Entre performances et tristesse, la saison particulière des U19 du Tours FC

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Ce mardi 8 mai, une équipe tourangelle va fouler la pelouse du Stade de France : en lever de rideau de la finale de la Coupe de France opposant le Paris Saint Germain aux Herbiers, le Tours FC va affronter Troyes en finale de la Coupe Gambardella. Alors que l’équipe professionnelle a vécu une saison infernale en Ligue 2, les jeunes de moins de 19 ans du centre de formation montrent que le club a toujours des ressources pour briller même après le pire des drames : la perte d’un coéquipier. Avant le coup d’envoi, retour sur l’histoire d’un groupe avec son coach, Nourredine El Ouardani.  

A 40 ans dont 34 de football, Nourredine El Ouardani a beaucoup encadré : dès 18 ans il était éducateur, entraîneur-joueur en Corse à 26 ans (son poste : défenseur) et, depuis 2013, il fait partie de la team de coachs du Tours FC avec à son actif une participation au maintien de l’équipe en Ligue 2 pour la saison 2016-2017, alors qu’elle était déjà menacée de relégation. Reconduit sur le banc en août (avec Gilbert Zoonekynd, entraîneur titulaire), les mauvais résultats du groupe professionnel ont eu raison de son poste en milieu de saison mais pas de sa place au sein du club : Nourredine El Ouardani est retourné d’où il venait, l’encadrement des jeunes du centre de formation, en l’occurrence de l’équipe des moins de 19 ans qu’il suit depuis 4 ans.

Le bac aussi important que le foot

Les 30 U19 qu’il drive, Nourredine El Ouardani les surnomme « les enfants » et les suit de près pour parer à la moindre faiblesse : « notre premier rôle c’est de les accompagner sportivement, le deuxième c’est d’être comme un grand frère à l’écoute de leurs problèmes. » En internat au Tours FC, les ados du centre de formation sont souvent loin de leurs familles. Certains viennent du Mans, de Loches ou de Montrichard mais plusieurs autres de région parisienne, de Brive, Bourg-en-Bresse ou Saint-Priest (dans la région lyonnaise), ils peuvent éventuellement rentrer les rares week-ends sans match ou pendant les vacances scolaires (sachant qu’à part pour les fêtes ils n’ont qu’une semaine sur deux) mais c’est tout. Le reste du temps, ce sont leurs proches qui viennent leur rendre visite.

Même s’ils peuvent sortir sur la ville, ces footballeurs en devenir vivent donc en petite autarcie avec un quotidien intense et millimétré : réveil à 6h30, petit déjeuner à 7h, navette pour le lycée à 7h30 (7h40 dernier délai), retour à 15h40 pour un entraînement de 16h30 à 18h du lundi au vendredi + une autre séance le samedi matin. La scolarité est un élément incontournable de leur parcours, et Nourredine El Ouardani ne manque jamais une occasion de le rappeler : « ils arrivent avec plein de rêves mais on sait bien qu’il y a beaucoup de candidats au départ et peu d’élus à l’arrivée. Ils ne seront pas tous sous contrat donc il faut penser à une reconversion. La plupart préparent le bac, je devine que la finale de la Coupe Gambardella prend le pas dessus en ce moment mais l’examen a autant d’importance. Pour exemple, dans la génération 95-96 championne de France des U19 en 2014, 100% des joueurs avaient eu leur bac. »

« Ce n’est pas une surprise qu’on soit là »

Pour suivre le cursus des sportifs répartis dans plusieurs établissements généraux ou technologiques (Paul-Louis Courier, Victor Laloux, Martin Nadaud…), le Tours FC salarie un responsable scolarité, l’étude est obligatoire chaque soir de 19h30 à 21h (même sans devoirs) et en cas de problème de scolarité – par exemple un mauvais comportement – la sanction c’est pas d’entraînement : « ils sont là pour s’entraîner donc s’ils ne peuvent pas le faire ça impacte leur projet sportif » résume Nourredine El Ouardani pour justifier l’enjeu.

Nourredine El Ouardani
Nourredine El Ouardani

Repérés puis recrutés par le TFC pour débuter leur parcours sur les bords du Cher, les garçons qui constituent le groupe en finale de la Gambardella sont aujourd’hui aux portes du monde professionnel, certains l’ont même touché du doigt en disputant des matchs de Ligue 2 cette saison. Soudés, ils avancent ensemble tout en sachant qu’il n’y aura pas de la place pour tout le monde. « Oui il y a une concurrence entre eux, pas forcément visible mais indirectement elle existe » relève Nourredine El Ouardani. Ainsi, 10 joueurs champions des U19 en 2014 évoluent en pro actuellement, soit environ 1 sur 3, « un résultat plus que satisfaisant » selon l’entraîneur tourangeau.

