En sueur dès «Fou à lier», deuxième morceau de son set, Arthur a tout de suite posé les bases d’une performance totale. Un show pourtant sobre et minimal, qui ne néglige rien et surtout pas les intertitres où, entre imprécations martelées (ô Temps Machine !) et pseudo-prêches dans lesquels Feu ! Chatterton n’a que de la poésie à refiler gratos, ce personnage insaisissable fait roucouler le verbe avec la verve facétieuse et l’œil espiègle d’un Michel Serrault au sommet de sa forme.
Côté musique, on l’a déjà écrit ici mardi, pas mal de pans de la musique de ces 60 dernières années sont abordés et on a pu se faire malmener par une section rythmique tellement fabuleuse qu’elle en faisait parfois passer la gouaille d’Arthur au second plan, ce qui n’est pas peu dire.
Jouant à contre-courant la carte d’un expressionnisme déluré en contre-champ subtil d’une poésie moderne urbaine et enlevée à la Christine & the Queens ou d’un naturalisme jusqu’au-boutiste et bavard à la Fauve, Feu ! Chatterton propose une grammaire nouvelle qui bouscule les repères à peu près autant qu’elle puise chez des monstres de l’histoire de la musique (allez, on cède aux sirènes des références… s’il faut n’en retenir que trois : Nougaro, les Smiths et Marquis de Sade).
C’est un Temps Machine bondé qui a reçu hier soir cette espèce de bénédiction céleste, jouée sans retenue, avec force et simplicité, comme on invite des gens de passage à table alors que c’était pas prévu. Et que celles et ceux qui ont raté ça et celles et ceux qui en redemandent déjà patientent : il se pourrait bien qu’on revoit Feu ! Chatterton dans pas si longtemps et pas si loin d’ici, sur une bien plus grande scène…