Nicolas Sarkozy à Saint-Cyr-sur-Loire : « nous devons être capable de marcher tous ensemble »

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Plus de 2000 personnes ont assisté hier soir au retour, sur les terres tourangelles, de l’ancien président de la République. Pas question des sujets qui fâchent. C’est dans la concorde et le rassemblement que Nicolas Sarkozy a galvanisé les foules au gymnase Guy Drut de St-Cyr-sur-Loire. Entre discours nuancé et reprise des thèmes porteurs de la droite forte, l’ancien locataire de l’Elysée peaufine sa stratégie de reconquête d’un parti divisé. Retour sur une soirée au goût de campagne présidentielle.

Il est 19h00. Une longue queue s’est formée devant la porte d’entrée du Gymnase Guy Drut. Les parkings alentours sont complets. Le complexe sportif est déjà rempli de militants et de sympathisants. Tout le banc et l’arrière banc de la droite tourangelle est là. Le maire de Tours, Serge Babary et de nombreux adjoints. Mais aussi Frédéric Augis, maire de Joué-lès-Tours et une partie de son équipe municipale. Hervé Novelli qui a fait le choix très récemment de rouler pour François Fillon, dans le cadre de la future primaire pour désigner le candidat de la droite. De nombreux élus municipaux de l’agglomération ont fait le déplacement. Jean-Gérard Paumier, candidat pressenti à la présidence du Conseil Général et maire de Saint-Avertin fera le choix de rester debout à l’arrière. Mais c’est surtout le très médiatique maire de Neung-sur-Beuvron, Guillaume Peltier, vedette des caméras qui fait le buzz en attendant l’ancien président de la République. La candidate malheureuse à la mairie de Paris, NKM est aussi du voyage… L’heure, ce soir-là, semble à la réconciliation des égos et chapelles de l’UMP.

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« Vous ne passez pas !!! ». Les mots du Groupe de Protection de l’UMP, le « GP », annonce la couleur de la soirée. Les journalistes ne pourront pas faire ce qu’ils veulent. Malgré la présence de plus de 100 journalistes, la plupart ne peuvent pas accéder au devant de la scène. Seules les caméras de France 2 et BFM sont autorisées à entrer dans le périmètre interdit. Pourtant, à l’arrivée de « NS », le cordon de sécurité ne peut contenir la ruée des journalistes. Il y a bousculade. Les flashs crépitent, les voyants rouges des caméras clignotent et les perches pour prendre le son forment une structure métallique improvisée au-dessus de la tête de celui qui fut Président entre 2007 et 2012. Les groupies s’excitent, montent sur les chaises et scandent à gorges chaudes « : « Nicolas, Nicolas, Nicolas,… ».

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Pourtant, il ne s’agit que de la campagne interne pour prendre la présidence de l’UMP. Une UMP mal en point et qui doit coûte que coûte réussir à prendre le virage d’une élection interne exemplaire… Question de faire oublier le duel Coppé / Fillon. La salle est chaude. Son poulain est là. Il a fait le déplacement par le TGV de 17h32 au départ de Paris.

« A la tête de l’Etat, les Français voulaient un homme ordinaire et bien ils l’ont !!!« 

