Signes des Temps #96 Plantes vertes anti-SDF avenue André Malraux

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Le pitch : « Signes des Temps » ce sont des images chassées par notre journaliste Laurent Geneix dans les rues, les bâtiments et les chemins de la Touraine ; des traces laissées par l’Homme pour l’Homme, parfois très claires, parfois très floues, violentes, commerciales et/ou drôles, mais toujours signifiantes – que ce soit grâce à des mots, des dessins ou des symboles – et potentiellement visibles par tous.

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Le règne végétal contre le règne animal : c’est vieux comme le Monde. Mais les plantes carnivores qui bouffent les SDF, on n’avait encore jamais vu ça. Depuis plusieurs semaines en passant, je voyais matin, midi et soir trois ou quatre personnes squatter ce petit espace avec sacs de couchage, sacs de bouffe et cartons. Un espace urbain protégé (de la pluie complètement, du vent partiellement, du froid nullement) dont la taille correspondait peu ou prou à celle d’une couche pour plusieurs et dont la proximité avec la bibliothèque permettait à ces sans-domicile – aux jours et heures d’ouvertures – d’avoir accès à un point d’eau et à des toilettes.

Oui mais voilà, à mon retour de congé, je découvre en remplacement de ces voisins deux grands pots de plantes vertes dont la surface et le volume suffisent à empêcher toute installation. Après le fameux «mobilier urbain qui vous veut du bien» repéré en janvier 2015 par mon collègue, voici donc la plante verte qui non seulement agrémente le passage entre deux entrées d’immeubles, mais de surcroît renvoie la misère hors de notre vue, certainement pour le grand soulagement de riverains qui n’ont sans doute «rien contre les pauvres», mais préfèrent évidemment ne pas les avoir en bas de chez eux. En Angleterre on appelle ça le syndrome NIMBY, pour «Not In My BackYard», pas dans ma cour.

A part quelques chaleureux bonjours, je n’ai jamais entendu ces voisins (que j’ai croisés plusieurs fois par jour pendant des semaines) dire un mot plus haut que l’autre, ni agressé qui que ce soit. Certes, je ne vis pas ici 24h sur 24 et il se peut que j’aie donc échappé à d’éventuels dérapages et de possibles agressions qui ont pu justifier ce «dégagisme», activité décidément fortement tendance, dans les isoloirs comme dans les rues de notre douce ville.

Mon coté pessimiste me hante et insiste pour me susurrer à l’oreille depuis hier que ces gens n’avaient rien fait d’autre que déranger le voisinage par leur simple présence disons… inhabituelle, au double-sens possible du terme. Mon côté optimiste, lui, tente de me dire qu’on leur a trouvé un logement et qu’ils dorment désormais bien au chaud et que l’arrivée subite de ces plantes n’est que le fruit du hasard et qu’elles avaient été commandées par les copropriétés il y a trois ans (date de mon arrivée dans le quartier) et qu’une longue rupture de stock explique cette livraison archi-tardive. Oui, je sais ce que vous allez me dire : que mon côté optimiste fume la moquette et recrache la fumée par les oreilles.

Il y en a qui doutent dans l’isoloir, d’autres tous les matins devant le miroir, moi là pour le coup, je doute devant ce petit remplacement aux allures anodines, mais qui en dit tellement long.

Un degré en plus

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