Le HIC, premier collectif drag queen, drag king et drag queer de Tours

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« C’est ici et maintenant, c’est le truc qui cloche fièrement » : voici la devise du HIC, un collectif officiellement né à Tours en septembre 2022 et qui se fixe pour mission de développer la pratique drag à Tours via des spectacles, des scènes ouvertes, des soirées ou des performances. Déjà très ouverte à la culture queer avec une Marche des Fiertés très populaire et nombre d’événements comme le festival LGBTI Désir Désirs, la ville était pourtant dépourvue de ce type de structure, accueillant seulement de façon ponctuelle des événements/soirées avec drag queen, drag king ou drag queer. Le HIC pourrait donner l’impulsion pour que ça évolue et que ça se diffuse dans la population.

Pour bien comprendre, on va commencer par faire un peu de pédagogie : être drag, c’est prendre l’apparence d’un personnage sur scène dans un show où l’on va se jouer des codes les plus répandus de la féminité ou de la masculinité. On est à la frontière entre la danse, le théâtre, le cirque ou encore l’effeuillage burlesque. Bien au-delà du simple aspect de spectacle que l’on voit en cabaret, même si les deux univers ont quelques similitudes. « C’est un art militant. Ça sert à venir questionner les normes de genre quelles qu’elles soient » explique Noé, art-thérapeute et cofondateur du HIC. Le plus souvent, on cite le terme de drag queen, pour des hommes qui montent sur scène avec une allure de femme. Mais attention : dans cet univers, pas question de parler de travestissement, ce n’est pas la même chose.

« Se travestir consiste à aller vers le genre opposé que celui que l’on a et c’est quelque chose qui a souvent une connotation péjorative. Être drag, ce n’est pas que ça : c’est performer un genre. C’est un art de scène et cela porte souvent plus loin que l’apport personnel » nous explique Paule, en 3e année aux Beaux-Arts de Tours et autre moitié du HIC. Son binôme complète : « Un homme cisgenre – qui se reconnait en tant qu’homme – peut performer en femme mais on a aussi des femmes cis qui ont un personnage féminin. Ce n’est pas juste changer de fringues. Il y a un propos derrière. Le drag, c’est toujours politique. »

Un milieu en évolution constante

Les drag se retrouvent majoritairement dans la communauté LGBT ou queer. « Pour moi ça a toujours été de pair avec le militantisme » explique par exemple Paule. « C’est une manière de s’explorer » complète-t-elle. Son personnage porte son prénom du quotidien mais avec des caractéristiques propres : « C’est vraiment pensé comme une arme. Un mode d’action. Un outil de recherche. » Noé – alias Sir Camille Bob – ne dit pas autre chose, évoquant la façon dont il a fait évoluer son avatar scénique au fil des ses réflexions et transformations personnelles jusqu’à aboutir à « un dandy que l’on peut moquer mais qui reste sensible », notamment inspiré du chanteur Elton John.

« Je ne me voyais pas performer en femme car je ne m’y reconnaissais pas. Je ne me sentais pas assez bon là-dedans » explique ainsi Noé tandis que Paule évoque « un personnage qui bouge tout le temps et évolue à chaque performance. » A la différence d’un personnage de théâtre qui va être très écrit, et régit par des codes de mise en scène, un drag ou une drag n’est donc jamais vraiment figé. Au point que l’univers en lui-même est mouvant comme l’explique Noé :

« Dans le drag il y a des mouvements. Majoritaire jusqu’ici, l’ancienne école était très caricaturale, avec un humour exacerbé. Progressivement on voit arriver une deuxième vague dont on fait partie, plus queer, et qui va chercher des choses plus fines, plus sensibles. Par exemple on a vu des numéros sur les problématiques écologiques ou sur le fait que les drag king étaient moins recrutés. »

Bref si on va voir un tel spectacle, il faut s’attendre à se faire bousculer. « On ne veut pas laisser les gens dans leur confort avec un show 100% festif » reconnait d’ailleurs Paule. « On veut que le public parte avec le sourire mais quand même avoir dit des choses. Cela passe par le choix des morceaux qu’on passe, pourquoi on les passe, quels artistes on accueille » ajoute Noé. Une philosophie qui a vocation à se diffuser de plus en plus fréquemment avec une résidence mensuelle du HIC un dimanche par mois au Cubrik, Rue au Change à Tours. Des afterworks où les drag performent au milieu de la clientèle, l’établissement étant dépourvu de scène. « Ce sont toujours des moments chouettes » commente le duo qui apprécie en primer de voir s’y mixer la communauté queer et une foule familiale.

Une démocratisation en cours

Au-delà de ce rendez-vous désormais institutionnalisé, Le HIC espère développer la pratique drag à Tours. Pour cela, il s’ouvre à d’autres adhésions et vise le statut professionnel. L’idée : capitaliser sur la respectabilité acquise ces derniers mois pour passer à l’étape supérieure. « Il y a pas mal de gens qui ont envie de performer mais qui ne le font pas par manque d’espace, de moyens ou d’envie » constate ainsi Noé qui anime également des ateliers mensuels de drag le samedi au club de danse aérienne Spicy Lotus.

« On cherche à valoriser les gens de Tours qui font du drag ou de la performance queer, donner du courage à tout le monde. »

Un objectif d’expansion et de démocratisation qui suit une tendance nationale depuis le succès de l’émission Drag Race France portée par France Télévisions, et dont la saison 2 est en cours de préparation avec la promesse d’une diffusion en deuxième partie de soirée, soit un horaire assez exposé en audience. « On dit merci à ce programme car même s’ils ne l’ont pas regardé beaucoup de gens en ont entendu parler et font part de curiosité. C’est un coup de poker réussi car cela donne car cela donne une visibilité aux artistes drag » se félicite Noé malgré quelques réserves (sur l’impossibilité de participation aux concours pour les drag king, par exemple). La troupe sera d’ailleurs en spectacle au Vinci de Tours ce mardi 31 octobre 2023.

Crédit photos : Leah Williamson

Un degré en plus :

Prochains événements du HIC au Cubrik de Tours les dimanches 15 janvier et 26 février à partir de 18h et à prix libre (5€ minimum conseillé). Il y aura aussi une performance à la Bibliothèque Centrale de Tours samedi 4 février, dans le cadre du festival Désir Désirs et du week-end du livre queer premier du genre. Infos sur l’Instagram lehic.collectif. Les prochains ateliers de Sir Camille Bob sont eux prévus les 14 janvier, 18 février et 18 mars au Spicy Lotus. Les détails via son compte Instagram.

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