Deuxième ligne du tram de Tours : le projet peut-il capoter ?

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Depuis l’automne 2017 Tours Métropole s’est officiellement lancée dans le chantier de construction d’une seconde ligne de tramway entre La Riche et Chambray-lès-Tours. 15km et 28 stations entre deux sorties du périphérique, avec un tracé passant à proximité des deux grands sites hospitaliers de l’agglomération. 3 ans et demi plus tard, la phase d’études arrive à son terme sans consensus. Analyse.

Quand on veut s’opposer à un grand projet urbain, suffit-il de crier ses arguments très fort pour se faire entendre ? Possible, en tout cas le projet de deuxième ligne de tramway de l’agglomération de Tours, ne laisse pas indifférent et force est de reconnaître que les opposants au tracé choisi par Tours Métropole, ne manquent jamais une occasion de faire entendre leurs voix. Il y a d’abord eu la question du boulevard Royer, âprement défendu notamment par un commerçant tourangeau, Richard M. Ce dernier est rejoint depuis peu au sein d’une convergence des oppositions contre le passage par Béranger par un autre particulier, Franck L. qui depuis des semaines, cherche inlassablement, à se faire entendre via les réseaux sociaux ou par mail auprès des médias locaux. Ce dernier, est partisan d’une deuxième ligne du tram de Tours qui desservirait les Tanneurs plutôt que le Boulevard Béranger. Arguments avancés : les rames passeraient devant Bretonneau, Mame ou encore la fac de lettres. Envisagée au moment des études de tracés, l’option n’a jamais été retenue. Le Syndicat des Mobilités de Touraine s’en est justifié en ce début de printemps 2021, invoquant des obstacles techniques (virages complexes, arbres à abattre, faibles largeurs de rues) à différents endroits comme le Boulevard Preuilly, Rue des Tanneurs ou Place Anatole France.

Insuffisant pour convaincre l’internaute qui maintient ses actions et trouve même écho auprès du groupe politique Les Progressites de Tours (proche d’LREM).

Le sujet sensible des arbres ou de la place Jean Jaurès

Même si le débat est parfois parasité par de fausses informations comme la disparition du marché aux fleurs (toujours démentie) mais aussi des luttes de pouvoirs politiques, on ne peut pas nier que le parcours du tram B divise fort. Par exemple, l’ancien maire de Tours Christophe Bouchet critique un parcours peu attractif et trop chargé en virages. Pierre Commandeur des Progressistes s’inquiète pour l’avenir de la Place Rabelais et de son marché. Ce n’est pas tout : le groupe politique C’est Au Tour(s) du Peuple mené par l’ex LFI Claude Bourdin raille le prix des travaux et réclame le choix d’un trambus à hydrogène plutôt que des rails. Enfin, militants, élus ou associations comme l’Aquavit agitent le chiffon rouge autour des arbres du mail que certains voient condamnés dans leur ensemble par le chantier.

Voilà une somme de critiques dantesque, argumentée, capable de semer le doute dans beaucoup d’esprits. Et ce n’est pas fini… Depuis quelques semaines, le président de Tours Métropole doit faire face à des habitants de la Rue de la Mairie, à La Riche (commune dont il est également le maire). Plusieurs dizaines de maisons et immeubles vont être rasés en vue du passage du tram ce qui va entraîner des expropriations. Or, plusieurs propriétaires jugent les prix de rachat trop faibles et ne se cachent pas pour le faire savoir en public, au point d’aller manifester à l’entrée d’un conseil municipal et de regretter le passage de Wilfried Schwartz par une porte dérobée ce qui a rendu impossible toute rencontre.

Une reprise en main du président Schwartz

A 5 ans de la date inaugurale envisgée pour la ligne B, cette série d’écueils écorne sérieusement l’image d’un projet structurant, amené à transformer durablement la ville comme a pu le faire la ligne A dans les années 2010. Trop discrète et sur la défensive, Tours Métropole s’est trouvée dans l’obligation de réagir car il n’y aurait rien de pire qu’un transport en commun mal accepté par la population. Le risque final : qu’il soit boudé et n’atteigne pas les chiffres de fréquentation escomptés (50 000 voyages par jour en semaine lors des périodes scolaires). Cela aurait notamment pour conséquence de ne pas diminuer autant que prévu le trafic automobile.

Il y a quelques jours, l’agglo a donc cherché à reprendre la main. A rassurer l’opinion. Ce n’était pas prévu car 2021 est plutôt une année d’études avant l’enquête publique officielle en 2022 et le début des travaux programmé pour 2023. Wilfried Schwartz a d’abord annoncé la rencontre prochaine avec une délégation des riverains mécontents. Deuxième étape jeudi 1er avril : une conférence de presse entouré des maires des communes de Tours, Joué et Chambray qui seront traversées par la ligne B ainsi que de son vice-président aux transports Christophe Boulanger. L’idée était de faire point d’étape sur les opérations en cours. Avec des billes comme la présentation d’images de synthèse présentant le futur de certaines voies empruntées par le tram au sud du Jardin Botanique de Tours ainsi qu’à Chambray. Il a été question du verdissement (par exemple plus de verdure et le recours à un gazon moins consommateur d’eau pour les plateformes). Il a également reprécisé le budget : 430 millions d’€ comprenant à la fois les travaux mais aussi l’extension du centre de maintenance, l’éventuel prolongement de la ligne A vers l’aéroport et l’aménagement d’une ligne de bus à haut niveau de service vers les Atlantes. Un package global qui fait dire à l’élu que le coût final au kilomètre ne sera pas plus élevé que le chantier précédent (l’Etat s’est déjà engagé sur des aides conséquentes).

Un effet domino sur d’autres projets métropolitains ?

Dans un souci de transparence, Tours Métropole annonce la diffusion d’une série de documents préparatoires et prépare le lancement d’une concertation sur l’avenir de la Place Jean Jaurès de Tours, futur point de raccordement entre les deux lignes ce qui fait craindre la disparition des fontaines du XIXe siècle que beaucoup jugent emblématiques et intouchables. Le programme qui débutera en juin vise donc à recueillir les avis de la population pour envisager au lieu un futur le plus consensuel possible, en dépit de contraintes techniques conséquentes. 4 mois sont prévus (juin-octobre). Sans doute pas de trop : les débats s’annoncent très animés, la droite étant particulièrement véhémente sur la question. Le côté conservateur de la ville s’exprime ici dans toute sa tradition.

Il ne faut pas se leurrer : les critiques sur la deuxième ligne de tramway ne retomberont pas dans les prochains mois. Aux recours gracieux déposés à la Métropole pour sauver les arbres de Béranger suivront probablement des recours judiciaires. Seule une – fort probable – déclaration d’utilité publique par l’Etat finira sûrement par calmer les esprits. A ce jour, la ligne B n’est pas en danger. On n’ira pas non plus écrire qu’elle vacille sur ses bases (d’ailleurs Wilfried Schwartz a bien précisé que son tracé était définitif, que seuls des aménagements à la marge étaient désormais envisageables). L’agglo se voit tout de même dans l’obligation de construire une stratégie de communication capable de ressusciter de l’adhésion au chantier qui donnera le ton du mandat de ses élus… De sa capacité à se dégager du bourbier dépendra en grande partie la réussite globale des projets de ces prochaines années.

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