Philippe Briand, le député-maire de St-Cyr-sur-Loire ouvre le bal. Avec une assurance et une gouaille à nul autre pareil, il captive la foule présente dans un silence monacal. « Je n’oublierai jamais quand dans les moments difficiles, toi Nicolas, alors que tu étais pris par la grande charge qui était la tienne, tu téléphonais à mon épouse »… (ndlr : avant qu’elle ne décède d’une longue maladie). Et d’ajouter sur un ton grave et langoureux « toi, tu as été un Président extraordinaire !!! ».
« A la tête de l’Etat, les Français voulaient un homme ordinaire et bien ils l’ont !!! Nous sommes ici dans une élection importante, celle de notre mouvement. Nicolas, reste comme tu es ! ». Les mots de l’ancien trésorier de la campagne de Nicolas Sarkozy en 2012 font mouche. La salle applaudit.
Le maire de St-Cyr rejoue, avec ses talents d’orateur, l’histoire de la Vème République. Celle de De Gaulle, celle de Michel Debré. Des références historiques qui peuvent paraître d’un autre âge pour la centaine de jeunes présents. Mais qui a de l’écho. Dans la salle, 2000 personnes à la moyenne d’âge de plus de 50 ans… Nicolas Sarkozy écoute, engoncé dans un fauteuil en cuir noir. La mise en scène est la même que les autres meetings comme à Lambersart ou Vélizy. Mais à y regarder de près, il n’y avait pas de pupitre comme hier soir à St-Cyr. Philippe Briand termine son éloge et cède la place à « NS » sous un tonnerre d’applaudissements.

C’est une nouveauté depuis que Nicolas Sarkozy bat la campagne. Habitué depuis Lambersart (banlieue chic de Lille) a parler dans un fauteuil, le staff a décidé d’écouter ceux qui suivent la campagne depuis le début. On apprend par une indiscrétion que lors d’une réunion avec des journalistes des différents services politiques des grands médias, beaucoup ont reproché à l’ex-Président de rester au fond de fauteuil. C’est donc debout, costume sombre et cravate bleue, que Nicolas Sarkozy s’adressera aux tourangeaux.

« On doit mettre au service de notre pays, une nouvelle formation politique. Je ne veux pas un retour aux sources »

« Je dédie cette soirée à celle qui fut ton épouse Philippe. Se souvenir des gens, c’est l’humanisme. On n’est pas une page blanche ». Il y a un silence lourd. « Vous êtes venus malgré votre fatigue, votre famille car vous croyez à la noblesse de l’engagement politique ! Voilà pourquoi vous êtes là ce soir ». La méthode Coué fait son effet. La salle acquiesce. Et de continuer sur une technique du discours de la droite républicaine : « Ici on a un point commun, on veut que la France soit fidèle à son histoire ! ».

« Ce soir, je serai sage dans une certaine mesure, je l’ai promis à Nathalie ! (Nathalie Kosiusko-Morizet) », en référence au papier du « Canard Enchaîné » où il traite Bruno Le Maire, l’un de ses challengers à la présidence de l’UMP, de « connard ! ». Pour l’ancien Président, plus question d’avancer par chapelles et de s’opposer en interne. « L’opposition parlementaire doit s’organiser. On doit continuer à croire à l’avenir de notre pays, c’est pas foutu ! ». Nicolas Sarkozy est venu en Touraine , hier soir, en « leader maximo », au-dessus de tous, au-dessus des querelles et clivages. « On doit mettre au service de notre pays, une nouvelle formation politique. Je ne veux pas un retour aux sources ». Alors fini le vieux RPR et l’UMP. Pas si sûr, car les vieux réflexes sont encore présents chez les vieux cadres du parti. Nicolas Sarkozy aura besoin de l’ensemble des barons qui ont traversé les crises qui ont touché le parti depuis 1993. Beaucoup sont encore là. A commencer par Philippe Briand.

Nicolas Sarkozy sait que les Français ont la tentation forte de donner de plus en plus de chance à Marine Le Pen de venir troubler le jeu démocratique. « Imaginez si le Front National devait l’emporter. Il y en a parmi vous qui ont dû faire ce choix. Ne faite pas un chemin à celle qui a permis à M. Hollande d’accéder à la présidence… ! ». Sans pointer du doigt, NS veut râtisser large car la menace est prise très au sérieux.