« Ce serait trop facile de mettre cette équipe U19 en National »

Pour passer à l’étape supérieure, les Tourangeaux doivent donc se faire remarquer, briller sur le terrain. Cette saison, ils n’ont pas toujours été à la hauteur (ils sont dans le ventre mou de leur championnat) mais sont parvenus à se hisser jusqu’en finale de la Coupe Gambardella : un très beau résultat obtenu après avoir notamment éliminé Bordeaux (club de Ligue 1 au budget de formation sensiblement plus élevé) mais pas un exploit selon Nourredine El Ouardani : « aller si loin chaque année serait exceptionnel pour un club comme le nôtre. On est que le Tours FC mais on est assez réguliers depuis 4 ans. La saison dernière on a été en phase finale du championnat U17 avec une demi-finale perdue contre Monaco. Quand on fait des matchs comme ça, ce n’est plus un accident, c’est vraiment un travail continu. Ce n’est pas une surprise qu’on soit là. »

Dans un monde footbalistique où la patience existe peu (Nourredine El Ouardani en a fait l’expérience lors de son passage avec les pros), la constance du centre de formation du Tours FC reconnue à l’extérieur est donc une expertise à défendre mais un atout également en sursis depuis la confirmation de la descente du club en National : ce dernier a désormais deux ans pour remonter sous peine de perdre son statut professionnel, ce qui serait un drame pour l’encadrement des jeunes. On en est évidemment pas encore là, et pour l’instant le coach essaie plutôt de voir le verre à moitié plein : « dans notre malheur de descendre, il y a le bonheur pour ces jeunes de finir leur formation à un niveau supérieur. Ils vont toucher au monde pro plus vite que prévu » (d’autant que Tours ne va pas avoir beaucoup de moyens pour recruter, et aura donc besoin de ses ressources internes pour densifier son groupe).

« Le décès de Thomas Rodriguez leur donne une force supplémentaire »

Belle opportunité pour ces footballeurs propulsés en vitrine grâce à leur belle saison, l’hypothèse de jouer les premiers rôles dans l’équipe de National des Ciel & Noir ne doit cependant pas être vue comme la solution miracle :

« Si on attend d’eux qu’ils soient les sauveurs, on va se tromper. Ce sont des gamins que l’on doit amener petit à petit pour ne pas les griller. Ils sont capables de faire de bons matchs mais il ne faut pas trop leur en demander non plus », prévient Nourredine El Ouardani, « ce serait trop facile de mettre cette équipe U19 en National, il ont besoin d’être encadrés car ils vont tomber sur des joueurs aguerris avec une forte expérience et un jeu très athlétique. »

Car, sans renier leurs qualités sur le terrain, la qualification en finale des U19 tourangeaux c’est aussi le point d’orgue d’une saison particulière et douloureuse où ils ont dû aller chercher des forces au plus profond d’eux-mêmes pour se transcender et ne pas sombrer : le 9 mars, tous ont été saisis par le décès d’un de leurs coéquipiers, le jeune Thomas Rodriguez qui n’avait que 18 ans, victime d’un problème cardiaque et mort dans son sommeil. Depuis, c’est en sa mémoire que les joueurs courent chaque semaine : « il y a eu une prise de conscience sur leur vie de tous les jours, que tant qu’on était sur terre il fallait profiter un max », résume Nourredine El Ouardani, « il ne peut pas y avoir pire que ça mais quand on est compétiteur on ne peut pas abandonner après un drame tragique. Ils ont une envie de réussir qui va au-delà d’eux. Thomas leur donne une force supplémentaire. »

Portrait de Thomas Rodriguez au siège du club.

Alors pour le match de ce mardi contre Troyes, l’entraîneur fait confiance à son équipe et à ses ressources : « on ne change rien à nos habitudes » nous dit-il quand on lui demande comment le groupe se prépare. Attendu en région parisienne ce lundi, il visitera le Stade de France avant d’entrer sur le terrain le lendemain après-midi pour 90 minutes intenses et historiques, car c’est la première fois qu’un club de la région se hisse à ce niveau. En tribune, 1 000 supporters tourangeaux seront là pour que la fête soit la plus belle possible.

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