Pierre Mottron : lentement mais sûrement

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«Notre maison brûle et nous regardons ailleurs» disait le philosophe françafricain Jacques Chirac. «Nous ne pourrons pas dire que nous ne savions pas» continuait-il… Nous pourrions décliner ces formules à la Touraine au sujet de son fils prodige : «Pierre Mottron passe en concert et nous préférons aller bouffer au restau». Ce petit génie local mijote tranquillement son premier album tout en distillant sa musique dans des concerts aussi rares que précieux, dans l’indifférence quasi-générale. Pierre Mottron était à l’Intime Festival samedi soir, pour tester sur scène en exclu la quasi-intégralité de son futur premier album.

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Pendant que la chanteuse de Doclap brillait sur Arte TV et que Rubin Steiner et son nouveau groupe Drame se piquaient aux fourches caudines du (bête et) méchant jury de The Voice (à moins que ce ne soit l’inverse ?), nous avons franchi le Cher et le Petit-Cher pour aller ouïr dans l’intimité un être qui nous est cher. A l’occasion d’un set court et intense, Pierre Mottron a revisité à sa manière certaines de ses compositions et a surtout montré à travers de nouveaux morceaux à quel point son univers est aujourd’hui abouti et prêt à conquérir le monde.

Aériennes, gracieuses et ambitieuses, ses chansons qui oscillent entre piano ou cordes «classiques» et machines délicates, habillent avec beaucoup de variété une voix tantôt sombre et grondante et, dans l’instant qui suit, suave, puis très haut perchée, puis susurrée, puis de nouveau sombre, etc. Une voix au-delà du réel, magique, imprévisible, véritablement hypnotisante. Pour trouver quelque chose qui s’en approcherait, côté musique indé inconnue on pense un peu à Butterfly Child et Frazier Chorus, et côté grosses références universelles, on sera plutôt tentés d’évoquer l’immensité mélodique d’un Peter Gabriel et la profondeur fragile d’un Nick Drake, avec une touche de Thom Yorke. Et quand on dit «évoquer» c’est pas juste pour faire joli, ni pour lui faire plaisir parce qu’il avait des fraises Tagada dans sa loge : non, on parie cher aujourd’hui que dans les deux-trois ans qui viennent, Pierre Mottron – quand il aura choisi le bon label et la bonne production, sans doute à l’étranger au vu des dernières pistes étudiées – sera l’un des rares artistes tourangeaux d’envergure internationale.

Même s’il nous a avoué être un peu moins perfectionniste que lors de notre première rencontre il y a trois ans, Pierre Mottron passe toujours une bonne partie de son temps à peaufiner les morceaux de ce premier LP à venir (terminé dans son home studio il y a quelques jours), dont des inédits et des extraits de son dernier EP «Home Safe» qui remonte déjà à… 2014. Autant dire que ses fans ont intérêt à être d’une patience à toute épreuve. Mais quand on aime, on ne compte pas les années d’attente.

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Nombreuses dates avec EZ3KIEL

Entre fin 2014 et début 2016, Pierre Mottron a partagé la scène avec Ez3kiel, de Grenoble au Bataclan, en passant par Clermont-Ferrand, Bruxelles et jusqu’à l’Olympia il y a quelques semaines. Au-delà du titre Anonymous qui a scellé sur disque les affinités entre deux générations de la scène tourangelle, Pierre Mottron a aussi assuré quelques premières parties.

«Ez3kiel m’a permis de sortir un peu d’un certain enfermement, ils m’ont invité à chanter sur un morceau et à faire leur première partie sur leur dernière tournée. Ils m’ont vraiment encouragé pour améliorer mon set live et j’ai aussi rencontré mon manager grâce à eux, Nouveau Monde de Metz.» Une collaboration qui permet à Pierre Mottron de ne pas se précipiter et de prendre le temps de chercher le bon producteur et le bon label.

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«Je ne veux pas devenir un groupe, ma musique ne s’y prête pas et je ne suis pas fait pour ça. C’est d’ailleurs pour ça qu’en attendant de pouvoir jouer avec plein d’instruments, je préfère jouer seul plutôt que dans une configuration intermédiaire à deux ou trois qui n’apporterait pas grand-chose à mon projet. Mon objectif c’est vraiment de trouver des musiciens qui seront au service de ma musique, pas de «monter un groupe»…» explique cet auteur-compositeur exigeant et déterminé. «Mon projet a besoin d’une dynamique instrumentale type musique de chambre, cela me permettrait notamment de pouvoir être plus libre pour le chant. Pour moi, le luxe ce serait de pouvoir être debout juste avec mon micro sur la plupart des titres, même si je pense que je ne lâcherai jamais totalement la maîtrise de certaines parties instrumentales.»

Une configuration qu’on aura peut-être la chance de voir d’ici la fin de l’année ou début 2017. En tout cas, aucune date n’est prévue pour l’instant : une raison supplémentaire d’avoir pleinement savouré le concert du week-end dernier.

Un degré en plus

> Notre chronique de son clip «Indecent» (12 décembre 2015)

crédits photos : Laurent Geneix pour 37°

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