Une semaine après l’élection de Frédéric Augis comme président et le départ de la « gauche Denis » en pleine séance du conseil métropolitain, Tours Métropole est toujours dans l’impasse avec une crise profonde entre la ville centre et son maire Emmanuel Denis et le nouvel exécutif intercommunal autour de son homologue jocondien.
C’était une réunion plus pour la forme, afin de ne pas rompre le dialogue, plutôt qu’une recherche de consensus. Vendredi matin, Emmanuel Denis, le maire de Tours, accompagné de Thierry Chailloux, maire de Ballan-Miré et Patrick Lefrançois, maire de Notre-Dame d’Oé, tous trois maires de gauche en rupture avec la nouvelle gouvernance métropolitaine, ont été reçus par Frédéric Augis, nouveau président de l’intercommunalité, Maria Lépine, 1ere vice-présidente et maire de Villandry et Patricia Suard, maire de Saint-Genouph et 6e vice-présidente métropolitaine. Une réunion qui faisait suite au départ de 37 élus de gauche du conseil métropolitain le dimanche précédent et l’annonce d’une volonté de ces élus de ne pas siéger dans l’exécutif.
Ces derniers ont vécu comme un affront la nouvelle gouvernance proposée et mise en place par Frédéric Augis, notamment la place laissée à la majorité de la ville de Tours : seulement trois vice-présidences contre huit précédemment, ainsi que deux places dans le bureau. Un affront pour la ville-centre et un « hold-up démocratique » selon Emmanuel Denis, au regard des résultats des élections municipales l’an dernier mais aussi au regard des dernières élections départementales et régionales où la gauche a réalisé de bons scores sur Tours et l’agglomération.
« Je ne cherche pas l’affront mais une majorité stable pour diriger la métropole » se défend Frédéric Augis face aux accusations de son homologue tourangeau. « Nous représentons 45% des suffrages, nous devons donc avoir autant de représentativité » rétorque le maire de Tours qui regrette la fin de la cogestion métropolitaine et la tournure plus politicienne de la nouvelle gouvernance. Parmi les choses qui ne passent pas pour Emmanuel Denis, le fait que Frédéric Augis a choisi deux membres de l’opposition municipale de Tours, Thibault Coulon et Benoist Pierre, comme vice-présidents. « Le retrait des deux vice-présidences accordées à la minorité municipale sont la première condition pour que l’on revienne autour de la table » affirme ainsi le maire de Tours à l’issue de la réunion de vendredi dernier.
Celle-ci n’a pas fait bouger les lignes, chacun ayant campé sur ses positions. Du côté de Frédéric Augis, les choses sont claires : « Il y a un exécutif qui a été élu légitimement dimanche dernier, je ne vais pas commencer à retirer des postes. Il ne fallait pas partir de la séance. »
Quid des projets pour le territoire ?
Derrière cette crise politique, se pose forcément l’avancée des projets, aussi bien ceux de la ville-centre que ceux portés par la Métropole. Le blocage politique risque d’être un frein c’est une évidence. Pourtant, Emmanuel Denis comme Frédéric Augis préfèrent aujourd’hui relativiser sur ce blocage. « Mon discours reste le même et je le redis avec sincérité : partageons les projets pour le territoire, c’est pourquoi ma porte reste ouverte. » nous affirme Frédéric Augis qui poursuit : « La ville de Tours et la Métropole sont interdépendants, nous ne pouvons fonctionner que les uns avec les autres. »
Les deux hommes se rejoignent notamment sur l’importance du projet du tramway, le gros projet annoncé du mandat. « La ville de Tours sera au cœur de ce projet important » réagit Emmanuel Denis quand on aborde ce thème. En revanche pour le reste, le maire de Tours montre moins d’entrain au projet métropolitain.
« Une métropole ne peut se construire contre sa ville-centre, ni sans elle. La métropole des maires comme l’appelle Frédéric Augis, c’est une régression terrible pour le territoire puisque l’on revient à un fonctionnement en communauté de communes » poursuit Emmanuel Denis qui reconnaît réfléchir à démutualiser certains services afin de mener sa politique au niveau du territoire de la ville de Tours : « Nous sommes en train de regarder tout cela et voir ce qu’il est possible de faire. C’est dommage mais nous mènerons nos projets comme le projet alimentaire au niveau communal. » En clair, face à la crainte de voir certains projets bloqués, le maire de Tours va se recentrer sur la ville-centre.
Une crise aux répercussions nombreuses…
Cette crise est ainsi un véritable frein au développement de l’intercommunalité, lancée il y a 20 ans maintenant. Une crise qui montre les limites également d’une structure qui a pris de plus en plus d’importance avec de nombreuses compétences majeures (voirie, mobilités, déchets, eau, développement économique…), mais dont la représentativité indirecte avec une élection d’élus à partir des listes municipales, rend le fonctionnement peu transparent pour les habitants et incite justement aux arrangements internes renforçant le manque de clarté démocratique. Bien sûr, ceci n’est ni la faute d’Emmanuel Denis, ni celle de Frédéric Augis, mais la crise actuelle en est la conséquence directe et le symbole de ces limites.
Une crise qui a des conséquences également sur plusieurs exécutifs municipaux. A La Riche, l’élue métropolitaine Armelle Audin (proche EELV), fait ainsi partie des 37 élus en rupture avec la nouvelle gouvernance, tandis que son maire divers-gauche Wilfried Schwartz a récupéré la vice-présidence aux mobilités et se trouve donc dans un exécutif très marqué à droite. Un Rubicon de franchi pour certains élus larichois comme ceux membres du PCF qui se désolidarisent de l’équipe dirigée par Wilfried Schwartz. Les deux élus écologistes devraient emboiter le pas également…
Une situation que l’on retrouve également à Chambray. Si pour l’heure, le maire Christian Gatard (divers gauche) et son premier adjoint Didier Vallée (EELV) restent sur une ligne commune au niveau de la commune, le premier a été réélu vice-président aux finances, tandis que le second fait partie des élus en rupture avec l’exécutif métropolitain. Tout sauf simple et clair pour les électeurs…