En Touraine, « pas une semaine sans des cas d’agressions de maires »

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Ce mercredi 29 novembre se tenait le 77e congrès des maires d’Indre-et-Loire au Palais des Congrès Vinci de Tours. Organisé par l’Association des Maires d’Indre-et-Loire, l’événement a rassemblé près de 2 000 personnes, une affluence record selon son président Cédric de Oliveira – par ailleurs maire de Fondettes. Malgré l’absence de l’ancien président François Hollande, parti aux obsèques de l’ancien maire de Lyon Gérard Collomb, la journée a été rythmée par la présence de plusieurs personnalités dont une ministre et la défenseure des droits Claire Hédon. Parmi les grands sujets de la réunion : la violence envers les élus. Un fait d’actualité national qui touche particulièrement la Touraine.

Le préfet d’Indre-et-Loire Patrice Latron a attendu le milieu de son discours pour aborder le sujet mais il a eu des mots forts : « Je ne puis tolérer (les agressions subies par les maires) » a tonné le représentant de l’Etat, en poste dans le département depuis début 2023. Il faut dire que les cas se multiplient. Le plus retentissant ? L’agression du maire de St-Pierre-des-Corps Emmanuel François qui a vu sa voiture fracassée sous ses yeux lors des émeutes urbaines de la fin juin. La plus récente ? Celle de la maire de Château-Renault Brigitte Dupuis (l’auteur présumé a été interpellé peu après).

Entre les deux : une litanie de faits, envers les édiles mais aussi contre des adjoints. On peut citer par exemple le cas du maire de Savigné-sur-Lathan dont la voiture a été sabotée il y a quelques jours ; les dégradations à plusieurs reprises aux domiciles d’élus corpopétrussiens ou encore le maire de Luynes agressé en pleine rue parce qu’il réprimandait un administré qui ne tenait pas son chien en laisse. « Il ne se passe pas une semaine sans que des cas remontent à l’Association des Maires » s’alarme son président Cédric de Oliveira, lui-même pris à partie récemment par un homme qui a appuyé un poing sur son torse.

De nombreux maires ne portent pas plainte

« En 2022 nous avons fait un sondage : 42% des maires disaient avoir déjà été agressés et 71% déclaraient ne pas avoir porté plainte » ajoute le maire de Fondettes. Un chiffre qui reflète, selon lui, une certaine passivité des forces de l’ordre tourangelles. Pour le maire de Luynes, il explique ainsi que le suspect « a été convoqué mais il n’y a pas eu de réponse immédiate de la justice ». Bertrand Ritouret avait déjà été pris pour cible par des gens du voyage en 2018 et, là encore, il n’y avait pas eu de suite. Pour son propre cas, l’élu de 36 ans explique que l’homme qu’il accuse a été convoqué par les gendarmes mais « même pas mis en garde à vue, et relâché ».

Tous ces exemples sont de nature à préoccuper le représentant des maires tourangeaux qui redoute qu’un sentiment d’impunité s’installe dans la population, alors même que la défiance envers les politiques est un sentiment en progression, y compris auprès des maires, pourtant les élus les plus appréciés du pays.

« C’est facile de s’attaquer aux maires car nous sommes en première ligne » déplore Cédric de Oliveira qui estime que lui et ses collègues n’ont « jamais passé autant de temps à expliquer l’importance du vivre-ensemble ». Et selon lui la situation risque d’aggraver le manque de vocations pour devenir maire : on assiste en ce moment à un nombre de démissions inédit en cours de mandats au niveau national et, en 2022, plus d’un tiers des maires du département disait déjà ne pas vouloir se porter de nouveau candidat en 2026 (essentiellement dans le rural).

La violence n’explique pas tout. Il y a aussi le fouillis administratif, le manque de secrétaires de mairie qui obligent les élus à gérer plus de tâches ou encore les réductions budgétaires. Mais le risque d’agression fait indéniablement partie des repoussoirs. Pour que ça avance, Cédric de Oliveira se pose donc « sérieusement » la question de dénoncer publiquement chaque nouvelle agression via l’Association des Maires. Histoire de lui apporter un certain écho médiatique ou populaire via les réseaux sociaux. Et s’il souligne des avancées comme la nomination d’un référent pour les élus au sein du parquet de Tours, le maire de Fondettes espère plus des institutions compétentes. « On attend des résultats » plaide-t-il ardemment.

En face, le préfet d’Indre-et-Loire n’a pas la même vision des choses. Patrice Latron a défendu son point de vue à la tribune du Vinci et devant une salle qu’on a rarement vue aussi remplie pour cet événement. « J’ai donné des consignes pour qu’il y ait une grande vigilance des forces de l’ordre sur ce sujet et elles sont appliquées » a-t-il assuré, annonçant au passage la distribution d’un « kit » aux élus avec les contacts utiles en cas de problème mais aussi de 4 sessions de formations à faire descendre la pression lors d’un conflit : préparés par les équipes du Raid et du GIGN, les cours seront dispensés aux volontaires dans les premiers mois de 2024.

L’éternelle question des gens du voyage

Au passage, Patrice Latron a rappelé des consignes de prudence aux maires, comme de ne pas aller au-devant de gens du voyages installés illégalement sur un terrain sans être accompagnés des gendarmes. Une passerelle lui permettant de refaire un point sur cette question sensible, évoquée chaque année dans l’enceinte du Palais des Congrès. Il a précisé qu’il avait ordonné une demi-douzaine d’évacuations de campements par la force cette année et qu’il était prêt à recourir à ce dispositif chaque fois que nécessaire… mais seulement pour les communes en règle avec la loi, c’est-à-dire qui ont suffisamment d’accueils légaux. Un moyen de mettre discrètement la pression sur les récalcitrants.

Dans ce domaine, les choses pourraient bouger dans les prochains mois : un comité départemental autour des gens du voyage s’est tenu ce 28 novembre et c’était le premier… depuis 4 ans. La préfecture y a obtenu que la dernière communauté de communes hors des clous prenne l’engagement de respecter les textes le plus rapidement possible. Il faudrait aussi davantage de terrains à dimension familiale a souligné le préfet qui estime que globalement l’Indre-et-Loire « manque de capacités de médiation » sur cette question. Néanmoins, les élus s’accordent globalement à saluer l’action du représentant de l’Etat jugé à l’écoute, même si Cédric de Oliveira estime qu’il pourrait être « encore plus ferme » pour les gens du voyage.

Des mesures pour la ruralité

Le président de l’Association des Maires attend aussi de la préfecture un soutien sur la mise en application concrète de la loi qui restreint les possibilités de construire sur des zones encore non artificielles. Sur ce thème, Patrice Latron n’a pas trop voulu s’engager, plaidant pour « la priorité au renouvellement urbain sur les friches ou la rénovation de logements ». En revanche, il est prêt à des dérogations pour la règle qui exige des panneaux solaires sur les toits des nouveaux bâtiments ou de ceux touchés par de grosses rénovations, ainsi que pour les parkings. Il a annoncé en prime que la simulation de présence d’éoliennes à Auzouer-en-Touraine serait réalisée dans les tous prochains jours pour voir si ce projet contesté porte vraiment préjudice au château d’Amboise qui s’y oppose.

Enfin, il a dévoilé qu’une 29e Maison France Services allait ouvrir à Chinon en 2024 et qu’un projet de Médicobus était en cours pour tenter de palier à certains problèmes de déserts médicaux.

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