[Cinéma] Regards #38 A beautiful day et Jeune femme

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Dans Regards, retrouvez l’avis de Stéphanie Joye sur quelques films à l’affiche dans les cinémas tourangeaux. Histoire de vous donner envie, à votre tour, d’aller passer un moment dans les salles obscures.

A beautiful day (You were never really here)

(Thriller, Drame britannique, français, américain)

De Lynne Ramsay

Avec Joaquin Phoenix, Ekaterina Samsonov, Alessandro Nivola 

Prix de la mise en scène à Cannes et prix d’interprétation masculine attribué à Joaquin Phoenix

Joe, être mutique, hirsute et torturé, la quarantaine, vit avec sa mère avec laquelle il entretient des rapports d’une tendresse infinie. Mais il souffre d’un passé violent qui le hante. Vétéran traumatisé d’Irak, l’horreur de ces souvenirs s’ajoute à celle de son enfance maltraitée. Sa propre violence le dépasse au point de lutter pour vivre en se regardant en face, et pour respirer tout simplement. Faisant sa propre loi envers et contre la corruption, il avance, le regard sombre et le marteau à la main, pour démolir les ordures qu’il a pour mission de neutraliser. Il se voit confier le sauvetage de la fille d’un sénateur, en proie à un réseau de prostitution pédophile. Cette traque et cette confrontation avec l’enfance souillée va le sortir de lui-même, dans une rage vengeresse.

On parle de A beautiful day comme étant le Taxi Driver du 21ème siècle, ou bien encore un The drive conjugué avec Voyage au bout de l’enfer. Il faut entendre ces comparaisons comme étant d’un point de vue thématique plus que superlatif, les spectateurs restant seuls juges … Le récit du film n’est pas vraiment scandé, puisqu’il fait appel à des visions antérieures plutôt qu’à des flash-back. De sorte qu’il n’y a pas de clivage entre l’enfance et la réalité adulte de Joe, bien au contraire. Ce dernier, barbu, bourru, dévasté par la vie, désespéré, déroute le spectateur, entre compassion, émotion intense et effroi. Lynne Ramsay dissèque cet être électrique, et, au fond et surtout, plein d’amour. La rencontre entre la cinéaste et le grand, très grand et hallucinant Joaquin Phoenix est un coup de massue et de grâce. Qu’une femme réalise un polar-thriller si dantesque et sanglant est impressionnant. Choc hypnotisant, épidermique, tétanisant et envoûtant, A beautiful day – You were never really here (titre original) donne de fortes palpitations cardiaques, transcende les codes et les lois des tueurs à gage américains. L’interprétation est magistrale : une vraie performance intériorisée d’un anti-héros ultra violent malgré lui. La photo est saisissante et somptueuse, la mise en scène, le montage et le son (musique de Jonny Greenwood), nerveux, exceptionnels, maîtrisés. Le tout est une immersion non exempte de poésie, saisissante de virtuosité, et d’un hyper esthétisme ahurissant dans le contexte. C’est un grand film noir.

Un film à l’affiche aux Cinémas Studio (Toutes les informations utiles sur leur site internet)

Jeune femme

(Comédie dramatique française, belge)

De Léonor Serraille

Avec Laetitia Dosch, Grégoire Monsaingeon, Souleymane Seye Ndiaye

Caméra d’or à Cannes 2017 et prix d’Ornano-Valenti à Deauville, décernés à un premier film.

Paula a 31 ans, plus de mec, un chat dans les pattes, cherche du taf, et erre dans les rues de Paris, aussi paumée que pêchue et obstinée.

Le premier long-métrage de Léonor Serraille, encensé par la presse, sait insuffler une légèreté toute relative au fil de son sujet. Certes, c’est drôle et sympathique. Mais c’est étrange : Paula rayonne, alors qu’elle semble avoir quelques troubles psychologiques sérieux et que tout va plutôt mal. Chez Paula, tout est antinomique, bancal, paradoxal. Quelle est cette fille, quel est ce comportement borderline ? A aucun moment le film ne nous donne des raisons de nous attacher à cette identité presque fictive à suivre. Durant le premier tiers du film, Laetitia Dosch est extraordinaire, elle bouffe la caméra qui la bouffe aussi, bref … il s’agit de caméra d’or tout de même. Mais bon. Cela devient horripilant par la suite, les pétages de plombs de Paula sont exténuants et décoratifs, ses rapports humains ne sont guère tangibles, les personnages n’ayant pas mérité d’ampleur (par contre, la scène altruiste chez sa médecin est magnifique). De ce fait, on est face à une œuvre qui boite en cœur avec son héroïne. Mais Jeune femme est tout de même hédoniste, au fond, et divertissant. Il révèle un très grand talent d’actrice : celui de Laetitia Dosch, indéniablement.

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