« Je veux une armée : une équipe de femmes et d’hommes qui consacreront leur temps à leur famille politique »

« Il faut tous se respecter. On ne doit pas se diviser. J’aurai besoin de Bruno Le maire, de Xavier Bertrand, de François Fillon et d’Alain Juppé ». Ce discours de réconciliation est habile. Mais pas sûr que le maire de Bordeaux l’entende de cette oreille. La stratégie de Nicolas Sarkozy consistant à rappeler à la base qu’il a besoin de tout le monde est une manœuvre bien connue. Se plaçant au-dessus de tous, il reprend alors le leadership et se veut rassembleur. Il faut dire que les derniers sondages ne lui sont pas favorables. Mais il faut se garder aujourd’hui de tous pronostics. Souvenez-vous, un an avant les primaires socialistes, François Hollande était crédité de 5 % d’intentions de vote par les militants et sympathisants du PS. Nicolas Sarkozy le sait très bien. « On doit être capable de marcher ensemble. Je ne veux pas de chapelles ou d’écuries, Je veux une armée : une équipe de femmes et d’hommes qui consacreront leur temps à leur famille politique. Je veux créer les conditions d’un très large rassemblement». Nicolas Sarkozy rappelle à la foule que tout ce qu’il dit est sous l’œil bienveillant de la presse. Le public hue l’ensemble des journalistes. Nous ne sommes pas les bienvenus semble-t-il. Nicolas Sarkozy reprend la main « Arrêtez, j’ai assez d’ennuis comme ça ! ». Tout semble savamment orchestré.

Nicolas Sarkozy se pose en réconciliateur. Plus question des guerres de chefs. Il regarde droit dans les yeux au premier rang l’un des leaders de la droite forte : « Guillaume Peltier est l’un de nos jeunes espoirs et il aura de grandes responsabilités dans les années à venir ». L’ancien bébé Buisson, devenu « Sarko Boy », prend note. L’adoubement de l’ancien Chef de l’Etat sonne comme une revanche à une Touraine qui n’a pas voulu de lui. Il poursuit « Nathalie est l’une des meilleures d’entre nous. On a besoin de Guillaume, de Nathalie et des autres… La réconciliation passe aussi par là ! ».

« J’ai une idée précise de ce qui va se passer. L’importance de notre réussite est si essentielle ! Engagez-vous et soutenez- moi !!! »

Pendant le discours d’une heure vingt, le verbe « rassembler » reviendra une trentaine de fois. Comme une incantation à réussir, comme une prière contre l’échec. Car l’enjeu est de taille. Si la droite républicaine loupe cette dernière occasion d’apparaître comme une alternative crédible à la gauche, les partis de gouvernement et la République avec pourront vaciller dans un marasme à l’issue incertaine. Hier soir, à St Cyr, le candidat Sarkozy distille les mots chocs et les mots-clés pour satisfaire un électorat tenté par la couleur bleu marine. Droits et devoirs, valeurs, la famille et l’enfant, les mots sont pesés. Ils font mouche. La salle exulte, s’excite…

Pourtant, hier à St-Cyr, le candidat à la présidence de l’UMP innove. Au risque d’être taxé de populisme par les plus sévères, il ouvre la voix à une utilisation importante du référendum. « On doit redonner la parole au peuple de France, aux Français », clame-t-il au milieu d’applaudissements nourris. « Notre classe politique est trop importante, on doit réduire le nombre de parlementaires. On pourra demander leur avis aux Français par la voie référendaire ». Le visage fatigué et perlant de sueur, il termine sous la clameur d’un public galvanisé « J’ai besoin de vous !! » et la foule lui répondant « nous aussi ! ».
« J’ai une idée précise de ce qui va se passer. L’importance de notre réussite est si essentielle ! Engagez-vous et soutenez-moi !!! » . La Marseillaise retentit.

« Il y a eu une inflexion nette dans la campagne » nous confiera un confrère du Journal Le Monde. Il est 21h45, une sexagénaire, casquette vissée sur la tête ramasse la pancarte « Serge Babary » restée sur le siège qu’a occupé le maire de Tours et la met dans son sac. Hier soir à St-Cyr-sur-Loire, il n’y avait pas que les supporters  de Nicolas Sarkozy au Gymnase Guy Drut.

 

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