A quoi va ressembler le millésime 2019 en Indre-et-Loire ?

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Après deux années de gel en 2016 et en 2017, les vignerons tourangeaux avaient bénéficié d’une année 2018 quasiment idéale. Un printemps sans encombre et un été ensoleillé malgré un manque de pluie. Le résultat est salué de partout : raisin en quantité conséquente pour refaire les stocks et qualité comparable à des années de référence comme ont pu l’être 1989 et 2003. L’accalmie n’a pas vraiment duré, et 2019 s’annonce bien moins positive. On fait l’état des lieux alors que les vendanges démarrent…

Certaines exploitations cherchent encore leurs équipes de vendangeurs, d’autres ont déjà attaqué la récolte. Tout s’accélère dans les vignes en Indre-et-Loire, au cours d’un mois de septembre au temps ensoleillé, sans grande menace de pluie. L’absence de précipitations c’est souvent un avantage en fin d’été pour éviter de se retrouver avec des fruits pourris, mais sa raréfaction tout au long de l’été est un gros souci. « La vigne a soif » résume Benoit Gauthier, le président de la Fédération des Associations Viticoles de l’Indre-et-Loire et de la Sarthe. Depuis début juillet, pratiquement pas de précipitations dans le département… et donc des conséquences notables sur le développement de la vigne : « Les racines et les feuilles fatiguent, notamment sur les terrains moins argileux. Le raisin est flétri, plus concentre, et les grains ont moins grossi » poursuit le représentant de la profession. Vers Bourgueil, on a relevé à peine 25mm d’eau en trois mois, situation comparable au fameux été 1976.

Et s’il n’y avait eu que la sécheresse… Cette année, le vignoble ligérien a aussi dû affronter du gel printanier, un peu de grêle et de très fortes chaleurs en début d’été : « On a eu beaucoup de fleurs qui ne se sont pas transformées en raisin et parfois de la grillure sur les chenins de Vouvray et Montlouis » observe pour sa part notre chroniqueur vin Guillaume Lapaque. Selon lui, « la maturité n’est pas optimale » et on peut estimer que la récolte sera inférieure de 30 à 50% par rapport aux espérances.

Un millésime très incertain

Peu de vin, mais sera-t-il de qualité ? La question se pose… « Historiquement, des années chaudes on en a déjà eu : 1947, 49, 64, 76, 89, 2003… Chaque millésime est différent mais on sait que cela donne en général des vins plus ronds, plus puissants ou les acidités sont plus faibles. Il va falloir que le millésime se fasse » estime Benoit Gauthier qui se veut optimiste :

« Après le grand millésime 2018, le 2019 sera grand en qualité, petit en volume. »

Guillaume Lapaque est plus prudent, plus inquiet aussi : « C’est étrange… Vu de l’extérieur les gens se disent que quand il fait chaud et beau le vin sera bon mais là c’est plus compliqué notamment pour les rouges pour lesquels on fait macérer le jus et la peau. Là, le ratio entre les deux inhabituel, avec une proportion de peau plus importante dans le jus, ce n’est pas forcément rassurant. »

Des questions se posent également sur les dates de vendanges. Ceux qui ont commencé sont plutôt situés à l’est de la Touraine (Amboise, Vouvray), tandis que dans l’ouest on attend traditionnellement fin septembre début octobre : « Il n’y a pas d’urgence, le départ se fera entre le 15 et le 25 » confirme Benoit Gauthier. « Pour le cabernet franc il faudrait encore patienter mais les feuilles sont en train de jaunir, signe qu’il n’y a plus rien à attendre de la vigne. La plante est fatiguée, donc on se pose des questions et on a rarement connu autant d’incertitude » pointe pour sa part Guillaume Lapaque.

Chercher des solutions pour l’avenir

Face à une telle situation, Benoit Gauthier joue le pragmatique : « C’est la nature, on n’y peut rien. On travaille la plante, on l’aide, on l’entretient, mais le résultat ne nous appartient pas d’autant que nous n’avons pas d’irrigation, contrairement à d’autres zones dans le sud de la France ou en Europe. » « Ce sont les prémices de ce que le dérèglement climatique peut nous amener » analyse pour sa part notre chroniqueur.

« Si c’est une année exceptionnelle ça ira, mais on voit bien que ces bizarreries se multiplient. Autant les céréaliers peuvent adapter leur stratégie d’une année sur l’autre, autant avec la vigne qui est une plante pérenne que l’on garde 50 ou 100 c’est plus complexe. On dit qu’il suffirait d’utiliser des cépages cultivés plus au sud comme le merlot mais c’est compliqué car depuis 1936 toute la communication commerciale se base sur le fait que le vouvray c’est du chenin ou le Bourgueil du cabernet franc. On aurait donc du mal à imaginer autre chose. »

Guillaume Lapaque

Alors que faire ? « Peut-être moins enherber les vignobles pour laisser plus d’eau à la plante ou stopper l’effeuillage des vignes utilisé jusqu’ici pour réduire l’humidité et ainsi éviter les pourritures. Cette année, cette action a favorisé la dégradation des fruits » avance Guillaume Lapaque. La réflexion ne fait que commencer.

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