Une campagne en campagne

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Depuis plusieurs mois, la vie municipale vascille dans plusieurs communes d’Indre-et-Loire : La Membrolle-sur-Choisille, Vallères, St Branchs, l’Ile Bouchard, Limeray, Monts… Dans plusieurs communes, une crise démocratique s’est installée avec de multiples démissions des conseils municipaux obligeant à l’organisation de nouvelles élections anticipées pour renouveler les instances municipales. Des crises internes qui touchent essentiellement des petites communes sur fond de conflit avec le maire en place, mais aussi de malaise palpable dans l’exercice du pouvoir.

A Noizay, commune de 1150 habitants, située au coeur du Vouvrillon, entre Tours et Amboise, le Conseil Municipal a ainsi perdu quatre membres dont trois adjoints en début d’année. Des démissions qui viennent s’ajouter aux trois déjà effectives depuis 2014 et les dernières élections municipales qui avaient consacré Jean-Pierre Vincendeau, maire alors sortant, et sa liste avec plus de 73% des voix. Quatre ans après ce plébiscite, c’est donc un tiers de l’assemblée municipale qui a démissionné. Conséquence : les Noizéens sont appelés de nouveau aux urnes le dimanche 08 avril lors d’une élection intermédiaire qui d’ordinaire peine à séduire et à déplacer les foules. A 10 jours du scrutin, en cette fin mars, une visite sur place suffit pour se rendre compte que l’élection du 08 avril prochain ne fait pas exception à la règle.

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Les électeurs auront ce 08 avril la responsabilité de départager les deux listes candidates, celle du maire sortant Jean-Pierre Vincendeau (ndlr : que nous n’avons pas réussi à joindre lors de notre reportage) et celle « Une ambition rassembler tous les Noizéens » conduite par Willy Guignard. Ce dernier, cadre bancaire dans le civil, par ailleurs dirigeant du Tours Volley Ball n’est pas un inconnu en politique. Membre de l’UDI, il est également proche de plusieurs élus en place dans le département, en témoigne le soutien de Christophe Bouchet, le maire de Tours, venu en février lui rendre visite lors d’un déjeuner en compagnie d’un vigneron du coin.

Pourtant Willy Guignard refuse de politiser l’élection : « Notre liste n’est pas politique, il y a des personnes de sensibilité de gauche, d’autres de droite, mais ce qui nous rassemble c’est l’amour de Noizay, l’envie de faire bouger les choses. » Et d’y associer les associations et les acteurs de la commune nous dit-il. Car loin des clichés et de certains discours sur la notion de « village doirtoir », Noizay a également une vie locale riche avec pas moins de 18 associations sur la commune. Associations sportives, culturelles, de broderie, d’art floral ou encore sur le patrimoine… Des structures primordiales et indispensables à la vie locale. « Le rôle d’un maire c’est d’écouter et de prendre les décisions derrière » témoigne ainsi le candidat.

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Noizay : commune de la campagne tourangelle comme tant d’autres

Noizay est une commune comme beaucoup d’autres. Ancien village rural, vivant essentiellement des activités agricoles et plus particulièrement viticoles, Noizay a le charme de la campagne tourangelle, coincée entre la Loire et le côteau où s’épanouissent les vignes qui donneront le fameux vin de Vouvray. En cet après-midi nuageux, les voitures passent et défilent au croisement des deux axes principaux qui amènent au bourg.

Le bourg, ancien, ressemble à beaucoup d’autres avec son église, sa mairie jumelée à l’école, son monument aux morts… des bâtiments anciens, faits de vieilles et belles pierres où ont été gravées il y a plus d’un siècle la représentation de la République : les fonctions originales des bâtiments (mairie / école communale laïque) mais aussi la devise républicaine… Image d’Epinal de la France des campagnes.

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Au cœur de ce bourg, l’école donc. 16h30, le son des enfants s’apprêtant à quitter l’école se couvre de celui des voitures qui se garent sur la place. Il est à peine 16h30 et les parents affluent pour la sortie de l’école. Gaëlle, une mère de famille est de ceux-là. Comme beaucoup de Noizéens cette dernière travaille dans l’agglomération tourangelle. Habitant depuis quelques années ici, ce qu’elle est venue chercher à Noizay c’est avant tout le cadre de vie et le calme d’une vie en campagne « beaucoup moins étouffante qu’en ville » nous dit cette trentenaire, mère d’une petite fille, qui vivait auparavant à La Riche. « Nous étions en location et voulions acheter, mais les prix dans l’agglomération étaient trop élevés. Nous avons trouvé à Noizay le bon compromis, on a l’espace que l’on souhaitait sans être trop éloignés de Tours ». Des néo-ruraux qui modifient forcément la physionomie de la commune avec leurs propres attentes, leur mode de vie entre campagne et ville…

A quelques mètres de là, Fabien vient chercher également ses enfants. Lui aussi travaille à Tours et évoque Noizay comme une commune « un peu dortoir ». « Dans la semaine, le seul moment où le bourg vit c’est à la sortie de l’école, mais les gens viennent juste chercher leurs enfants et 5 minutes plus tard, tout est redevenu calme ».

