Budgets participatifs : un plan B face à la raréfaction des subventions ?

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Du Département d’Indre-et-Loire à la Ville de Tours en passant par les mairies de St-Pierre-des-Corps, Chambray voire Saint-Martin-le-Beau, de plus en plus de collectivités tourangelles lancent leur budget participatif. A chaque fois l’idée est la même : consacrer une somme d’investissement à des projets poussés par la population. L’analyse des idées retenues est riche d’enseignements. Décryptage.

Samedi 21 octobre la ville de Tours annonce les résultats du dépouillement des votes de son 2e budget participatif. En 6 semaines, 6 200 personnes ont voté pour départager les 67 dossiers jugés recevables par les services municipaux. Ouvert aux habitants mais aussi aux personnes qui travaillent ou étudient à Tours, le scrutin a suscité un intérêt en baisse comparé à la première édition (100 bulletins de moins qu’en 2022), mais le taux de participation se maintient, se montant à environ 5% de la population totale de la commune.

L’analyse des réponses a permis de sélectionner 15 projets qui seront réalisés dans les mois à venir, au plus tard courant 2025. Tous les quartiers sont concernés, la mairie ayant à cœur de quadriller le territoire (ce qui n’était pas forcément le cas la première année). Parmi les projets lauréats : 65 000€ pour l’achat de matériel dédié aux associations handisport dans le quartier Tours-Nord-Ouest, 70 000€ pour aménager le Parc de Ste Radegonde, 10 000€ pour construire 100 abris dédiés aux abeilles sauvages ou encore 60 000€ pour installer des panneaux solaires sur le Palais des Sports.

Environnement, handicap, vie quotidienne : voilà donc à quoi servira l’enveloppe globale de 700 000€ débloquée par les élus (contre 500 000€ en 2022). Un investissement pour répondre directement aux désirs d’habitants ou d’usagers de l’espace public. Politiquement c’est tout bénéf : d’ailleurs, on se souvient que la quasi-totalité des listes candidates aux élections municipales de 2020 proposaient ce type d’initiative. Tout de même, on ne peut que constater que certains projets vainqueurs vont servir à réaliser des travaux normalement essentiels à la vie d’une cité : 50 000€ pour rendre la ville plus accessible aux personnes malvoyantes et 70 000€ pour l’accessibilité aux personnes à mobilité réduite. A Chambray-lès-Tours, c’est l’idée d’un parcours fitness handisport qui a également été soumise au vote lors de l’été 2023.

En clair, si ces dossiers n’avaient pas retenu les faveurs des votants, quand est-ce que la mairie aurait investi des sommes pour assurer l’accessibilité universelle de l’espace public ? Autrement dit, pour assouvir une liberté fondamentale. Comment ne pas se dire qu’ici, le budget participatif sert à masquer le manque criant d’argent public dédié à l’amélioration du quotidien des personnes en situation de handicap ?

Pensé pour satisfaire des besoins d’enjolivement du quotidien en ville, les budgets participatifs se retrouvent donc, en quelque sorte, détournés de leur objectif initial. Cela devient un peu le plan B quand on ne parvient pas à obtenir directement un soutien financier pour un projet… et c’est d’ailleurs très malin de la part des habitants, collectifs ou associations qui n’en peuvent plus d’attendre des crédits ou subventions. Voilà donc mises en évidence par le vote démocratique les négligences des pouvoirs publics souvent obnubilés par les routes, la croissance ou le rayonnement… On redescend un peu sur terre quand on voit que certains projets aussi simples que l’ajout de bancs ou de cendriers de rue sont plébiscités à Tours.

Au passage, au moins à Tours, on ne peut que constater que les idées validées sont globalement en phase avec la ligne politique de la majorité d’Emmanuel Denis : mangeoires à oiseaux, abris pour chauve-souris, outils pour les abeilles sauvages… On ne doute pas que ça en fera sourire. Peu importe. L’écologie et la nature tiennent expressément la corde parmi les différentes propositions. Idem à Chambray : fontaines à eau pour les oiseaux, grainothèque ou plantation d’orchidées ont été proposées en 2023. Pour être exhaustifs, précisons que des idées culturelles ou artistiques foisonnent aussi comme du street art sur des châteaux d’eau, une yourte pour un centre socio culturel ou la sauvegarde du patrimoine technique et scientifique de Gustave Trouvé à Descartes. Mais elles n’ont pas toujours les faveurs finales (un projet de fresque sur le château d’eau refusé à Tours cette année). Que penser de tout ça ? Les idées en provenance des budgets participatifs ne sont-elles qu’anecdotes ou pourraient-elles aller jusqu’à influer sur les décisions naturelles des assemblées d’élus dans le futur ? Qui sait. Cela montre au moins qu’il n’est pas toujours nécessaire de lancer des projets grandiloquents pour mener des actions populaires. Reste tout de même le défi de mobiliser encore plus largement car 5% d’une population qui vote, c’est assez faible malgré une communication tous azimuts.

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