L’annonce d’Eric Ciotti, président du Parti Les Républicains, de vouloir ouvrir la voie à une alliance avec le Rassemblement National pour les élections Législatives anticipées du 30 juin et 07 juillet prochains, créent des remous à droite.
La stratégie du chaos d’Emmanuel Macron
Si Emmanuel Macron cherchait à dynamiter un peu plus l’échiquier politique en annonçant la dissolution de l’Assemblée Nationale, au soir des élections Européennes qui ont vu arriver le Rassemblement National largement en tête, on peut dire que c’est réussi. Adepte du grand chamboule tout depuis son arrivée express en politique en 2017, Emmanuel Macron a toujours cherché à affaiblir la gauche social-démocrate et la droite républicaine pour constituer une grande force politique centriste. Cette stratégie s’était avérée payante en 2017 lors de sa première élection, mais pour beaucoup, ce pari était néanmoins risqué.
Sur 37 degrés nous expliquions à l’époque que face au désaveu des citoyens envers les traditionnels grands partis de pouvoirs qu’étaient le PS et ses alliés d’un côté et les Républicains et les leurs de l’autre côté, le Macronisme portait alors un espoir nouveau face à la montée similaire de l’extrême-droite, devenue de plus en plus fréquentable pour une partie de l’électorat. Dans le même temps, comme d’autres, nous mettions en garde contre d’éventuelles nouvelles chimères politiques qui seraient désastreuses pour la suite. « Elu avec une certaine inquiétude et défiance d’une partie de la population, Emmanuel Macron va devoir convaincre et ne pas décevoir en évitant de retomber dans les travers qui ont éjecté les deux grands partis de gouvernement que sont le PS et les Républicains » écrivions-nous ainsi en mai 2017.
7 ans plus tard, nous ne pouvons que constater que malheureusement, le Macronisme version LREM 2017 puis Renaissance à partir de 2022 a failli à sa mission et n’a pas su convaincre. L’échec cinglant des Elections Européennes de dimanche dernier a même entrainé un coup de poker de la part du Président de la République qui non seulement a pris tout le monde de court, mais peut s’avérer périlleux.
Car oui le Rassemblement National, déjà historiquement haut en 2022, est aujourd’hui en position de force, et l’espoir d’un sursaut républicain voulu par le Président de la République, ne pourrait devenir qu’un vœu pieu. Déjà ses adversaires l’accusent de jouer sur les peurs et de contribuer à cette montée d’une extrême-droite plus que jamais proche à prendre le pouvoir.
Un sursaut républicain à droite face aux déclarations d’Eric Ciotti ?
Le monde politique est déboussolé et la déclaration d’Eric Ciotti ce mardi 11 juin sur une éventuelle alliance LR-RN en est une nouvelle preuve. « Nous avons besoin d’une alliance, en restant nous-mêmes, avec le Rassemblement national et avec ses candidats » a-t-il déclaré envers et contre les cadres de son parti qui pour beaucoup ont dénoncé une prise d’initiative personnelle de la part d’Eric Ciotti, tout en se désolidarisant des propos de leur président de parti.
Le malaise est ancré à droite. Il ne date pas d’aujourd’hui, mais n’a jamais été aussi fort. En local, les premières réactions sont également tombées rapidement. Du côté de la section de Tours des LR, Marion Nicolay-Cabanne, élue de la ville de Tours, se dit ainsi « inquiète des résultats de dimanche ».
« On est dans une démocratie malade car on a tué les partis modérés et laissé monter les extrêmes » déclare-t-elle. Quant aux propos d’Eric Ciotti, l’élue de la ville de Tours s’en désolidarise, se rassemblant plutôt dans ceux d’Olivier Marleix, jusqu’ici patron des Républicains à l’Assemblée Nationale qui s’est désolidarisé également d’Eric Ciotti comme d’autres cadres du parti de droite : de Valérie Pécresse à Laurent Wauquiez en passant par Xavier Bertrand ou encore Gérard Larcher…
Pour le Sénateur LR d’Indre-et-Loire, Jean-Gérard Paumier, la réponse est également cinglante : “En acceptant un accord avec le RN pour les élections législatives, le Président LR Éric Ciotti s’est disqualifié. Comme le Président LR du Sénat, Gérard Larcher « je n’avaliserai jamais, sous aucun prétexte, un accord de LR avec le RN contraire à l’intérêt de la France et à notre Histoire ». Comme lui aussi, j’estime qu’Éric Ciotti ne peut plus présider LR et j’appelle à sa démission ainsi qu’à une réunion urgente des instances dirigeantes de LR pour rejeter toute alliance avec le RN. A défaut, je quitterai sans délai et sans regret mais avec tristesse LR, le parti héritier de Jacques Chirac, adversaire résolu du FN, parti LR qui ne peut pas pour moi devenir l’allié et le supplétif du RN” déclare ainsi l’ancien président du Conseil Départemental.
La crise chez les LR est bien là, Jérôme Tebaldi, le délégué du parti sur la ville de Tours, explique de son côté : « J’ai été surpris de la déclaration d’Eric Ciotti car cela a été fait de manière complètement indépendante, les militants n’ont pas été du tout concertés. Je ne suis pas solidaire de cette démarche, d’autant plus qu’elle est très lourde de sens. »
Même désaveu du côté de Frédéric Augis qui bien que plus inscrit au sein du parti Les Républicains, reste une personnalité de droite de premier rang en Indre-et-Loire du fait de son statut de président de Tours Métropole. Condamnant la stratégie de Ciotti, il nous déclare : « Nous sommes la droite républicaine, nous sommes les héritiers du Général de Gaulle, de Georges Pompidou, de Jacques Chirac, nous sommes les héritiers du discours du 18 juin, du discours sur la rafle du Vel d’Hiv. Nous sommes de ceux qui prônent les valeurs de liberté, du libéralisme, de la non-intervention de l’Etat dans l’économie, de la propriété privée et de la sécurité. Jamais nous ne devons, nous compromettre, au contraire, soyons fiers de nos valeurs. »
Dans les prochaines heures et prochains jours, de nouvelles déclarations vont se faire, les candidats seront connus, tout le monde va repartir en campagne. En espérant que ce ne soit pas le Waterloo de l’esprit républicain…