Des coups et des câlins

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Sport de vitesse et de contact, le roller derby est passé en quelques années d’un loisir folklorique à une discipline explosive, où la tactique est primordiale. Reportage lors d’un entraînement à Tours Nord.

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Au gymnase Ronsard, « pas besoin d’être une montagne de muscles ou de savoir bien faire du roller » pour s’essayer au derby : il faut juste un bon esprit et de la volonté. « C’est un sport exigeant » explique Monia, adepte du roller depuis l’enfance mais qui a stoppé le basket qu’elle pratiquait en compétition pour chausser les fameux patins aux roues non alignées, « comme ceux de ta grand-mère ! » Depuis deux ans, et malgré une blessure, elle est de tous les entraînements du mardi et du vendredi soir pour coacher et encadrer la vie du club tourangeau, l’un des premiers à se monter sous l’égide des Nordiks quand la France a découvert la discipline il y a une petite quinzaine d’année.

Les origines du roller derby se trouvent aux Etats-Unis, dans les années 1920 : « à la base c’était pour divertir le peuple lors des courses d’endurance. Quand ils ont commencé à se mettre des coups ça a attiré plus de monde » raconte la jeune femme. Un temps oublié, il est réapparu au début des années 2000, et définitivement popularisé par le film Bliss (2009, avec Drew Barrymore et Ellen Page).

Un sport en évolution constante

Chose rare pour les sports collectifs, les filles pratiquent plus que les garçons (ce qui n’était pas le cas au XXème siècle). Mais, stop aux préjugés, « le folklore du début avec les nénettes affriolantes en tutu et bas-résilles et les surnoms pour toutes les joueuses c’est fini » prévient Monia. On se délecte tout de même du nom des différentes formations : les Simones d’Orléans, les K.O’n’Ass à Auxerre… et les Silly Geez à Tours (les oies folles et leur maillot rose flashy).

D’année en année, le derby s’organise et se professionnalise : « les règles sont sans cesse en train d’être discutées, elles sont passées de 18 pages à plus de 80 aujourd’hui » lâche la sportive. Y sont notamment précisées les zones du corps avec lesquelles on peut bloquer l’adversaire, et ce qui est interdit (non au croche-pied ou aux coups de coude). La devise est claire : « pas de fautes inutiles, cela fournit trop de munitions à vos adversaires pour faire la différence de points. »

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Car l’objectif du derby est de scorer au max, en un temps limité. Deux équipes de 5 s’opposent sur une piste ovale de 54m de long pendant deux mi-temps de 30 minutes. Sur la ligne de départ, coiffées d’un casque étoilé, les jammeuses de chaque formation font face à un pack constitué des 8 autres joueuses qui ne doivent jamais être à plus de 3m les unes des autres. L’objectif des jammeuses est alors de réussir à s’extraire de ce groupe, faire le tour de la piste et franchir une nouvelle fois la mêlée pour marquer des points (elles en gagnent un pour chaque joueuse dépassée mais n’ont que deux minutes pour y parvenir). A la fin, pas question d’égalité : il faut forcément un vainqueur.

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Un Tourangeau en équipe de France

Face à l’urgence, ça se bouscule dès le coup de sifflet et le pack ressemble vite à une belle foire d’empoigne pour empêcher les jammeuses d’avancer. Mais gare aux mauvais coups, sous peine d’aller « en prison » pour une minute. D’où l’intérêt de communiquer et mettre en place la meilleure stratégie possible : « c’est super collaboratif, tout le monde s’entraide » commente Monia qui fait passer le message à Clothilde et Sophie  des « fresh » venues essayer pour la première fois.

A Tours, une vingtaine de filles pratiquent le derby et évoluent en troisième division (la N2) : « l’an dernier on a terminé à la 4ème place sur 6. Notre objectif c’est de progresser dans le classement tout en continuant de s’éclater » explique Monia. Problème : les Silly Geez ont du mal à garder leurs joueuses souvent de passage le temps de leurs études.

Avec une moyenne d’âge plus élevée (autour de la trentaine), la petite vingtaine de garçons du club est plus régulière : après une 7ème place en Coupe de France l’an dernier, les Tourangeaux ont terminé au 3ème rang cette année et cherchent désormais à disputer des matchs internationaux au sein de la Men Roller Derby Academy (MRDA). Pour cela, ils sont bien aidés par la présence de leur leader Yoan Mery, sélectionné en équipe de France et qui a récemment participé à la Coupe du Monde.

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« En derby t’as beau être une star, seul, tu ne feras rien »

Jacky, 42 ans, fait partie de cette formation masculine (les Traek’Ass) et il mesure la hausse rapide de niveau : « on est en construction permanente pour trouver de nouvelles tactiques. Il y a toujours un club qui a un nouveau truc et il faut s’adapter. » D’où l’importance du collectif : « t’as beau être une star, seul, tu ne feras rien » dit-il. C’est ce qui a convaincu Sébastien, débarqué à Tours en provenance de Lyon pour compléter l’équipe : « ce qui m’a tout de suite plu c’est de voir des filles se foutre sur la gueule mais se faire des câlins après. » Avec les autres, il prépare déjà leur grand rendez-vous annuel, leur saison se jouant sur un seul week-end de trois jours à Pâques, à Toulouse.

A la différence d’autres sports collectifs, les championnats de roller derby sont resserrés et rassemblés dans les quelques villes qui ont les ressources pour organiser les rencontres, notamment parce qu’il faut beaucoup d’arbitres : « malgré le soutien de la mairie, on n’a pas encore assez de poids pour ça à Tours » explique Monia même si des rencontres sont ponctuellement organisées, par exemple à Ballan-Miré. Cela dit, quand le club se déplace, il trouve toujours le moyen de se distinguer : « on part avec une bonne team de supporters, les gars encouragent les filles et inversement. On se déguise, on siffle… L’an dernier même à 4-5 on a fait un dawa de dingue et on s’est fait repérer. »

Un degré en plus :

Entraînements les mardis et vendredis de 20h à 22h au gymnase Ronsard à Tours Nord. Initiations possibles toute la saison. / Infos : www.nordiksdetouraine.fr

Photos : Pascal Montagne pour 37°

« Des coups et des câlins », un article paru initialement sur 37° Mag, le magazine papier-connecté de 37 Degrés.

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