L’école, un pan primordial et indispensable de la vie d’une commune, un facteur qui témoigne également du dynamisme de celle-ci. Une école qui fonctionne c’est en effet un signe que la commune attire les familles et donc que la commune se renouvelle.

Sortie d'école
Sortie d’école

Avec l’école, l’autre élément qui témoigne souvent de la vie communale ou de son absence, c’est les commerces. A Noizay on en trouve trois dans le bourg. Un salon de coiffure, une épicerie de proximité et un café-restaurant, tous situés les uns en face des autres face au jardin récemment aménagé. Cette opération d’aménagement réalisée l’an passé fut importante pour une telle commune, s’inscrivant dans le plan d’embellissement du bourg porté par la municipalité. Une opération qui était nécessaire à en croire les témoignages récoltés mais qui laisse quelques regrets.

A l’épicerie, on regrette notamment un manque de concertation, notamment sur la question des places de parkings. « On nous a enlevé celles devant les commerces pour mettre en place des bancs. C’est bien les bancs mais concrètement personne ne vient s’y asseoir, alors que pour les commerces on sait très bien que dans des petites communes comme ici, c’est important de pouvoir se garer devant ». Ici, l’épicerie fonctionne bien nous dit-on. Une épicerie où on trouve un peu de tout et qui fait office de dépannage mais aussi de courses de premières nécessités. En face, en cet après-midi, le bar-restaurant est vide quand nous y entrons. « L’antre-potes » fonctionne surtout le midi, sur le volet restaurant. « Le restaurant ouvrier fonctionne bien, par contre l’activité bar n’est plus rentable dans les villages. Les gens ne viennent plus ». Les locaux de « L’antre-potes » appartiennent à la commune qui les met en location-gestion. Une façon d’assurer la continuité de ce lieu de vie qui comme dans d’autres communes rurales a diversifié ses activités en devenant relais-postal par exemple.

Au cours de notre conversation avec le patron des lieux, deux clients entrent boire un café ou une bière. Deux habitués qui passent régulièrement, un quart d’heure ou une demi-heure au plus, le temps d’une consommation avant de s’en retourner chez eux. Pour les deux clients, ce genre de lieux reste indispensable au village. Le plus âgé des deux, un retraité, regrette néanmoins la convivialité d’autrefois qui animait ces lieux. Entre deux phrases, le patron réceptionne ou donne des colis de la Poste aux clients demandeurs.

Le nouveau jardin au niveau de la salle des fêtes laisse des regrets à certains.
Le nouveau jardin au niveau de la salle des fêtes laisse des regrets à certains.

« Du bon sens et de la concertation »

Devant, quelques enfants s’amusent sur les bancs installés. « Ils auraient pu penser à mettre des jeux pour enfants dans le jardin » explique l’épicier de son côté, « pourtant certains l’avaient demandé » croit-il savoir. « Moi j’attends d’un maire qu’il fasse oeuvre de bon sens, même s’il y a des contraintes que je comprends » explique notre interlocuteur quand on l’interroge sur ses attentes.

« De la concertation et du bon sens » deux éléments de réponses qui reviennent beaucoup dans la bouche des personnes rencontrées, tout comme la proximité :  » Je ne veux pas d’un maire que l’on ne connaît pas, on est une petite commune, je pense que le maire doit être accessible » nous dit-on devant l’école.

Dans cette commune entre Amboise et Tours, l’autre enjeu est aussi la sauvegarde d’un équilibre entre les activités traditionnelles comme la viticulture et celles liées à la périurbanisation. « Les choses changent mais je pense qu’il faut être vigilant au respect du patrimoine et qu’il faut arrêter le mitage des terres agricoles et viticoles » explique ainsi Fabien. Un enjeu partagé par Willy Guignard pour qui les terres viticoles doivent non seulement être protégées mais aussi être mises en avant comme étant source de richesse, à l’instar du château de Noizay : « Nous avons la chance d’avoir un relais-château, c’est un atout pour Noizay qui doit être mis en valeur ».

Quant aux élections de dimanche prochain, lors de notre dernier passage dans la commune à 10 jours du scrutin, beaucoup avouent en avoir entendu parler que de loin. « On a appris il y a 6 mois que ça chauffait oui. Certains disent que le maire est trop autoritaire, mais j’avoue que j’ai suivi cela de loin » reconnait Gaëlle.

J’ai entendu parler des élections et j’ai reçu un tract d’une liste ce jour-même, mais rien jusque-là. Je sais qu’il y a des réunions qui se tiennent au dernier moment la semaine prochaine » raconte de son côté Fabien. Autour, les parents venus chercher leurs enfants sont déjà repartis et le bourg de Noizay est dorénavant vidé. Dimanche il devrait s’animer un peu, à condition que les Noizéens répondent à l’appel des urnes.

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