[Journal de bord #2] Deux semaines de confinement en Touraine : « Je vous en mets un petit peu plus ? »

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Ces temps-ci, le coronavirus occupe toute l’actualité. Quand on ne parle pas directement des conséquences sanitaires du Covid-19, on évoque son impact économique, social, culturel ou sportif. Tout ça dans une ambiance particulière : celle d’une Touraine confinée, au moins jusqu’au 15 avril. Voici le 2e épisode du journal de bord confiné de la rédaction de 37 degrés.

Lundi 23 mars on aurait dû publier une salve d’articles annonçant les résultats du second tour des élections municipales. A la place, les chiffres qui occupent notre quotidien sont ceux du nombre de victimes de la maladie (décédées ou hospitalisées), et l’inquiétude sur le nombre de lits de réanimation disponibles autour de nous : sera-t-il suffisant ? On parle aussi des masques par milliers, par millions, par milliards. Juste avant cette crise sanitaire, on louait le recyclage et le réemploi. Paradoxalement, c’est un outil jetable non recyclable qui fait officiellement son entrée dans la liste des produits de première nécessité. Qui a dit que le Covid-19 était un virus écologiste ? On pourrait pousser le débat, car d’un autre côté la pollution n’a jamais été aussi faible en ville selon les cartes satellites publiées et l’heure est à la réduction des actes de consommation. Finalement, le confinement permet de se poser des questions, d’engager des réflexions sur notre société. On se dit qu’il en restera forcément quelque chose…

Émissions de dioxyde d’azote entre le 14 et le 25 mars 2020. © Copernicus Sentinel data (2019-20), processed by KNMI, ESA

Mardi 24 mars il fait toujours aussi beau mais le thermomètre flirte dangereusement avec la barre symbolique de 0° Celsius. C’est le confinement alors on prend le temps d’écrire 0° Celsius en entier, on pourrait presque faire la comparaison avec les degrés Fahrenheit. A l’instant T, dans les vignes, le froid inquiète plus que le coronavirus. Risque de gel, encore, à plus d’un mois des Saints de Glace. Quant au Covid, plus de ventes, mais on verra plus tard. A la différence des maraîchers qui devront jeter les asperges invendues sans en tirer un centime, les vignerons pourront encore vendre leurs bouteilles restées en stock pendant plusieurs années. Les millésimes récents étant qualitatifs, peut-être même qu’elles prendront de la valeur.

Mercredi 25 mars c’est la peur du cambriolage. Quand on roule, les gendarmes conseillent de scotcher son attestation de déplacement dérogatoire contre la vitre arrière de sa voiture pour faciliter les contrôles. Quant à la carte d’identité, ils suggèrent de la présenter sans ouvrir sa fenêtre pour éviter les risques de contamination. Parce qu’ils n’ont pas de masques. En commentaires, on fait remarquer qu’une telle pratique expose son adresse à la vue de tous et favoriserait les vols. Cela dit, en ces temps où la règle est de rester chez soi, il faut être un malfrat sacrément organisé pour réussir son coup.

Jeudi 26 mars les apéros en visio c’est sympa au début mais on en voit vite les limites. Bugs de connexion, images floues, blagues à retardement… Le bruit de deux verres qui s’entrechoquent fera tellement du bien dans quelques semaines. On réfléchit à conserver les attestations de sorties dérogatoires pour faire un concours à la fin du confinement : celui ou celle qui en a rempli le plus grand nombre paye sa tournée. A la rédaction, on a déjà une petite idée de l’identité de la personne concernée. Question sérieuse : dans 50, 60 voire 80 ans, ces documents jaunis par le temps finiront-ils derrière les vitres d’un musée ? Sommes-nous en train de vivre un moment historique ou un mauvais rêve mondial ?

Vendredi 27 mars il est temps de peaufiner sa culture cinématographique, de regarder des concerts en visio, de découvrir la version web du jeu de société Blanc Manger Coco. Chiller en confinement rime bien souvent avec écran. Les réseaux sociaux sont devenus un marqueur de nos journées, on les ouvre, on scrolle machinalement, on tombe sur un énième débat sur la chloroquine et on regarde presque par voyeurisme, presque pour se rassurer, les avis d’experts parfois, souvent même, autoproclamés, qui en savent forcément plus que l’expert voisin. Finalement on préfère fermer l’écran et caresser le chat dont la vie n’a pas beaucoup changé ces derniers temps… On apprend deux naissances en 24h. On prend des nouvelles des proches. Plus le confinement dure, moins on a de choses à raconter. On s’inquiète pour le parquet récemment rénové et déjà détérioré par les roulettes de la chaise de bureau. Le temps d’acheter un tapis n’est pas encore venu…

Samedi 28 mars, par mail, on nous demande encore si Dadju a attrapé le coronavirus. Pendant ce temps personne ne semble s’inquiéter pour David Charvet. Faire la vaisselle à longueur de journée commence à devenir harassant. Un détail quand on pense à celles et à ceux qui passent leurs journées à désinfecter leur matériel médical, leur tapis de caisse ou les bus pour éviter de surcharger encore un peu plus des hôpitaux. D’ailleurs, comme tout le monde, le frigo se vide, il faut penser à aller faire ses courses pour nourrir la famille. Gants ok, pense à ne rien toucher de plus que ce que tu dois prendre… Le confinement a également formaté notre cerveau et rien que l’idée de sortir de chez soi pour aller dans un magasin où plusieurs centaines de personnes ont transité peut devenir une angoisse. Pourtant, il y a 15 jours, une éternité diront certains, on a certainement pris beaucoup plus de risques qu’actuellement, mais la peur, devenue presque irrationnelle, n’avait pas encore pénétré notre chemin de pensée.

Dimanche 29 mars nous voici à l’heure d’été. Quelle importance quand on vit dans une époque où la montre est devenue un accessoire largement dispensable ? Ce confinement nous force à ralentir. Vous ne croyez pas qu’on en avait bien besoin ?

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