Gilets jaunes : Entre colère et incompréhension

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Les récents événements autour du mouvement des « Gilets jaunes » font poser beaucoup de questions. Entre minorité virulente mise en avant, véritable colère populaire, mais aussi absence de mouvement organisé… ce mouvement est difficile à appréhender. Pourtant il n’est pas à prendre à la légère, au risque de conduire à une fracture profonde au sein de la société.

Une absence d’organisation comme principale faiblesse du mouvement.

Le mouvement des « Gilets jaunes » est difficile à appréhender par sa forme inédite et son aspect protéiforme. L’absence d’interlocuteurs officiels renforce la confusion. Les « gilets jaunes » l’ont bien compris et on voit depuis quelques jours un début de structuration avec des coordinateurs reconnus. Un embryon d’organisation pas encore assez solide pour gérer un mouvement dans lequel beaucoup semblent découvrir les luttes sociales. A Tours, ce samedi, beaucoup de gilets jaunes ont ainsi été surpris par la tournure des événements qui ont dégénéré en peu de temps. L’arrivée de quelques uns plus vindicatifs, souhaitant mettre le feu à des palettes sur la ligne de tramway a fait basculer la journée. Mais alors même que beaucoup de « Gilets jaunes » présents se montraient en désaccord et tentaient de raisonner leurs camarades, l’intervention rapide et musclée des forces de l’ordre a surpris beaucoup de ces personnes peu habituées aux manifestations et qui y ont vu une réaction disproportionnée et déplacée.

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Une intervention qui a conduit à un affrontement à distance avec les plus virulents des manifestants, rejoints bientôt par des éléments extérieurs venus spécialement pour faire face aux policiers… Trois heures de face à face entre feux de poubelles, barricades à la hâte d’un côté et de nombreux envois de gaz lacrymogènes et autres grenades de désencerclements de l’autre. Une ambiance de chaos sous le regard médusé et parfois paniqué d’une foule habituelle d’un samedi après-midi de fin novembre à Tours, entre familles et passants faisant leurs achats de Noël, clients en terrasse et badauds divers…

Au bout du compte il en ressort une impression de manque de contrôle et de discernement de part et d’autres et un sentiment d’incompréhension générale. Du côté des forces de l’ordre à cause du nombre exceptionnel d’envois de gaz lacrymogènes et du côté des « Gilets jaunes » parce que les événements de samedi ont montré qu’en l’absence d’organisation le mouvement pouvait facilement se faire dépasser et devenir incontrôlable.

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La nécessité d’entendre la colère des « Gilets jaunes »

Mais les scènes de chaos dans le centre de Tours (ou ailleurs), si impressionnantes soient-elles, ne doivent pas occulter l’essentiel. Car la colère est profonde et importante et ne peut se résumer à cette triste face visible. Beaucoup de Français se sentent en colère et affichent leur sympathie pour les manifestants, ou plus précisément partagent le même ras-le-bol que les manifestants, en témoignent le nombre de gilets jaunes affichés sur les tableaux de bord des voitures un peu partout. Et les réponses apportées jusqu’à présent par l’exécutif et la majorité LREM ne sont pas à la hauteur de cette colère. Le dernier communiqué du député de Tours en est l’illustration. En se focalisant sur les événements de samedi après-midi, Philippe Chalumeau ne répond en rien aux inquiétudes de la majorité des « Gilets jaunes ». Pire, le député ne semble pas s’adresser à eux. (Lire le communiqué ici)

(Ndlr : A noter que dans le même communiqué, le député de Tours annonce avoir porté plainte pour des menaces reçues à son encontre et à l’encontre de sa famille, sur les réseaux sociaux et par voie postale.)

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Pourtant le danger est bien là, dans cette absence totale de dialogue et de compréhension. Une partie de la population ne croit plus dans les élus et dans le système représentatif de la République et le fossé se creuse. Nous l’expliquions la semaine dernière, c’est une nouvelle vague de dégagisme qui s’exprime en ce moment à travers ceux qui sont mobilisés. Des personnes qui ne croient plus dans le système républicain et qui se voient renforcer dans leurs convictions après les événements de samedi, à en croire les réactions des manifestants, qui pour beaucoup n’ont vu dans l’intervention des forces de l’ordre qu’un signe du mutisme supplémentaire des pouvoirs publics. Et c’est bel et bien là le danger, car cette seule forme de réponse ne peut conduire qu’à un renforcement des tensions et à une radicalisation supplémentaire de cette population se sentant encore un peu plus méprisée.

Le mouvement finira peut-être par se taire à l’usure, c’est en tout cas la stratégie sur laquelle le gouvernement semble parier, mais en faisant de la sorte, il occulte un mal plus profond et prend le risque d’une fracture définitive avec une partie de la population. Fracture qui se traduira à n’en pas douter, à l’instar d’autres pays, non seulement par un vote extrême encore plus grand à l’avenir, mais aussi par une fracture au sein même de la société…

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