Après 12 ans d’existence, La Cité de la Gastronomie peine encore à trouver sa voie à Tours

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Alors que la ville de Tours, vient de faire une croix sur une enveloppe de 1.2 millions d’euros destinée à la Cité de la Gastronomie, prévue dans le cadre du Contrat Régional de Solidarité Territoriale (CRST) signé avec la Région Centre-Val de Loire pour la période 2021-2027, certains, à commencer par les élus d’opposition Thibault Coulon et Bertrand Rouzier, s’interrogent sur l’ambition et l’avenir de cette cité érigée en label en 2013 et qui peine à trouver une direction claire depuis.

Un projet revu à maintes reprises

Pour rappel, la ville de Tours a été sélectionnée en 2013 par le Ministère de l’Agriculture, en compagnie de Paris-Rungis, Dijon et Lyon pour faire partie du réseau des cités internationales de la gastronomie. Un réseau créé pour valoriser l’inscription au patrimoine immatériel de l’Unesco du « repas gastronomique à la française ». Pour Tours, cette labellisation était une récompense et une suite logique, cette inscription à l’Unesco ayant été initiée par l’IEHCA (L’Institut Européen d’Histoire et des Cultures de l’Alimentation) basé à Tours.

Depuis cette labellisation, le projet de Tours a connu néanmoins plusieurs péripéties. Piloté par l’ancien maire Jean Germain en personne, le projet original était conçu autour d’un nouveau bâtiment « totem » qui devait être construit sur les bords de Loire, à proximité de la faculté des Tanneurs. Un bâtiment qui aurait été relié à l’île Simon par une passerelle piétonne. L’île étant alors repensée autour de ce projet ambitieux, estimé à 35 millions d’euros.

Elu en 2014, son successeur Serge Babary décide de se donner le temps de la réflexion pour repenser le projet à moindre coût. Un nouveau projet est alors confié à une association créée en mars 2015, présidée par Emmanuel Hervé.

Sur le papier l’histoire était entendue, l’association « Tours, Cité Internationale de la Gastronomie en Val de Loire » devait porter le label sur le plan culturel et touristique. Labellisée sur un thème précis, « la gastronomie, un art de vivre à la française », Tours, contrairement aux autres cités, s’affranchissait alors d’un projet autour d’un lieu totem pour développer « du contenu plus que du contenant », nous expliquait-on alors. Dans les faits, le projet tourangeau peinera à être visible et lisible à l’extérieur de son propre milieu.

La Villa Rabelais, épicentre de la Cité de la Gastronomie depuis 2017

Pourtant tout est loin d’être négatif, l’association revendiquant ainsi en 2017, 150 acteurs du territoire autour du projet et plus de 70 manifestations de tailles variables organisées. Parmi ces événements on note alors ceux organisés à la Villa Rabelais (une soixantaine de conférences, rencontres, débats, expositions…) où l’IEHCA a trouvé refuge depuis janvier 2017, mais aussi des événements déjà existants et labellisés depuis du tampon de la Cité de la Gastronomie à l’instar de Vitiloire.

Parmi les événements marquants, on retient également Le Grand Repas, organisé chaque année depuis 2017. Mais cet événement médiatique, d’abord piloté par « Tours, Cité de la Gastronomie », passe à partir de 2019 en nom propre et son organisation quitte Tours, suite au retrait du soutien puis la liquidation de l’association gérant le label par la ville de Tours et le maire d’alors Christophe Bouchet.

La vision de ce dernier est à ce moment-là de reprendre en main le label en gardant un axe éducation et scientifique à la Villa Rabelais, piloté par l’IEHCA, mais aussi avec un lieu de résidence pour des grands chefs et une école du repas gastronomique. En parallèle il souhaite confier la partie événementielle à Tours Evénements (suite à l’échec notamment de l’implantation du festival Tours et ses Franco Gourmandes) et enfin lancer un axe grand public au sein du bâtiment des Halles de Tours entièrement reconstruit par le promoteur retenu Icade :   

Le projet des Halles de Tours souhaité par Christophe Bouchet en 2019

Le projet des Halles ne verra jamais le jour. Refusé par les commerçants du bâtiment en question, il est définitivement enterré par Emmanuel Denis, l’écologiste élu comme maire de la ville en 2020 face à Christophe Bouchet.

Un projet pas plus avancé sous le mandat d’Emmanuel Denis

L’arrivée de l’écologiste à la tête de la ville, n’entraine pas non plus de nouvelle dynamique pour la Cité de la Gastronomie. Si la ville continue de s’appuyer sur l’IEHCA pour faire vivre la Villa Rabelais, et relance l’idée d’un jardin au sein de cet espace, pour le reste, le label ne vit qu’à de rares occasions comme lors de Vitiloire. La partie événementielle ; hormis celle réussie de l’IEHCA (des conférences, des concours de gastronomie divers…) mais qui reste peu connue du grand public ; reste au point mort, tandis qu’il faut attendre l’été 2025 pour qu’un projet soit annoncé concernant les étages vides des Halles de Tours :

Relire notre article à ce sujet : ce qui est prévu à partir de 2026 au-dessus des Halles de Tours

En revanche, il n’est plus évoqué d’école de cuisine comme celle de Thierry Marx, un temps envisagé au Sanitas et annoncée par l’équipe municipale actuelle en 2021. 

C’est dans ce cadre que le retrait de l’enveloppe de 1.2 millions d’euros du CRST destinée à la Cité de la Gastronomie, a interpellé les élus d’opposition Thibault Coulon et Bertrand Rouzier en conseil municipal début octobre. Le premier a notamment insisté sur le retard pris par rapport aux autres villes labelisées « nous sommes la ville où le projet a le moins avancé ». Concrètement, en regardant les autres projets, Dijon a bien lancé et ouvert son projet pharaonique de Cité de la Gastronomie et du Vin, autour d’un espace muséal mais aussi d’un quartier mixte. Lyon de son côté ayant réhabilité l’Hôtel Dieu, tandis que Rungis doit ouvrir son centre en 2029. Néanmoins, à lire la presse locale, aucun de ces trois projets n’a encore trouvé son rythme et les coûts mis dedans sont pour l’instant à pure perte. Dijon n’arrive pas à attirer le million de visiteurs promis par an. Lyon de son côté a simplement fermé sa Cité après la période Covid, pour la repenser de manière moins ambitieuse à partir de 2022, sans trouver son public là-encore. Quant à Rungis, le projet sur 7 hectares a été plusieurs fois repoussé.

Du côté de la ville de Tours, la première adjointe, déléguée à la politique alimentaire par ailleurs, ne cache pas que le label « souffre d’une reconnaissance », mais met en avant le travail salué unanimement par l’IEHCA, tout en évoquant une politique plus globale comprenant la nouvelle cuisine centrale (qui se voit réaffecter les 1.2 millions d’euros cités plus haut), le projet des étages des Halles donc ou encore les événements comme Vitiloire.

Quoiqu’il en soit, au fil des municipalités différentes, qui successivement ont senti embarrassées par ce label, force est de constater que Tours Cité de la Gastronomie, à défaut de projet d’envergure peine aujourd’hui à se faire connaitre du grand public, faute à une identité claire et aux nombreux soubresauts qui ont accompagné son existence.

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