Coronavirus : au CHU de Tours, « on est face à une vague, il ne faut pas que ça devienne un tsunami »

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Le Professeur Louis Bernard est le chef du service dédié aux maladies infectieuses au CHU de Tours. Ce samedi c’est lui qui nous appelle pour faire le point sur la situation. Ses mots sont clairs : le confinement n’est pas assez respecté et l’épidémie se répand dangereusement en Indre-et-Loire. Interview.

Comment ça va dans votre service ?

Notre service est plein : les deux tiers des patients sont infectés par le coronavirus, le tiers restant est en attente de résultats. Nous, on tient. Ce qui nous manque le plus c’est l’air extérieur, comme pour tous les gens confinés. D’ailleurs j’ai l’impression qu’une partie de la population ne comprend pas bien ce qu’il se passe. On est inquiet. Quand je sors et que je vois l’incivisme, ça me donne envie de hurler : ces personnes ne se rendent pas compte que moins elles seront confinées, plus l’épidémie va se propager, plus le pic sera important, moins on sera en capacité de soigner, plus les sujets âgés feront les frais de ces comportements inadaptés.

Quand on regarde les derniers chiffres de l’Agence Régionale de Santé on voit 49 cas en Touraine. Cela peut paraître faible…

C’est ce qu’on appelle le début de l’épidémie. Ce qui s’est passé le week-end dernier inadmissible. Mercredi et jeudi j’ai vu un pic de personnes qui ont mangé entre elles samedi soir pensant être immunisées mais elles se sont contaminées entre elles et ont déclaré la maladie. Parmi elles, certaines l’ont encore transmis à d’autres ce qui a conduit à des hospitalisations. Il faut bien comprendre que tout le monde finira par être malade ou porteur sain. Plus le pic sera haut, moins on pourra soigner tout le monde et cela aura des effets collatéraux : cela pourrait poser des problèmes en cancérologie. D’autres pathologies nécessitant des soins seront embolisées à cause du coronavirus. Ce ne sera pas lié à l’hôpital mais aux comportements à l’extérieur.

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Ces derniers jours plusieurs personnes sont sorties, incitées par le beau soleil…

Ça me rend fou. Les patients les plus fragiles vont en faire les frais. Ce matin à la boulangerie : à 7h30 il y avait trois personnes en même temps sur 2m², ce n’est pas possible, c’est hallucinant ! Les gens ne se rendent pas compte : ce virus est sournois. Imaginez une compagnie de fourmis. On pulvérise de l’insecticide. Une fourmi en prend, ramène ce produit dans la fourmilière et contamine les autres. Tant qu’il n’y aura pas un isolement total des fourmis vont tomber, on en fait partie.

Comment vont vos équipes ?

Elles tiennent, mais cela fait déjà plusieurs semaines qu’elles sont au taquet. Personnellement je n’ai pas quitté l’hôpital depuis quatre semaines. Tout le monde est solidaire et veut mener le combat. Mais si le combat vient d’une attaque extérieure il est perdu d’avance. On a vu ce qu’il s’est passé en Chine, en Italie, actuellement dans les hôpitaux du Grand-Est : il faut arrêter ces comportements irresponsables. Plus longtemps on restera confiné et très bien confiné, moins le pic sera haut et moins il y aura d’effets collatéraux. Aujourd’hui nous sommes face à une petite vague, il ne faut pas que cela devienne un tsunami.

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Comment réagissez-vous aux applaudissements pour les soignants chaque soir à 20h ?

Personnellement je ne les ai jamais vus, je ne suis pas sorti à 20h. Tant que les gens font ça à distance c’est très bien. Aujourd’hui tout le monde se mobilise pour nous aider. Par exemple la médecine de ville fait un énorme travail en montant un réseau de pré-hospitalisation pour faire du tri, le SAMU travaille beaucoup…

Sur les réseaux sociaux ce samedi on lit qu’il n’y a pas de tests de coronavirus pratiqué le week-end au CHU. Vrai ou faux ?

C’est absolument faux. J’en profite pour dire que si l’on fait un test et qu’il est négatif ce n’est pas open bar : ça ne veut pas dire qu’il ne sera pas positif le lendemain.


Un degré en plus :

Le professeur Louis Bernard en profite pour nous indiquer que le CHU de Tours « débute toute une série d’essais » sur des traitements : « Ça se met en place. On teste différentes molécules, on compare l’efficacité de traitements à l’échelle de la France et de l’Europe. On aura des résultats, mais pas tout de suite. »

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