Une cinéphile aguerrie pour présider les cinémas Studio à Tours

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Pendant une année normale le multiplexe art et essai de la Rue des Ursulines projette plus de 500 films différents. Avec les deux confinements de 2020 + la frilosité des distributeurs qui ont décalé nombre de sorties, ce chiffre va tomber à 300. Le nombre d’entrées s’effondre également : 350 000 en 2019 (une année record), à peine 150 000 ces 12 derniers mois. Autant d’écueils à affronter pour la nouvelle présidente des Studio, Catherine Melet. Rencontre…

« Quand j’étais petite j’allais au moins une fois par semaine dans mon cinéma de quartier à Boulogne-Billancourt, près de Paris. Je me souviens avoir vu Bambi et d’avoir été traumatisée par la mort de sa mère. » Catherine Melet ne manque pas de souvenirs avec les salles obscures. Originaire d’Agen, cadre RH pour une grande entreprise, elle vit à Tours depuis une vingtaine d’années après avoir bourlingué du côté de Châteauroux ou Poitiers. Elle se rappelle très bien de ses premières séances aux Studio : « Je devais avoir un logement de fonction mais il était en travaux. J’ai passé six mois à l’hôtel, je venais au cinéma quasiment tous les soirs. » Avec un bon bagage associatif dans le milieu du théâtre, elle se renseigne rapidement sur les possibilités de s’investir dans l’association ce qui l’amène notamment à travailler sur le festival LGBT Désir… Désirs puis à intégrer le Conseil d’Administration, prendre le poste de trésorière et enfin se faire élire présidente en octobre à la suite de Pierre-Alexandre Moreau (désormais conseiller municipal dans la majorité d’Emmanuel Denis).

Quand on lui demande de parler du cinéma qu’elle aime, Catherine Melet évoque Robert Redford et L’Arnaque, Fellini, Kubrick, Woody Allen, le cinéma muet, David Lynch, Claude Chabrol « inégal, mais quand il est bon, il est bon. J’ai beaucoup aimé Une affaire de femmes avec Isabelle Huppert. » Plus récemment, elle a ouvert de grands yeux devant Antoinette dans les Cévennes – gros succès public de la rentrée –, elle a admiré tout le travail de Bong Joon Ho (Palme d’Or à Cannes en 2019) et attend avec impatience Mandibule, le nouveau Quentin Dupieux promis en cette fin d’année.

Le cinéma, la présidente des Studio l’aime en salle, enfoncée dans son fauteuil, face à l’écran. « Quelqu’un de la programmation me faisait remarquer que dans une salle on est complètement dans le film, on s’immerge alors qu’à la maison devant la télé, il y a toujours une plante verte à côté de l’écran. » Faire vivre des expériences de cinéma, c’est son objectif à la tête du premier complexe art et essai de France aujourd’hui malmené par la situation sanitaire. Seulement 150 000 entrées c’est la promesse de plusieurs centaines de milliers d’euros de déficit… Certes, 12 salariés sur 17 ont été placés au chômage partiel (les salaires ont été maintenus à 100%). Certes, le Centre National du Cinéma a mobilisé des aides pour les salles. Grâce à ces soutiens, « on sera là en 2021 » rassure Catherine Melet… mais dans quelles circonstances ?

« Les gens reviendront au cinéma. Notre public est accroc. »

« J’espère qu’on retrouvera une fréquentation normale d’ici un an. Ici il y a une ouverture sur d’autres cultures qu’on n’a pas ailleurs. Les films que l’on passe ne sont pas sur Netflix » explique la néo-Tourangelle aux côtés du directeur du cinéma Philippe Lecocq. Parmi les notes d’espoir, il y a la journée de réouverture du 22 juin où les Studio avaient devancé tous les autres cinémas de la région en nombre d’entrées mais aussi le week-end juste avant le reconfinement, « quasiment normal » grâce à des films comme Adieu les cons et Garçon chiffon qui doivent ressortir cet hiver. « On a un public accroc, en manque et qui a bien intégré le protocole sanitaire. Je crois toujours au cinéma comme lieu de projection, on sait que les gens reviendront mais pour cela il nous faut aussi des films porteurs. » Des longs métrages que les distributeurs décalent, décalent, décalent… Ou basculent sur les plateformes en ligne. Quand ce ne sont pas les tournages qui sont reportés.

L’industrie du cinéma se trouve donc particulièrement fragilisée, autant dans l’attente des consignes sanitaires gouvernementales que des réactions du public et du rythme de création. Avec un tel contexte, le mandat de présidente des Studio de Catherine Melet s’annonce assez délicat… Alors elle envisage plus que jamais de faire du complexe art et essai un lieu de vie et d’animations. L’édition 2021 de Désir… Désirs doit débuter le 20 janvier, jour potentiel de la réouverture de la cafétéria si l’épidémie reste peu active, une concomitance qui est tout sauf un hasard.

Des projets en pagaille

Après ce premier événement, doivent suivre le festival du film italien Viva il Cinema en mars, le festival du film asiatique au printemps, La Nuit (blanche) des Studio début juin, La Nuit de l’Horreur en août… Tout est suspendu à l’évolution de la crise du coronavirus « mais pas principe on se prépare à tout organiser » insiste Philippe Lecocq. Les partenariats avec Radio Béton, Le Temps Machine ou Le Bateau Ivre restent d’actualité de même que la volonté de collaborer avec l’école de cinéma de Tours (l’ESCAT) : le court-métrage d’anciens élèves sera prochainement diffusé un dimanche matin et les Studio doivent bientôt se transformer en plateau de tournage pour la production d’un autre projet d’ex-étudiants de l’établissement. « C’est notre boulot de défendre les réalisateurs locaux ou les premiers films » précise Catherine Melet. C’est aussi pour ça que le cinéma tient à sa programmation mensuelle qui laisse leur chance aux films à l’affiche, plutôt que de décider de semaine en semaine selon le remplissage.

Les Studio se préparent donc pour une année 2021 « normale », tout en restant fébriles et suspendus aux annonces gouvernementales qui peuvent contrarier les plans à tout moment.

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