Crise énergétique, fréquentation des jeunes : les défis du nouveau président des Studio

Facebook
Twitter
Email

7 salles, 1 054 fauteuils et une demi-douzaine de festivals accueillis à l’année… Les Studio de Tours restent un acteur majeur du cinéma tourangeau. Mais le secteur est en plein doute depuis le Covid, peinant à retrouver sa fréquentation prépandémique. C’est dans ce contexte que l’association a changé de président, Catherine Melet étant remplacée par Dominique Plumecocq. Nous l’avons rencontré.

Ce serait quoi ta définition des cinémas Studio ?

Pour moi c’est un lieu de vie autour du cinéma parce qu’il se passe plein de choses au-delà de regarder des films. On peut vivre une expérience collective pendant la projection mais aussi après, par exemple avec des débats (en ce sens, les soirées mensuelles du CNP ont récupéré leur fréquentation de 2019 avec une moyenne de 80 entrées par séance, ndlr). On peut aussi boire un coup à la cafétéria. Cet aspect est très important car c’est l’exact inverse des plateformes de streaming où on consomme des images chez soi. Ça m’arrive… mais en salle ça n’a rien à voir. Il y a une communion collective et on ne peut vivre cette expérience que dans le noir.

Pourquoi le public a du mal à revenir depuis la crise Covid ?

Il revient partiellement et ça remonte petit à petit. On a récupéré les ¾ de notre fréquentation. Après, je pense qu’il y a un double facteur : les habitus sociaux ont changé. Une partie des gens se sont renfermés et vivent les choses chez eux. La deuxième raison est économique : le prix d’une entrée de cinéma est une dépense importante pour une partie des Français. Comme tout augmente, ils n’ont plus les moyens d’aller au cinéma même si l’on essaie de rester abordables avec des tarifs réduits.

Justement, quelle est la santé financière de l’association ?

Nous sommes solides, notamment parce qu’on est propriétaires de nos locaux. Ce n’est pas le cas de nombreux autres cinémas indépendants qui sont locataires et dans des difficultés financières réelles. Nous, on est face à des contradictions. On veut garder une équipe salariée importante face aux multiplexes où on ne voit quasiment personne. Mais en même temps notre facture énergétique a été multipliée par 3 en deux ans. C’est une énorme différence. Nous sommes donc dans un équilibre instable et il faut qu’on repasse au-dessus des 300 000 spectateurs sinon il faudra qu’on trouve des économies en interne ou redynamiser la programmation.

Cela veut dire quoi redynamiser la programmation ?

On a encore un gros travail à faire sur le public jeune. Il vient mais on en espère plus (cela représente 10% des abonnements, ndlr). Pour s’en donner les moyens, on a recruté Manon exprès. C’est un pari financier qui a permis de développer des activités comme le Marathon (toute la saga Harry Potter diffusée début juillet 2022, Le Seigneur des Anneaux en 2023, peut-être Star Wars en 2024, ndlr). Il est trop tôt pour savoir si ce sera un pari gagnant mais quand on voit les événements on a un vrai public jeune. Le but est d’arriver à ce qu’ils se disent que ce n’est pas un cinéma pour intellos ou profs mais pour tous les publics.

Quelle est la position des Studio autour des blockbusters ?

Cet été on a programmé Openheimer mais pas Barbie. On projette 550 films par an contre environ 250 dans un multiplexe. Si on veut de la place pour un cinéma différent pas forcément prise de tête on ne peut pas accepter les exigences de diffuseurs qui demandent 4 séances par jour pour un film pendant deux mois.

Quel est ton premier souvenir marquant aux Studio ?

C’était à l’époque où j’habitais Montrichard (41). Au lycée Descartes de Tours il y avait un ciné club qui projetait des films invraisemblables dont Le Dieu noir et le diable blond de Glauber Rocha (1964). Ça m’a subjugué. Le professeur m’a dit : « Si tu aimes ce genre de films, tu fais 500m et tu vas aux Studio. J’ai un très fort souvenir de Stalker d’Andrei Talkovski (1979). C’est hallucinant, une beauté plastique incroyable. En sortant, il neigeait : la ville était silencieuse comme si le film s’y était épandu.

Qu’est ce qui t’a motivé à prendre la présidence ?

J’ai suivi tout le parcours des bénévoles aux Studio : d’abord bénévole pendant un an dans une des 12 commissions, en rentrant à la rédaction des Carnets (c’était il y a trois décennies, ndlr). J’ai essayé de comprendre petit à petit l’institution puis je suis devenu membre actif. Au début je n’osais pas trio prendre la parole puis j’ai fini par me proposer à l’élection du CA. De là j’ai exercé plusieurs fonctions dans le bureau jusqu’à devenir vice-président de Catherine Melet. La présidence, on me l’a proposée plusieurs fois. J’ai d’abord refusé car ma compagne m’a dit que ce serait trop prenant, qu’elle avait envie qu’on se voie. Maintenant que je suis à la retraite ça tombe bien. Je suis là presque tous les jours et j’aimerais faire plusieurs années.

Comment tu appréhendes ton premier mandat d’un an ?

Je le vois comme une énorme responsabilité. J’ai bien en tête que nous avons une équipe de salariés très investie. C’est une vraie entreprise. Il faut être sérieux dans le travail et accompagner le nouveau directeur Romain Prybiliski (en provenance des Lobis de Blois).

Pour finir, un moment de cinéma que tu as hâte de vivre aux Studio ?

Karim Leklou vient le 3 novembre pour présenter Vincent doit mourir où il joue un homme traqué par la foule, à la limite entre le film d’horreur et le fantastique. Sa carrière a décollé après un court-métrage tourné à St-Pierre-des-Corps. C’est un ogre doux du cinéma, comme disait Télérama. C’est complètement ça avec sa voix grave, son humour dévastateur. La première fois qu’on a mangé ensemble il plaisantait, bousculait l’équipe d’accueil avec beaucoup de bienveillance et de gentillesse. On le voit beaucoup maintenant… et dans des rôles marquants.

Facebook
Twitter
Email

La météo présentée par

TOURS Météo

Inscription à la newsletter