Désir Désirs : une programmation pléthorique pour les 30 ans du festival

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On en connait peu des événements culturels tourangeaux qui ont 30 ans d’âge. Mais c’est le cas du festival queer Désir Désirs, à la base dirigé vers le cinéma mais qui se déploie aussi autour de la littérature, de l’art contemporain, de la danse… Un festival pluridisciplinaire et plus inclusif que jamais dont le cœur de la programmation se concentre sur ce mois de janvier 2023 à Tours et dans plusieurs villes du département (Saint-Pierre-des-Corps, Azay-le-Rideau…). Retour sur cette expansion avec l’un des fondateurs Philippe Perol et le coordinateur actuel Mickaël Achard.

« Ce festival est né parce qu’il fallait que je le fasse » commente Philippe Perol. « On sortait des années Sida et moi d’un deuil très difficile. Ma seule façon de guérir de cette douleur à moitié clandestine était de crier la chose publiquement via un événement culturel pour exprimer notre désir, montrer qu’on était là, qu’on faisait partie de la famille » ajoute-t-il dans la foulée. Toujours membre de l’équipe des cinémas Studio, l’un des fondateurs de Désir Désirs se souvient parfaitement de ce qui a motivé la création de l’un des tous premiers festivals culturels axé sur les questions de genre, et les revendications de la communauté LGBT.

Et si « le public est venu dès le départ, puis revenu d’année en année », l’ancrage de la manifestation n’a pas été si simple dans une société bien moins ouverte qu’aujourd’hui. « La présence des institutionnels était très confidentielle » relève ainsi Philippe Perol. « A Tours c’était l’époque du maire Jean Royer (élu de droite, ndlr), il n’y a que quand la ville est passée sous Jean Germain (en 1995) que la municipalité a commencé à nous soutenir. C’est même l’adjoint à la culture de l’époque Jean-Pierre Tolochard qui m’a proposé de demander une subvention. » 30 ans plus tard, les principales collectivités locales font toutes partie des partenaires de Désir Désirs, le Conseil Départemental (de droite) ouvrant même les portes de son Hôtel Gouin de Tours à une grande exposition de Tom de Pékin (à partir de lundi 16 janvier).

« J’ai lâché le festival quand j’ai été certain qu’il pourrait continuer sans moi » souligne son créateur, heureux d’assister à une telle évolution. En 2023 Désir Désirs c’est la bagatelle de 50 événements culturels répartis non pas sur plusieurs jours ni plusieurs semaines mais sur plusieurs mois puisque des événements estampillés partenaires du programme auront lieu à l’approche des beaux jours. « C’est un festival à géométrie variable qui ne fait que suivre les évolutions de la société. Même si on a pu lui reprocher de ne pas être assez militant, je pense que ce qui fait qu’il s’est installé dans le temps c’est qu’on a tout de suite montré qu’on ne visait pas un public particulier, qu’on a eu le soutien des Studio et que les subventions que l’on a reçues étaient prises sur les budgets culturels et non sur ceux du social » résume Philippe Perol.

Coordinateur du projet depuis presque une décennie, Mickaël Achard ne dit pas autre chose : « C’est un festival fréquenté par beaucoup de jeunes et qui mélange plein de publics. Quand on remplit une soirée avec 700 personnes ou une salle avec 250 personnes, je ne pense pas qu’il y a seulement des gens issus de la communauté queer. Ce qui l’explique c’est qu’on traite de sujets universels. L’amour, l’identité, ça parle à tout le monde. Quand une personne homo va voir un film avec une histoire d’amour hétéro, elle ne se pose pas de questions. » Et c’est vrai que les orientations de programmations vont vers des sujets très présents dans le quotidien, ou l’actualité (le monde arabe, la vieillesse ou les migrations ces dernières années puis le mouvement MeToo pour une partie de cette édition 2023 qui fait également honneur au Tourangeau Balzac, un des premiers grands auteurs à avoir inséré des personnages gays dans ses romans).

Festival « ouvert », pensé par une équipe de 8 bénévoles, Désir Désirs s’apprête donc à vivre le cœur de sa 30e édition du 18 au 24 janvier avec la partie cinématographique de sa programmation centrée sur les cinémas Studio de Tours, Rue des Ursulines. Suivra un peu plus tard un premier salon tourangeau du livre queer porté par Bédélire ou la Bibliothèque Centrale. Sans oublier un travail éducatif avec l’école des Beaux-Arts de Tours où l’université (certains étudiants ont construit des podcasts exprès pour l’occasion).

A 30 ans, l’événement continue donc d’innover, de questionner… De susciter des rencontres. Rien qu’autour du cinéma ce sont 15 personnalités invitées qui vont s’exprimer ces prochains jours, essentiellement des femmes ou des personnes issues des minorités, un choix délibéré. De quoi se rendre compte qu’en trois décennies le cinéma a beaucoup évolué : « Il y a trente ans les films sur ces questions-là abordaient beaucoup le Sida, ou des sujets d’hommes » pointe Mickaël Achard. « Et jusqu’à récemment, on avait beaucoup de films dramatiques car la violence, le suicide, c’était la réalité des personnes LGBT. Aujourd’hui, le cinéma reflète leur inclusivité avec des comédies, des regards plus divers qui montrent la diversité des vécus. Au final, le cinéma ne fait que refléter la société. »

Pour tout savoir sur la programmation, rendez-vous sur le site de l’événement. Un livre racontant l’histoire du festival est également disponible dans les librairies La Boîte à Livres, Les Temps Sauvages ou La Vagabonde.

Un degré en plus :

A rappeler que Désir Désirs est membre fondateur du réseau des festivals queer de France et que Tours a déjà été par deux fois théâtre d’une réunion nationale de ces événements, avant un prochain rendez-vous à Grenoble en 2024 rassemblement plus de 20 initiatives. Un réseau encore en construction mais qui permet déjà des répercussions grâce à l’entraide (échange de films à programmer ou de sous-titres, par exemple).

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