Dans deux jours, le coup d’envoi d’une nouvelle saison sera donné pour le CCNT. Derrière ces quatre lettres se cache le Centre Chorégraphique National de Tours. Le lieu consacré à la danse dans la ville. Avec ses 13 employés, il fait partie des 19 autres CCN sur le territoire français à remplir des missions autour de l’art de la danse. Souvent considérés comme trop conceptuels, les spectacles musicaux et chorégraphiés intéressent tout de même les plus curieux. Institution culturelle, danse contemporaine et programme bien rempli, Thomas Lebrun entame sa septième année à la tête du centre. Mais toujours dans un espace restreint…
Le CCNT, un lieu, plusieurs missions
En tant que centre chorégraphique national, le CCNT a plusieurs missions à remplir. Tous les centres chorégraphiques nationaux doivent répondre à au moins trois des cinq missions institutionnelles autour de la danse : la création d’œuvres chorégraphiques, la diffusion de ces œuvres, la sensibilisation à l’art de la danse, la formation et l’accueil de compagnies.
À Tours, le centre chorégraphique assure les missions de création, de diffusion, d’accueil studio avec un artiste associé pour trois ans et de formation à la danse sur le territoire tourangeaux. En tant qu’unique lieu consacré à la danse dans la ville, le CCNT endosse aussi le rôle de programmation pour pouvoir proposer des spectacles de danse.
Depuis 2012, c’est Thomas Lebrun qui a pris à cœur de remplir toutes ces missions pour le Centre Chorégraphique National de Tours. L’occasion de lui poser quelques questions sur son métier.
Pourquoi diriger le Centre Chorégraphique National de Tours ?
Parfois je me pose la question (rires). J’avais envie de démystifier la danse. Les gens ne connaissent pas forcément la danse contemporaine. Et souvent, ils n’ont pas non plus envie de la connaître parce que ça leur fait peur ou parce que c’est trop conceptuel. On voit bien que dans tous les théâtres, quand on invite un grand Molière ou une grande pièce de théâtre contemporaine, les gens y vont. Mais la danse on y va moins parce qu’on a peur de ne pas comprendre. Il y a donc un important travail à faire sur la sensibilisation à l’art de la danse.
J’imagine que ce n’est pas la seule activité d’un directeur de centre chorégraphique ?
Non, diriger un centre chorégraphique, c’est un double métier. Il faut à la fois gérer un lieu et une équipe mais aussi une compagnie. Mon travail en tant que chorégraphe était déjà bien avancé avant d’arriver à Tours. Mais maintenant il faut que je le maintienne en gérant le développement du centre chorégraphique et ces différentes missions.
Si jamais les lecteurs de 37° ne devaient aller voir un seul et unique spectacle, ce devrait être lequel ?
Je ne peux pas répondre à cette question parce que pour moi il faudrait en voir plusieurs pour se faire une idée. Pour ceux qui ne sont pas vraiment habitués, les heures curieuses permettent de rencontrer un chorégraphe en résidence, voir des extraits de son spectacle et échanger sur le sujet. Ça aide à comprendre l’écriture chorégraphique et ainsi s’en faire son idée.
Pour les intéressés, les heures curieuses auront lieu les vendredis 28 septembre, 5 octobre, 1er février, 29 mars, 12 avril au CCNT à 19h. Gratuit sur réservation.
Programmer la saison avec une volonté de diversifier les genres
La saison débute donc le 19 septembre avec une sortie de résidence d’un étudiant de l’Université de Tours. Clément Aubert présentera Danse avec le yak dans la salle Thélème. Le prix de l’entrée est libre. Ce partenariat est un moyen pour le CCNT d’emmener la danse directement aux étudiants. Un public encore très absents du centre de danse que le directeur aimerait toucher un peu plus.
La saison 2018/2019 marque aussi un changement d’artiste associé à la structure. Présente depuis le début du dispositif en 2016, Gaëlle Bourges proposera les 18 et 19 octobre son spectacle, Ce que tu vois, avec comme thème la tenture de l’Apocalypse d’Angers. Le CCNT accueillera en janvier 2019 son nouvel artiste associé pour trois ans, Emmanuel Eggermont. Il y proposera son spectacle Polis dès le 16 janvier.
Côté temps forts, le CCNT va dédier trois jours aux chorégraphes installés en région Centre-Val de Loire au mois de décembre. Puis ce sera au tour des jeunes chorégraphes de danse contemporaine au mois de mars. Ces événements sont l’occasion de donner un bon coup de projecteurs sur de jeunes artistes du monde de la danse.
Quant à Thomas Lebrun, ce n’est pas un mais bien deux nouveaux spectacles qu’il proposera au long de la saison. Le premier, Dans ce monde, s’adresse, entre autres, au jeune public et sera au programme du mois de novembre. Pour la fin de la saison, Thomas Lebrun prépare Ils n’ont rien vu. Le spectacle est inspiré de Hiroshima mon amour, célèbre roman de Marguerite Duras et Alain Resnais. En tout, le directeur et chorégraphe sera présent sur 110 représentations programmées en France.
La programmation du Centre Chorégraphique National de Tours ne s’arrête évidemment pas là. La saison propose de nombreux événements pour tous les goûts et tous les âges. « L’idée, c’est que la saison rende les gens curieux et qu’il y ait différents style de danse représentés » conclut Thomas Lebrun
Et après la saison 2018/2019 ?
Si aucun événement n’est prévu pour fêter les 30 ans du centre en 2019, l’équipe du CCNT pense plutôt en créer un lorsqu’ils auront déménager. Espéré pour la fin de l’année 2020, le déménagement du centre chorégraphique est plus qu’une nécessité. Cela fait même environ 20 ans que les directeurs successifs du lieu sont sur le projet. En novembre, un jury délibérera d’un projet parmi les quatre équipes d’architecture au préalablement sélectionnées. Les raisons du déménagement sont nombreuses.
Situé dans le quartier Giraudeau, le CCNT manque de visibilité et de place. Pour le moment, le bâtiment du CCNT se résume à un studio avec une jauge de 140 spectateurs et des bureaux pour l’administration. Thomas Lebrun nous confie même devoir parfois aller dans d’autres villes pour accueillir des artistes en résidence. Ce qui pose un problème d’autonomie.
Le CCNT compte aujourd’hui beaucoup sur ses partenariats et les accueils qui peuvent être faits dans d’autres salles culturelles tourangelles telles que Thélème ou l’Espace Malraux à Joué-les-Tours. Cela demande une organisation supplémentaire en interne car le CCNT se retrouve dépendant des autres lieux. Le futur centre devrait donc voir le jour au nouveau quartier des casernes, avec une vraie scène et plusieurs studios pour répéter et accueillir des artistes en résidence.
« On sait que la situation géographique d’un lieu et son aspect sont des critères importants pour le public. On a de la chance que le public se déplace ici mais la création d’un nouvel espace nous permettrait vraiment plus d’autonomie pour développer des projets. » – Nadia Chevalérias, responsable de la communication au CCNT.
Aujourd’hui le problème d’autonomie ne pose pas que des soucis d’organisation, c’est aussi un problème économique. Le CCNT a par exemple dû programmer 3 soirées de présentation de la saison au début du mois de septembre. La salle de 140 spectateurs était quasiment pleine tous les soirs. Seulement, cela implique que les acteurs de ces soirées soient mobilisés et disponibles sur trois soirs d’affilés. Alors qu’avec une salle deux ou trois fois plus grande, le CCNT aurait pu se contenter d’un seul soir de présentation pour le même résultat de fréquentation.