise et du Parkour en général. Solide sur YouTube (60 000 abonnés !), il y présente les vidéos de ses performances de Tours à Barcelone en passant par Royan et Cholet. Il travaille aussi sur la sortie d’un documentaire tourné au printemps dernier à Marrakech. Avec Gravité Zéro, il est parti au Maroc pendant 10 jours pour organiser des entraînements sur place : « là-bas on a découvert plein d’endroits » se souvient-il des étoiles dans la tête. « On a organisé des cours dans un orphelinat, et une grosse journée avec 300 personnes. Cela nous a permis de partager avec plein de monde. J’en ai ramené 160 Gigas de données. » Et il repartira peut-être l’an prochain. Un projet parmi d’autres, puisque l’éducateur sportif-vidéaste vient aussi de lancer la commercialisation de vêtements désignés par Pierrick, un voisin de la Morinerie. Il ambitionne encore d’accueillir des Youtubeurs dans sa salle. Bref, Charles Brunet saute toujours plus loin, le regard droit, mais le cœur léger.

Un degré en plus : La page Facebook Parkour 37

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