Il y a du nouveau dans la nef du Centre de Création Contemporaine Olivier Debré de Tours : jusqu’au 18 février 2023, la grande salle de l’établissement accueille un trio d’artistes iranien pour une exposition à la frontière du documentaire et du militantisme.
Le parcours commence dans une petite salle sombre, simplement éclairée de néons et constellée de sculptures sphériques. Puis l’horizon s’éclaircit et se déploie pour cheminer vers de grandes structures qui peuvent tantôt faire penser à des accroches pour plantes, ou prennent l’aspect d’une créature s’imposant dans l’espace. Ce catalogue d’œuvres assez différencié est signé par trois hommes originaires d’Iran et exilés aux Emirats Arabes Unis depuis 2009, pour fuir le régime de Téhéran qui a une fâcheuse tendance à censurer l’art, quelle que soit sa forme.
Ces artistes, nommons-les : Ramin Haerizadeh, Rokni Haerizadeh et Hesam Rahmanian. RRH, comme ils se surnomment. Pas des inconnus sur la scène mondiale, puisqu’ils ont notamment présenté leur travail dans des sites prestigieux dont Abu Dhabi. A Tours, ils reprennent une partie de leurs créations passées auxquelles ils adjoignent une production inédite, l’une des fameuses structures, constellée d’assiettes peintes.
C’est une exposition à messages qu’ils nous donnent à voir. Une réflexion sur les conflits passés impliquant l’Iran, en particulier la guerre Iran-Irak. Mis en perspective, cela fait réfléchir sur la situation actuelle, avec un pays qui jugule toujours la création artistique et réprime son peuple (de nombreux morts dans les manifestations pour dénoncer l’arrestation puis la mort de Masha Amini, une femme interpellée parce que son voile islamique était mal positionné). C’est aussi une immersion dans la culture du Moyen-Orient, avec un précis presque documentaire sur l’architecture dans un parcours mixant photos, textes et maquette. Aussi instructif que l’ensemble est déroutant, nécessitant impérativement une médiation pour être appréhendé dans sa globalité.
Avec cette invitation, le CCC OD tourangeau fait un pas important vers une scène artistique réprimée et qui mérite une large exposition de son travail et l’affirmation de messages humanistes essentiels. Il invite à se pencher sur un pan de l’Histoire parfois méconnu tout comme il fait aussi voyager vers une culture follement riche allant jusqu’à s’approcher de l’ambiance des bains avec la présence d’une fontaine au bruit apaisant. Au fil du parcours, on peine tout de même à percevoir précisément la linéarité de la chose. L’impression d’être immergé dans un univers dont plusieurs codes nous échappent.
