L’amiante, ce dossier qui empoisonne la mairie de Tours

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Utilisée en France jusqu’en 1997, année de son interdiction, l’amiante est encore présente partout dans notre quotidien. En cause, son utilisation pendant des décennies, notamment dans les domaines industriels et de la construction, pour ses compétences isolantes.

Amiante Cimetière de Tours

Le cimetière la Salle amianté

Cimetière la Salle de Tours, fin septembre. Avertis par un témoin, nous nous rendons à l’endroit où sont entreposés les déchets. Au milieu des monticules divers, nous tombons sur un tas de déchets amiantés liés, à l’air libre au milieu des autres déchets (photos ci-dessous). Un tas différencié des autres, uniquement par un simple ruban de signalisation à moitié arraché, quelques barrières et l’étiquetage réglementaire pour seules protections.

Amiante Cimetière de Tours  Amiante Cimetière de Tours
D’après les informations récoltées, il s’avère que fin 2013, les employés communaux travaillant au cimetière informent leur hiérarchie de doutes sur la présence d’amiante dans des monuments funéraires. Après vérification, les doutes se confirment, la direction des services municipaux prend alors conscience du danger et informe les employés de l’interdiction désormais de toucher à ces plaques et qu’en cas de doute, ils doivent s’abstenir de tout travail dessus. A la charge des familles des défunts de faire appel à des entreprises spécialisées.

Amiante Cimetière de Tours
Pour les employés qui ont accepté de nous répondre, la mairie a pris le problème au sérieux dès que la confirmation a été faite. En revanche, certains s’inquiètent du fait qu’ils aient pendant des années travaillé au contact de ces déchets qu’ils détruisaient parfois eux-mêmes. Autre problème important, le tas de déchets amiantés est toujours présent plusieurs mois après l’alerte au milieu de la zone de stockage des déchets. Une zone où les employés passent au quotidien près de ce tas qui repose sur un sol en terre, par conséquent propice à un air poussiéreux. De l’avis d’un employé souhaitant garder l’anonymat, il serait prévu qu’une entreprise vienne retirer ce tas toxique. Impossible en revanche de savoir quand cela arrivera, ni le taux d’amiante présent et surtout pourquoi ces éléments n’ont pas été confinés comme la réglementation le stipule. Notre demande d’interview auprès de la Mairie n’ayant pas abouti, nous n’avons pas pu en savoir plus pour le moment.

Une question épineuse pour les collectivités

Cet exemple montre les problèmes liés à l’utilisation de l’amiante pendant des décennies. Si son interdiction, bien que prise tardivement en France, a limité les risques pour les générations futures, elle n’a en revanche pas éradiqué le danger. Face à toutes les utilisations passées, il est impossible de dire précisément où on en trouve et seules des alertes comme ce fut le cas en 2012 dans les sous-sols de l’Hôtel de Ville de Tours font remonter à la surface cette épineuse question. Malheureusement, pour une ville comme Tours, analyser tous les bâtiments et terrains appartenant à la municipalité engendrerait des coûts importants en diagnostics et en opérations de désamiantage. Une question financière qui a souvent raison des considérations de santé publique. L’exemple des sous-sols en 2012 a semble-t-il tout de même contribué à une prise de conscience. En effet, ces deux dernières années des bâtiments comme la cuisine centrale (qui n’avaient jamais eu de diagnostics, pourtant obligatoires depuis 1997), ont été analysés. Pour cette dernière, là encore des présences d’amiante ont été relevées, notamment dans les chambres froides. En revanche, d’autres bâtiments municipaux n’ont toujours pas eu de DTA (diagnostics techniques amiante) depuis 1997, ce qui met la Mairie de Tours hors la loi, mais surtout est un risque pour les employés comme pour le public.

Des maladies liées à l’amiante reconnues professionnelles

Le début de prise de conscience de la Mairie de Tours est semble-t-il à mettre en relation avec les maladies contractées par quatre employés municipaux de la ville de Tours ces dernières années. Des maladies qui ont été reconnues comme professionnelles et liées à la présence d’amiante. Pour Jean Jacques Prodhomme, ancien secrétaire de la CGT des communaux de Tours qui s’est intéressé de près à cette question, les pouvoirs publics ont beaucoup de retard sur les DTA (diagnostics techniques amiante) et ne prennent la mesure du problème que quand ils se retrouvent face à un cas sérieux comme en 2012. De cet exemple du sous-sol, M.Prodhomme fait part d’ailleurs de son désaccord avec la décision envisagée : « Il faut retirer l’amiante partout où elle se trouve, là ils veulent se contenter de l’encapsuler parce que ça coûte moins cher. Même si c’est légal, c’est prendre le risque que personne ne se rappelle d’ici quelques décennies de la présence d’amiante à cet endroit ».

L’ancien employé municipal rappelle également que déjà en 2012, il avait fallu que son syndicat commande lui-même des diagnostics dans les sous-sols de l’Hôtel de Ville pour que cet endroit soit condamné. Un diagnostic que la CGT avait également commandé au niveau des puits de captage de l’Ile aux Vaches qui avait révélé la présence d’amiante dans le sol. Des enquêtes syndicales qui sont directement liées à la détection de la maladie d’un des employés précédemment cité à l’été 2012. « Les médecins avaient un doute que ce soit lié à un contact avec de l’amiante. On a enquêté dans les services où il avait travaillé ». Un exemple pour le moment assez isolé, mais qui sait demain combien seront-ils dans ce cas ?

Les municipalités actuelles reçoivent ainsi de leur aînées des cadeaux empoisonnés comme celui de l’amiante. Des dossiers compliqués à gérer et terriblement coûteux pour lesquelles elles courent après le temps perdu, d’autant plus que la prise de conscience sur ce problème majeur de santé publique est longue à se dessiner, comme nous le signalait Jean-Jacques Prodhomme : « Les choses évoluent trop lentement quand on sait qu’il y va de la sécurité des personnes ». L’amiante est décidément un dossier qui est loin d’être résolu.

 

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