Installé entre Faye-la-Vineuse et Richelieu, dans le Chinonais, Julien des Montiers a débuté cette semaine l’installation d’une exposition monumentale à tous points de vue : Dehors, Dedans, sur les murs et dans les salles du Château de Chambord, monument le plus visité de la région Centre-Val de Loire et 2e château le plus fréquenté de France après Versailles. Une vitrine exceptionnelle pour l’artiste.
On a rencontré Julien des Montiers en fin d’année 2023 lors d’un déjeuner au Centre de Création Contemporaine Olivier Debré de Tours. Ce jour-là, l’artiste annonçait sa participation au festival Artchipels de la région Centre-Val de Loire, soit un programme de diffusion d’œuvres contemporaines sur le territoire régional, notamment en zone rurale. A cette occasion, le peintre nous avait annoncé à la fois l’ouverture au public de son atelier ridellois… et une prochaine exposition dans le cadre prestigieux du Château de Chambord.
La première étape a été un succès. La seconde se prépare.
On rappelle Julien des Montiers ce mardi 14 mai alors qu’il arrive tout juste dans le grand monument loir-et-chérien, après une route sous une pluie diluvienne. Le programme de sa journée va consister à installer les œuvres qui seront officiellement présentées au public à partir du 26 mai, et jusqu’au 3 novembre 2024. Soit un peu plus de 5 mois d’accrochage… Une visibilité plus que prestigieuse car en plein milieu de la haute saison, avec potentiellement des journées dépassant les 10 000 visites.
« Je suis pressé » reconnait l’artiste de 41 ans, originaire de Limoges et représenté depuis 2016 par la prestigieuse galerie franco-belge de Christophe Gaillard. Déjà présenté en collectif dans des lieux prestigieux comme le Palais de Tokyo de Paris, son travail s’offre aujourd’hui un nouveau cadre idyllique mais seul. Et Chambord le voulait clairement lui. « Avec Julien des Monstiers, c’est l’un des peintres les plus doués de sa (jeune) génération que le Domaine national de Chambord invite à exposer » écrit le directeur général du Domaine Pierre Dubreuil dans le dossier de presse de l’événement.
Un projet qui a mis un peu plus d’un an à se concrétiser. « J’ai été contacté débits mars 2023, j’ai commencé à réfléchir aux œuvres avant l’été et j’ai commencé à travailler dessus à la rentrée » rembobine Julien des Montiers. « Une grosse course de fond »d’autant plus qu’il concevait en parallèle une exposition cannoise, finalement pensée comme un complément du projet Chambord pour celles et ceux qui auront – peut-être – l’opportunité de voir les deux.
« C’est assez court un an de production » commente encore l’artiste, qui a donc dû faire un mix entre de nouvelles œuvres et une partie en rétrospective. « Je n’ai eu aucune limite de Chambord » insiste-t-il au passage en louant le prestige d’avoir pensé des œuvres pour des murs de pierre alors que bien souvent aujourd’hui son travail est accroché sur des surfaces blanches plus impersonnelles. Cela dit il a l’habitude des lieux qui sortent de l’ordinaire.
Diplômé des Beaux-Arts de Paris en 2018, le Limougeaud d’origine a commencé sa carrière en région parisienne en s’installant notamment dans un squat avant de rejoindre un atelier au Pré-St-Gervais. S’il a dessiné très vite quand il était enfant, il n’est pas issu d’une famille d’artistes. « Ma mère infirmière s’est mise à la peinture en même temps que moi » résume-t-il. Quant à l’histoire de l’art, « je l’ai découverte au cours de ma formation, j’ai tout appris dans le désordre. » Néanmoins, il a tout de suite su que la peinture ce serait son « truc » :
« Au départ j’étais persuadé que je ferai de la BD, j’ai épuise des pages de carnet et des crayons pendant des années puis j’ai commencé à peindre et ça s’est affirmé au fur et à mesure des années. J’ai pris un plaisir fou. »
Dans ses productions, il y a du classique, du contemporain, de l’abstrait. Et ça se retrouve à Chambord. « Julien des Monstiers adopte des formes et des gestes empruntés aux grands récits, mais aussi à l’histoire de ses motifs : scènes de chasse, décors floraux, tapisseries, avec une certaine prédilection pour les scènes animalières » dit le dossier de présentation de l’exposition Dehors, dedans, dont le titre fait écho au fait qu’un séjour à Chambord nécessite d’entrer et sortir constamment (dans les jardins, sur les terrasses…).
Le parcours de visite en lui-même évoque le mouvement, puisque les œuvres sont réparties autour du fameux escalier à double révolution, dans les voûtes à caissons et dans les salles adjacentes du second étage. Le clou du spectacle sera une installation de 140m² avec des dalles de lino peintes, faisant écho aux parquets ou aux azulejos portugais. Un sol auquel s’ajoute une frise de 45m déployée à 360°, en référence « aux tapis de couleurs que l’on voit souvent dans les châteaux » explicite Julien des Montiers. De quoi simuler une vue de la campagne à l’infini, celle que l’on voit aussi depuis le sommet du monument de la Renaissance donnant sur un immense domaine forestier.
« Cette exposition c’est la plus conséquente que j’ai produite » conclut un Julien des Montiers heureux et épanoui. Un artiste régional qui s’est installé en Touraine « par hasard »en cherchant à quitter la capitale avec sa famille mais qui n’a visité qu’une maison avant de poser ses valises. Il est aujourd’hui un ambassadeur de l’art impliqué dans sa diffusion au grand public et on le sent motivé à endosser ce rôle. D’ailleurs, il définit son travail comme assez universel, en tout cas « pas conceptuel » : « Il n’y a pas de raison que les gens passent à côté en disant je n’ai rien pigé. »